Environnement, eau et déchet
le 10/03/2022

Déchets : refus de transmission d’une QPC sur la vente sans conditionnement plastique des fruits et légumes

CE, 28 février 2022, Fédération française de la coopération fruitière, légumière et horticole (Felcoop) et autres, n° 459387

CE, 28 février 2022, Syndicat Alliance plasturgie et composites du futur (Plastalliance), n° 458440 

 

Par deux décisions du 28 février 2022, le Conseil d’Etat a rejeté, pour défaut de caractère sérieux des griefs invoqués, les demandes de transmission de questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) relatives à la conformité avec les normes constitutionnelles de l’interdiction de présenter les fruits et légumes à la vente avec conditionnement composé pour tout ou partie de matière plastique.

Il faut rappeler tout d’abord que l’article 77 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi AGEC, dont le contenu figure aujourd’hui à l’article L. 541-15-10 du Code de l’environnement, régit l’obligation pour les commerces de détail d’exposer les fruits et légumes frais non transformés sans « conditionnement composé pour tout ou partie de matière plastique » à compter du 1er janvier 2022. La portée de cette interdiction a été précisée par le décret n° 2021-1318 du 8 octobre 2021 relatif à l’obligation de présenter à la vente des fruits et légumes frais non transformés sans conditionnement composé pour tout ou partie de matière plastique, qui faisait justement l’objet de la contestation par les requérantes.

Il a été soutenu dans les recours que cette interdiction méconnaissait plusieurs normes constitutionnelles, ce qu’écarte le Conseil d’Etat.

  • S’agissant tout d’abord des griefs tirés de la méconnaissance du préambule de la Charte de l’environnement et de son article 6, relatif à la promotion du développement durable, le Conseil d’Etat indique que ceux-ci n’instituent pas un droit ou une liberté que la Constitution garantit et qu’ils ne peuvent donc pas être invoqués dans le cadre d’une QPC. En outre, selon le juge, l’interdiction mise en place ayant un caractère pérenne, elle n’est pas fondée sur le principe de précaution;
  • Les requérantes soutenaient ensuite que cette interdiction n’aurait pas d’effet sur la réduction du plastique dès lors que des emballages qui pourront toujours entourer les produits jusqu’à leur livraison aux commerces de détail et qu’elle aurait au contraire pour effet d’accroitre le gaspillage alimentaire. Le Conseil d’Etat relève toutefois que cette mesure poursuit un objectif de réduction du plastique et de protection de l’environnement dès lors que les livraisons pourront avoir lieu sans emballage ou qu’un déconditionnement pourrait être instauré dans le commerce. Dès lors, ne présentent pas un caractère sérieux les griefs tirés de la méconnaissance du droit à un environnement sain, ni du devoir de prendre part à la préservation de l’environnement, ni de l’objectif à valeur constitutionnelle de protection de l’environnement;
  • Les requérantes invoquaient également un grief tiré du 11ème alinéa du préambule de la Constitution de 1946 relatif à la protection de la santé dès lors que les nouveaux conditionnements pourraient avoir un effet néfaste sur la santé. Le Conseil d’Etat considère que ce grief n’est pas sérieux dès lors que le texte n’impose pas de recours à un conditionnement de substitution ;
  • Enfin, cette interdiction ne porte pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre dès lors qu’elle est lien avec les objectifs de valeur constitutionnelle de protection de la santé et de l’environnement poursuivis, que des dérogations à cette interdiction sont prévues et que les professionnels du secteur ont eu près de deux ans pour s’adapter.