Energie
le 06/11/2025

Irrégularité de l’implantation d’un ouvrage de distribution d’électricité fondée sur une convention de servitude non signée par l’ensemble des coindivisaires

TA de Grenoble, 3ème, 7 octobre 2025, n° 2300717

Par un jugement du 7 octobre 2025, le Tribunal administratif de Grenoble a jugé que le défaut de signature d’une convention de servitude par l’ensemble des coindivisaires de la parcelle d’implantation d’un ouvrage du réseau public de distribution d’électricité invalidait ladite convention et entrainait l’irrégularité de l’implantation de l’ouvrage.

Saisi d’un litige relatif au déplacement d’un ouvrage du réseau public de distribution pour la construction d’un ensemble de logements sociaux, le Tribunal administratif de Grenoble a appliqué le raisonnement, désormais bien établi, du Conseil d’Etat, en répondant successivement à plusieurs questions : l’ouvrage est-il régulièrement implanté ? Dans la négative, une régularisation est-elle possible ? Dans la négative, quels sont les inconvénients de la présence de l’ouvrage et les conséquences d’une éventuelle la démolition sur l’intérêt général ?

En premier lieu, le Tribunal administratif de Grenoble a jugé que l’ouvrage dont le déplacement était demandé par les requérants était irrégulièrement implanté au motif que la convention de servitude sur le fondement de laquelle l’ouvrage était implanté n’avait pas été signée par l’ensemble des coïndivisaires.

La société Enedis fondait la régularité de l’implantation de l’ouvrage de la concession sur une convention de servitude conclue en 1994. Or, cette convention n’avait été signée que par l’un des coindivisaires de la parcelle d’implantation de l’ouvrage. Le tribunal a ainsi jugé :

« Alors qu’une convention de servitude ne saurait être qualifiée d’acte se rapportant à l’exploitation normale des biens indivis, la convention conclue en 1994 en vue de l’extension de la ligne électrique implantée en 1968 n’a été signée que par M. F… A… sans recueillir l’accord des autres indivisaires. (…) Il résulte de ce qui a été dit plus haut que la société Enedis ne peut se prévaloir d’une servitude, de sorte que les ouvrages en litiges sont irrégulièrement implantés. »

En deuxième lieu, face au constat de l’irrégularité de l’implantation de l’ouvrage, le tribunal a analysé la possibilité d’une régularisation.

Le tribunal a estimé que le projet de construction de la parcelle occupée et des parcelles contigües justifiant la demande de déplacement de l’ouvrage était déjà trop engagé pour qu’un accord amiable soit trouvé entre la société Enedis et les propriétaires de la parcelle. Le tribunal a par ailleurs jugé que « la mise en œuvre d’une procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique prévue par l’article R. 323‑1 du Code de l’énergie ne parait pas réalisables en l’état de l’instruction » pour en déduire qu’une régularisation n’était pas envisageable.

En troisième lieu, le tribunal a fait application de la théorie du bilan en mettant en balance les inconvénients de la présence de l’ouvrage et les conséquences d’une éventuelle la démolition sur l’intérêt général.

Le tribunal a jugé que « eu égard aux inconvénients importants que la présence de l’ouvrage public entraîne pour les requérants et à l’intérêt public qui s’attache à la construction de logements collectifs, l’enlèvement de ces ouvrages électriques n’apparait pas de nature à entraîner une atteinte excessive à l’intérêt général. »

Le tribunal a finalement enjoint à la société Enedis de déplacer les ouvrages électriques irrégulièrement implantés sur la parcelle dont les requérants sont les propriétaires indivis.