Une société a déposé en 2006 une demande de permis de construire pour régulariser des travaux réalisés sans autorisation sur une maison principale, sans solliciter la régularisation d’une maison de famille et d’une piscine préexistantes sur le même terrain. Le Conseil d’État a jugé que, dès lors que ces constructions formaient un ensemble immobilier unique, la régularisation devait porter sur l’ensemble, et que le permis obtenu partiellement constituait une fraude justifiant son retrait.
En l’espèce, la société pétitionnaire a déposé, en 2006, une demande de permis de construire afin de régulariser des travaux réalisés sans autorisation sur une maison dite « principale ».
Cette demande mentionnait également l’existence d’une maison dite « de famille » et d’une piscine, dont les surfaces figuraient dans la présentation du projet. Toutefois, ces deux constructions avaient été édifiées sans autorisation entre 2000 et 2003, et leur régularisation n’était pas sollicitée dans le cadre de la demande de permis déposée en 2006.
Plusieurs années plus tard, un jugement pénal a retenu le caractère frauduleux des démarches entreprises et ordonné la démolition des ouvrages irréguliers. Sur ce fondement, le maire a procédé en 2017 au retrait du permis de construire, estimant que celui-ci avait été obtenu par fraude, en application de l’article L. 241-2 du Code des relations entre le public et l’administration, qui autorise le retrait à tout moment d’un acte administratif obtenu par fraude.
Le Conseil d’État devait déterminer si une demande de permis de construire déposée pour un bâtiment ayant fait l’objet de transformations sans autorisation devait nécessairement inclure la régularisation de l’ensemble des éléments concernés par ces travaux irréguliers, en particulier lorsque plusieurs constructions situées sur une même unité foncière présentent des liens physiques ou fonctionnels.
Le Conseil d’État rappelle d’abord le principe selon lequel, lorsque des transformations ont été réalisées sans les autorisations d’urbanisme requises, le propriétaire qui sollicite un nouveau permis de construire doit déposer une demande portant sur l’ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu’il avait été initialement approuvé.
Autrement dit, une demande de permis ne peut pas avoir pour seul objet de régulariser partiellement un bâtiment irrégulièrement modifié : elle doit couvrir l’ensemble des modifications intervenues sur la construction concernée.
Le Conseil précise toutefois que cette exigence ne s’impose pas lorsque les travaux irréguliers portent sur d’autres constructions distinctes implantées sur le même terrain, dès lors que ces constructions ne forment pas un ensemble immobilier unique avec celle faisant l’objet de la demande.
En l’espèce, le dossier de demande de permis de 2006 mentionnait la surface de la « maison de famille », et il ressortait des faits que cette maison avait été reliée physiquement à la « maison principale » par une galerie, formant ainsi un ensemble immobilier unique.
Le Conseil d’État en déduit que la société pétitionnaire ne pouvait ignorer le caractère irrégulier de la « maison de famille » et qu’elle aurait dû inclure cette dernière dans sa demande de régularisation. Le fait de ne solliciter la régularisation que pour la maison principale constituait une manœuvre frauduleuse, destinée à contourner le règlement d’urbanisme applicable.
Dès lors, le permis de construire délivré en 2006 avait été obtenu par fraude, ce qui justifiait son retrait par le Maire de Grasse et annule donc le jugement du tribunal administratif.
Ainsi, la régularisation partielle n’est pas admise pour un bâtiment modifié sans autorisation dès lors qu’il appartient à un ensemble immobilier unique.