Numérique et télécom
le 16/03/2023

Financement du raccordement d’une maison aux réseaux de communications électroniques / Réseau téléphonique / Fibre optique / Article L. 332-15 du Code de l’urbanisme

Article L. 332-15 du Code de l’urbanisme

Deux réponses ministérielles viennent préciser le régime des adductions des nouvelles constructions nécessaires à leur raccordement aux réseaux de communications électroniques.

  1. Les réseaux de télécommunications ne sont pas des équipements publics au sens de l’article L. 332-15 du Code de l’urbanisme

Confirmant plusieurs réponses ministérielles précédentes (notamment le ministère de la cohésion des territoires, JO Sénat du 23/01/2020 – page 409), le Ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement a à nouveau indiqué, dans une réponse à une question parlementaire, que les réseaux de télécommunications ne constituent pas des équipements publics et n’entrent donc pas dans le champ de l’article L. 332-15 du Code de l’urbanisme.

Plus précisément, la question parlementaire portait sur le fait de savoir si, lorsque la maison est construite, qui du propriétaire, de la commune ou du gestionnaire des réseaux, a la charge de financer la prolongation des conduites d’eau et d’assainissement permettant de raccorder l’immeuble concerné. La question parlementaire posait la même question pour ce qui concerne le raccordement au réseau téléphonique.

Le Ministre a rappelé le principe selon lequel, « le financement des équipements publics et de leur prolongement est assuré par le budget des collectivités locales. Par exception, les articles L. 332-6 et L. 332-6-1 du code de l’urbanisme énumèrent de manière exhaustive les contributions pouvant être mises à la charge des constructeurs pour contribuer à financer les équipements publics d’infrastructures induits par l’urbanisation ainsi que les équipements propres aux opérations d’aménagement prévus à l’article L. 332-15 du code de l’urbanisme. Ce dernier article prévoit ainsi la possibilité d’imposer via l’autorisation d’urbanisme, la réalisation et le financement de certains équipements propres à l’opération, ainsi que leur branchement aux équipements publics existants au droit du terrain. Il prévoit également pour les seuls réseaux d’eau et d’électricité, la possibilité de demander au constructeur le financement du raccordement à usage individuel sur les réseaux d’eau potable ou d’électricité existants situés sur des emprises publiques, dans une limite de distance de 100 mètres ».

En revanche, s’agissant du réseau téléphonique, le ministère indique que « c’est l’opérateur Orange qui assure la gestion, le développement et la maintenance du réseau de téléphonie. Toute demande de raccordement est à adresser à l’opérateur. La charge financière est à assurer par le demandeur ».

Si la réponse ministérielle est sans doute à nuancer quant à l’identité de l’opérateur chargé de raccorder les maisons neuves du fait qu’Orange n’est plus l’opérateur en charge du service universel depuis le 3 décembre 2020, la réponse est intéressante car, malgré la privatisation du secteur des télécommunications depuis 1997, certains acteurs du secteur des réseaux de communications électroniques continuent d’assimiler les réseaux de télécommunications à des équipements publics (pour un exemple récent, voir : ARCEP, Consultation publique du 12 janvier 2023 au 13 février 2023, Synthèse des travaux sur les modalités tarifaires des raccordements finals des réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné, 12 janvier 2023).

L’article L. 332-15 du Code de l’urbanisme ayant pour objet de substituer au financement par les collectivités et leurs groupements d’équipements publics une contribution des constructeurs, il est logique que cet article ne s’applique plus aux réseaux de télécommunications qui sont propriété des opérateurs de communications électroniques.

Cette réponse ministérielle confirme le fait que :

  • La mise en œuvre de l’article L. 332-15 du Code de l’urbanisme est une simple possibilité ;
  • les autorités chargées d’octroyer les autorisations d’urbanisme ne peuvent pas se fonder sur l’article L. 332-15 du Code de l’urbanisme pour imposer aux pétitionnaires des prescriptions relatives aux réseaux de télécommunications des opérateurs privés.

http://www.senat.fr/basile/visio.do?id=qSEQ220701893

  1. Les obligations des constructeurs en matière d’équipements des constructions neuves en fibre optique relèvent du Code de la construction et de l’habitation

Dans une autre réponse ministérielle, le ministère auprès du Ministre de l’Économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications rappelle que, s’agissant d constructions neuves, le raccordement à la fibre optique de tous les bâtiments neufs nouvellement construits est prévu en application de l’article L. 113-10 du Code de la construction et de l’habitation.

Plus précisément, la question parlementaire portait sur les difficultés rencontrées par les administrés souhaitant faire raccorder à la fibre une construction neuve et « qui ne bénéficierait pas de l’arrivée de la fibre du bon côté de la chaussée ou nécessitant toute opération de génie civil idoine. Son propriétaire se voit dès lors contraint de débourser l’intégralité du coût de la traversée de chaussée par la fibre, via un support aérien ou souterrain selon les cas. Le coût du raccordement devient alors prohibitif pour ces ménages, comparativement à celui supporté par l’ensemble des habitations existantes qui les entourent ».

Le Ministre répond notamment que « s’agissant des obligations applicables pour les constructions neuves, le raccordement à la fibre optique de tous les bâtiments neufs nouvellement construits est obligatoire, en application de l’article L. 113-10 du code de la construction et de l’habitation. Ainsi, les promoteurs sont tenus d’équiper chaque logement en infrastructures nécessaires à l’installation des lignes de fibre optique. Face à certaines difficultés rencontrées lors du raccordement final permettant de faire aboutir le réseau FttH dans le logement ou le local de l’utilisateur final, une réflexion a été menée associant les différents acteurs concernés (opérateurs télécoms, Arcep, Gouvernement…). Une expérimentation et une étude ont été pilotées par la Direction générale des entreprises (DGE) et l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) en 2021, afin de mieux appréhender les difficultés pouvant empêcher certains locaux d’être raccordés. L’étude a recensé les complexités survenant lors du raccordement final, et formulé des préconisations. En particulier, l’étude a constaté que l’absence de génie civil en aval des points de branchement optique et en domaine public peut concerner un nombre conséquent de locaux situés en zone d’initiative publique, et constituer un frein aux déploiements concernant le raccordement final des locaux concernés. Par conséquent, en 2022, un soutien financier supplémentaire de l’Etat au financement de la création en domaine public des infrastructures nécessaires aux raccordements finals dans les zones d’initiatives publiques, à hauteur de 150 M€, a été décidé, pour soutenir la généralisation de la fibre optique (ou de débits équivalents) Ce soutien vise à assurer le succès plein et effectif du déploiement de la fibre sur tout le territoire. L’arrêté du 19 avril 2022, publié au Journal officiel du 23 avril 2022, a approuvé le cahier des charges de l’appel à projets « Création d’Infrastructures de génie civil nécessaires aux Raccordements finals ». Par ailleurs, l’Arcep a engagé fin 2020 un travail sur les enjeux des raccordements finals FttH afin d’identifier les problématiques financières et opérationnelles liées à la réalisation de tous les raccordements finals. Ces travaux visaient également à identifier les solutions à mettre en œuvre afin de favoriser le raccordement de tous les utilisateurs aux réseaux FttH ».

Il est intéressant de noter, d’une part, que ne sont visées par le Ministre que les dispositions du Code de la construction et de l’habitation et, d’autre part, que le soutien financier supplémentaire au financement de la création en domaine public des infrastructures nécessaires aux raccordements finals dans les zones d’initiative publique est mis en place par l’Etat au bénéfice des porteurs de projets de réseaux, et non des pétitionnaires d’autorisations d’urbanisme. Ce qui tend à confirmer que les seules dispositions législatives régissant les obligations des constructeurs en matière de fibre optique sont celles du Code de la construction et de l’habitation, à l’exclusion du Code de l’urbanisme.

http://www.senat.fr/questions/base/2022/qSEQ220902664.html