Urbanisme, aménagement et foncier
le 13/10/2022

Irrecevabilité de l’action en nullité de la vente devant le juge judiciaire par l’acquéreur évincé devenu propriétaire à la suite de son droit de priorité de rétrocession du bien objet d’une décision préemption annulée par le juge administratif

Cass. Civ., 3ème, 7 septembre 2022, n° 21-12.114

Dans cette affaire, une commune a exercé son droit de préemption sur un immeuble. Cette décision de préemption s’est suivie de la signature d’un acte authentique de vente entre le propriétaire du bien et la commune.

En parallèle, la décision de préemption a fait l’objet d’un recours contentieux devant le juge administratif. Le Tribunal administratif a annulé cette décision, et la Cour administrative d’appel a confirmé cette annulation.

L’acquéreur évincé a donc assigné la commune et le propriétaire initial en annulation de la vente consentie à la commune, et en réitération de la vente conclue entre lui et l’ancien propriétaire avant le recours à la préemption.

En outre, conformément à l’article L. 213-11-1 du Code de l’urbanisme, la commune a donc dû proposer, en priorité, l’acquisition du bien préempté à son propriétaire initial, qui l’a refusé.

Puis, dans un second temps, la commune a proposé l’acquisition de ce bien en priorité à l’acquéreur évincé, lequel était en revanche toujours intéressé, de sorte qu’une promesse de vente a été conclue entre la commune et l’acquéreur évincé.

Seulement, l’acquéreur évincé – devenu nouveau propriétaire – a maintenu son action en nullité de la vente initiale.

Et la Cour d’appel a fait droit à ses demandes en prononçant la nullité de la vente entre le propriétaire initial et la commune. Plus précisément, la Cour d’appel a retenu que l’acquéreur évincé avait bien un intérêt à agir en raison de sa qualité d’acquéreur évincé à la suite de la décision de préemption ultérieurement annulée. Aussi, la Cour d’appel a retenu que, du fait de l’annulation de la décision de préemption par le juge administratif, la vente conclue à la suite de la préemption entre le propriétaire du bien et la commune devait elle-même être déclarée nulle, et que, en conséquence, la commune était réputée n’avoir jamais été propriétaire dudit bien. En revanche, la Cour d’appel n’a pas fait droit aux conclusions de l’acquéreur évincé tendant à ce que soit déclarée parfaite la vente du bien entre lui et le propriétaire initial antérieurement à la décision de préemption.

Le propriétaire initial du bien a donc saisi la Cour de cassation d’un pourvoi à l’encontre de cet arrêt. L’acquéreur évincé a également déposé un pourvoi incident.

En cassation, relevons d’abord que la Cour de cassation s’est prononcée sur le moyen du pourvoi incident de l’acquéreur évincé, tendant à ce que soit déclarée parfaite la vente à son profit de l’immeuble aux conditions de la promesse.

En réponse, la Cour de cassation a considéré que la Cour d’appel avait exactement déduit que l’acquéreur évincé n’était plus fondé à réclamer l’exécution de sa promesse de vente avec le propriétaire initial du bien, dans la mesure où l’acquéreur évincé avait conclu par la suite une promesse de vente avec la commune, née de la proposition de cette dernière de rétrocession du bien en litige.

Ensuite, la Cour de cassation s’est prononcée sur les moyens du pourvoi principal du propriétaire initial. La Cour de cassation a censuré le raisonnement de la Cour d’appel qui avait jugé que l’acquéreur évincé était recevable à agir. Or, selon la Cour de cassation « lorsque, après s’être acquitté de son obligation de proposer l’acquisition du bien à l’ancien propriétaire, qui y a renoncé, le titulaire du droit de préemption propose cette acquisition à l’acquéreur évincé, qui l’accepte, celui-ci n’est plus recevable à demander l’annulation de la vente conclue avec l’ancien propriétaire à compter de la date de conclusion de la promesse de vente ».

En outre, la Cour de cassation a estimé que la Cour d’appel avait commis une erreur en jugeant que la décision administrative ayant été annulée par le juge administratif, la vente conclue entre le propriétaire initial et la commune devait elle-même être déclarée nulle et, en conséquence de cette annulation, la commune était réputée n’avoir jamais été propriétaire du bien.

A cet égard, la Cour de cassation confirme que la commune était demeurée propriétaire du bien en dépit de l’annulation de la décision de préemption par le juge administratif.

Enfin, statuant au fond, la Cour de cassation a considéré que l’acquéreur évincé n’était bien plus recevable à demander l’annulation de la vente conclue entre le propriétaire initial du bien et la commune du seul fait qu’il avait conclu, ultérieurement, une promesse de vente avec la commune.