Projets immobiliers publics privés
le 12/10/2023

Irrecevabilité d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur le statut d’ordre public du fermage

Cass. Civ., 3ème, 22 juin 2023, n° 23-40.006

Le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, établissement public de l’Etat, a acquis, en 2005, plusieurs parcelles occupées depuis 1995 par un agriculteur. Par jugement en date du 15 mai 2019, le tribunal paritaire des baux ruraux a dit que l’exploitant bénéficiait d’un bail rural depuis 1995.

Le 18 août 2020, le Conservatoire du littoral notifie à l’agriculteur un congé portant refus de renouvellement du bail rural. Le preneur conteste ce congé devant le tribunal paritaire des baux ruraux. Dans le cadre de cette procédure, le tribunal paritaire des baux ruraux a transmis à la Cour de cassation plusieurs questions prioritaires de constitutionnalité qu’il entendait voir soumettre au Conseil constitutionnel. Ces questions portaient notamment sur le fait de savoir si « le statut d’ordre public du fermage agricole est un principe fondamental reconnu par les lois de la République », et si l’article L. 322-9 du Code de l’environnement, qui dispose notamment que « le domaine relevant du Conservatoire du littoral et des rivages lacustres est du domaine public à l’exception des terrains acquis non classés dans le domaine propre », est conforme à la déclaration des droits de l’homme et du citoyen et à la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’homme.

La Cour de cassation considère que cette question est irrecevable, dès lors qu’elle n’explicite pas « ce que recouvrirait le principe de statut d’ordre public du fermage agricole, ni ne précise les droits conférés par le statut du fermage, tel qu’institué par le titre Ier du livre IV du code rural et de la pêche maritime, dont le fermier entend se prévaloir ».

 

La Cour de cassation ajoute que les questions, qui « ne précisent pas en quoi la disposition législative critiquée porterait atteinte aux principes constitutionnels garantis par les articles 4, 13 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 » ne lui permettent pas « d’en vérifier le sens et la portée ». Rappelons que les conditions de recevabilité d’une question prioritaire de constitutionnalité sont les suivantes :

  • L’applicabilité de la loi au litige : La disposition législative en cause doit être applicable au litige ou à la procédure, ou constituer le fondement des poursuites ;
  • L’absence de déclaration préalable de conformité ;
  • Le caractère sérieux ou nouveau de la question.

En l’espèce, la question ne permettait pas de comprendre en quoi la disposition législative contrevenait à la norme constitutionnelle invoquée par l’agriculteur, auteur de la question. Par cet arrêt, la Cour de cassation rappelle que les questions prioritaires de constitutionnalité doivent être explicite et intelligible, à défaut de quoi elle ne peut qu’en constater l’irrecevabilité.