Environnement, eau et déchet
le 06/04/2023

Information environnementale : le secret des affaires ne peut faire obstacle à la communication des informations relatives aux émissions de substances

CE, 15 mars 2023, Association Réseau Sortir du nucléaire, n° 456871

Le Conseil d’Etat a, par un arrêt en date du 15 mars 2023, apporté d’utiles précisions sur les informations environnementales relatives aux émissions de substances dans l’environnement susceptibles d’être communiquées.

Une spécificité existe en effet s’agissant des informations relatives aux émissions dans l’environnement. Ainsi, l’article L. 124-5, II du Code de l’environnement dispose que l’autorité publique ne peut rejeter la demande d’une information relative à des « émissions de substances dans l’environnement » que dans le cas où sa consultation ou sa communication porte atteinte, notamment, à la sécurité publique, mais le secret des affaires ne figure pas dans la liste des causes pouvant justifier ce refus de communication. Or la règle générale définie aux articles L. 124-4 du Code de l’environnement et L. 311-6 du Code des relations entre le public et l’administration prévoit qu’en matière d’information environnementale le secret des affaires peut être un motif de refus de communication.

La notion « d’information relative à des émissions de substances dans l’environnement » est donc centrale pour apprécier si le régime général (art. L. 124-4) ou spécial (art. L. 124-5) est applicable, et donc déterminer l’étendue du droit à communication. La Cour de justice de l’Union européenne avait défini les notions suivantes (CJUE, 23 novembre 2016, C-442/14) :

  • Emission dans l’environnement : rejet de produits ou de substances, pour autant que ce rejet soit effectif ou prévisible dans des conditions normales ou réalistes d’utilisation ;
  • Informations relatives à des émissions dans l’environnement : les indications concernant la nature, la composition, la quantité, la date et le lieu des émissions dans l’environnement ainsi que les données relatives aux incidences, à plus ou moins long terme, de ces émissions sur l’environnement. Sont ainsi exclues du champ d’application de ce régime les émissions purement hypothétiques. Dans un autre arrêt, la CJUE avait indiqué que ces informations sont celles qui concernent ou qui sont relatives à de telles émissions, et non les informations présentant un lien, direct ou indirect, avec les émissions dans l’environnement, et que cette notion concerne notamment, mais pas uniquement, les émissions provenant d’installations industrielles comme des usines ou des centrales (CJUE, 23 novembre 2016, C-673/13).

Le Conseil d’Etat en conclut que « la sécurité publique et le secret des affaires sont au nombre des motifs pour lesquels l’exploitant peut refuser, après une appréciation au cas par cas de son intérêt, la communication de telles informations. Par exception, le secret des affaires n’est pas opposable lorsque les informations demandées se rapportent à des émissions dans l’environnement effectives ou prévisibles dans des conditions normales ou réalistes de fonctionnement de l’installation, ce qui n’est pas le cas des émissions susceptibles de résulter d’un accident éventuel, lesquelles présentent un caractère purement hypothétique ».

Sur ce fondement, le juge indique que ne constituent pas des informations relatives à des émissions de substances dans l’environnement, susceptibles de ne pas faire l’objet d’une communication au titre du secret des affaires, celles relatives aux équipements et méthodes destinés à empêcher des émissions accidentelles (ici relatives à la teneur des outils de surveillance utilisés dans la piscine d’entreposage et à la température de l’eau).