Propriété intellectuelle
le 31/08/2023

Focus sur la notion de « risque de confusion » en droit des marques

Article L713-2 du Code de la propriété intellectuelle

La marque que l’on souhaite déposer porte-t-elle atteinte à une marque antérieure ? Le dépôt d’un tiers ressemble-t-il réellement à notre marque ? Y a-t-il matière à former opposition ou à engager une procédure en contrefaçon de marque ?

Toutes ces questions impliquent de comprendre comment est analysé le risque de confusion par les offices de marques[1] et les juridictions françaises.

L’article L.713-2 du Code de la propriété intellectuelle dispose qu’est non seulement interdit l’usage d’un signe identique à une marque antérieure, mais également d’un signe similaire s’il est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires et qu’il engendre un risque de confusion.

1.     Comparaison des signes

Si l’analyse de signes strictement identiques peut sembler aisée, celle de signes similaires est forcément moins évidente.

Cette analyse est opérée à la fois sur le plan visuel, phonétique mais également conceptuel.

C’est la reprise d’éléments distinctifs d’un signe qui va engendrer un risque de confusion, tandis que la simple reprise d’éléments secondaires sera insuffisante.

Les éléments distinctifs sont ceux qui apparaissant comme les plus attractifs aux yeux du consommateur. A l’inverse, seront considérés descriptifs les termes utilisés dans le langage courant rappelant les produits ou services désignés, ou reprenant une caractéristique de ces derniers comme leur qualité ou leur provenance géographique.

L’utilisation d’un mot de langage courant peut cependant s’avérer distinctif s’il ne rappelle pas les produits ou services qu’il désigne (ORANGE pour des services téléphoniques ; APPLE pour des produits électroniques ; DIESEL pour des vêtements etc.).

Dans certains cas, même un signe dépourvu de caractère distinctif face aux produits et services qu’il désigne peut l’acquérir du fait d’un usage continu, intense et de longue durée de la marque (à titre d’exemple, la marque « vente-privee.com » ou encore « CARRE BLANC » pour désigner du linge de maison).

2.     Comparaison des produits / services désignés

Outre l’analyse des signes, le risque de confusion est analysé en fonction des produits et services désignés par les marques.

L’analyse de ces produits et services est réalisée en fonction de tous les facteurs pertinents et en particulier, de leur nature, destination, utilisation ainsi que leurs caractères complémentaires[2].

Ainsi, seront considérés comme des produits et services complémentaires et donc similaires les « boissons à base de café » (classe 30) et les « services de bars ; cafés-restaurants, cafétérias » (classe 40), ces derniers préparant et fournissant nécessairement les premiers.

La comparaison des produits et services est réalisée au regard du seul libellé des marques, indépendamment de leurs conditions d’exploitation ou de l’activité du déposant.

A titre d’illustration, la Cour de cassation a considéré que la Cour d’appel avait violé les dispositions du Code de la propriété intellectuelle en rejetant la contrefaçon de marques au motif qu’une marque désignerait des produits de grande consommation achetés en supermarché tandis que l’autre marque désignerait des produits destinés à un public de professionnels[3].

3.     Appréciation globale du risque de confusion

Ce risque de confusion est apprécié au regard du consommateur d’attention moyenne qui doit pouvoir raisonnablement penser, sans forcément avoir simultanément devant lui les deux signes, qu’il s’agit soit de la même marque que la marque antérieure, soit d’une déclinaison de cette dernière, provenant de la même entité.

Le risque de confusion entre les signes est apprécié à la fois par les offices de marque et les juridictions françaises de manière globale, impliquant une interdépendance entre les similitudes relevées entre les signes et les similitudes relevées entre les produits et services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les marques peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les produits ou services couverts et inversement.

Malgré une harmonisation des critères d’appréciation du risque de confusion, cette notion reste difficile à appréhender pour les titulaires de marques et les déposants, l’appréciation laissée aux offices de propriété intellectuelle ainsi qu’aux juridictions demeurant assez large.

___

[1] Ici les offices sont limités aux offices européen (l’EUIPO) et français (l’INPI)

[2] CJCE, 29 sept. 1998, Canon Kabushiki Kaisha c/ Metro-Goldwyn-Mayer

[3] Com. 27 mars 2019, no 17-31.605