La CJUE a été saisie de plusieurs questions préjudicielles à l’occasion d’un litige dirigé contre l’autorisation administrative de construction des installations du parc éolien « A Raña III » délivrée par les autorités espagnoles.
Dans ce cadre se sont ainsi posées des questions relatives à l’interprétation de l’article 6 de la Directive 2011/92/UE relative à l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement (Directive EIE) et plus précisément de l’articulation entre deux étapes de la procédure de consultation préalable à la délivrance d’une autorisation : la consultation du public, d’une part, et celle des organismes compétents dans le domaine environnemental (forêt, eau, patrimoine naturel et culturel, tourisme, santé, énergie électrique…), d’autre part.
Selon la juridiction nationale espagnole, l’article 6 de la Directive imposerait nécessairement aux Etats membres de prévoir que les rapports établis par les organismes environnementaux doivent être soumis au public dès lors qu’ils sont au nombre des « principaux rapports et avis adressés à l’autorité ou aux autorités compétentes au moment où le public concerné est informé », tels que prévus par l’article 6 paragraphe 3 b) de la Directive. Elle déplore ainsi que la législation nationale ne prévoit pas de mesure postérieure à la réception de ces rapports permettant d’offrir au public l’occasion de participer au processus d’évaluation environnementale du projet.
Les questions préjudicielles soumises à la CJUE portent alors sur la notion de « principaux rapports et avis », mentionnés dans la Directive ainsi que sur l’obligation ou non de soumettre au public les rapports rendus par les organismes environnementaux consultés sur un projet dans le cadre de la procédure de consultation.
La CJUE résume les questions de la manière suivante :
« […] la juridiction de renvoi demande, en substance, si la directive EIE, et en particulier son article 6, paragraphe 3, sous b), doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une législation d’un État membre selon laquelle, dans le cadre d’une procédure d’évaluation des incidences sur l’environnement d’un projet soumis à cette directive, les autorités susceptibles d’être concernées par ce projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d’environnement ou de leurs compétences locales et régionales, sont consultées en même temps que le public concerné, sans que ce dernier soit ensuite habilité à adresser, à l’autorité ou aux autorités compétentes pour autoriser ledit projet, ses observations et avis sur les avis donnés dans ce cadre par les autorités consultées ».
Pour répondre à ces interrogations, la Cour rappelle tout d’abord qu’il est nécessaire de s’assurer de l’effectivité de la consultation du public qui doit pouvoir émettre des observations et des avis « à un stade précoce » de la procédure et en tout état de cause avant l’adoption de la décision d’autorisation. Elle précise également que pour garantir cette effectivité le public doit pouvoir exprimer son avis de façon utile et complète sur le projet concerné.
S’agissant ensuite de la consultation des autorités compétentes en environnement, la CJUE rappelle la nécessité de s’y soumettre tout en constatant qu’aucune disposition ne prévoit à quel stade du processus cette consultation doit avoir lieu. Elle relève également que l’article 6 de la Directive ne prévoit pas que les avis et rapports de ces autorités doivent être soumis au public ni que ce dernier puisse adresser leurs observations sur ceux-ci.
Surtout, selon la CJUE, dès lors l’article 6 de la Directive ne soumet expressément à la consultation du public que les rapports et avis adressés à l’autorité ou aux autorités compétentes « au moment où le public concerné est informé », s’il ne peut être exclu que, ceux-ci doivent être communiqués au public lorsqu’ils ont été adressés aux autorités compétentes au moment où ce dernier est informé, « il ne peut pas être déduit non plus de cette disposition que lesdits avis doivent, en toute hypothèse, faire partie des informations servant de base à la consultation du public concerné ».
La Cour indique alors qu’ « il est loisible aux États membres de réaliser les consultations des autorités susceptibles d’être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d’environnement ou de leurs compétences locales et régionales, d’une part, et du public concerné, d’autre part, concomitamment et sans que ce dernier soit ensuite habilité à adresser, à l’autorité ou aux autorités compétentes pour autoriser ledit projet, ses observations et avis sur les avis donnés dans ce cadre par les autorités consultées, comme ce fut le cas en l’occurrence ».
Elle conclut ainsi en ces termes :
« [La Directive EIE] ne s’oppose pas à une législation d’un État membre selon laquelle, dans le cadre d’une procédure d’évaluation des incidences sur l’environnement d’un projet soumis à cette directive, les autorités susceptibles d’être concernées par ce projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d’environnement ou de leurs compétences locales et régionales, sont consultées en même temps que le public concerné, sans que ce dernier soit ensuite habilité à adresser, à l’autorité ou aux autorités compétentes pour autoriser ledit projet, ses observations et avis sur les avis donnés dans ce cadre par les autorités consultées ».