Environnement, eau et déchet
le 09/06/2022

Constitutionnalité des restrictions apportées au développement des installations de tri mécano-biologiques des déchets

Conseil constitutionnel, 22 avril 2022, Fédération nationale des collectivités de compostage et autres, n° 2022-990 QPC

Par une décision en date du 22 avril 2022, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) contestant la conformité avec diverses normes constitutionnelles des dispositions de l’article L. 541-1 du Code de l’environnement instaurant diverses restrictions au développement des installations de tri mécano-biologique (TMB). Pour information et selon la définition de l’ADEME, le TMB « vise à recycler ou optimiser le traitement des ordures ménagères résiduelles. Il consiste en l’imbrication d’opérations mécaniques [dilacérations et tri] et d’étapes biologiques [compostage, méthanisation] »[1] et se distingue donc du tri à la source.

En son paragraphe I, l’article L. 541-1 du Code de l’environnement conditionne l’autorisation de nouvelles installations TMB, l’augmentation de capacités des installations existantes ou encore leur modification notable au respect de la généralisation du tri à la source des biodéchets par les collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents. En outre, ces installations ne peuvent bénéficier d’aides de personnes publiques. La rédaction de cette disposition est issue de l’article 90 de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi AGEC, et vise à privilégier le tri à la source des biodéchets plutôt que leur traitement en TMB. Pour être complet, on indiquera que les conditions de mise en œuvre de ces restrictions ont été précisées par le décret n° 2021-855 du 30 juin 2021[2] et un arrêté du 7 juillet 2021[3].

Les auteurs de la QPC soutenaient que cette disposition méconnaissait le principe de libre administration des collectivités territoriales ainsi que le droit de propriété, dès lors qu’elle entraverait « les choix opérés par les collectivités territoriales au titre de la compétence que la loi leur reconnaît en matière de gestion des déchets » (§3). En outre, les requérants considéraient que cette restriction était trop imprécise, portant une atteinte irrégulière aux exigences de sécurité juridique et d’intelligibilité de la loi et qu’elle caractériserait une incompétence négative du législateur. Enfin, selon les requérants, le texte aurait également pour effet d’instituer une rupture d’égalité entre les communes et EPCI ayant choisi de mettre en place une installation TMB et les autres.

Le Conseil constitutionnel relève toutefois que la priorisation du tri à la source des biodéchets sur les installations TMB induite par l’article L. 541-1 du Code de l’environnement découle des objectifs de réduction et de valorisation des déchets ménagers et de l’estimation par le législateur de l’insuffisance des performances de valorisation des installations TMB. Dès lors, le législateur « a poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de l’environnement » (§12) et a défini des modalités qui ne sont pas manifestement inappropriées à cet objectif. Dans cette mesure, le Conseil constitutionnel n’était pas tenu d’examiner si d’autres voies plus pertinentes auraient pu être retenues pour atteindre ce même objectif. Les juges énoncent en outre que cette disposition, qui n’est pas imprécise et qui n’institue pas de différence de traitement, n’empêche pas les communes et EPCI de mettre en place des installations TMB et d’exploiter les installations existantes.

La QPC est donc rejetée.

 

[1] https://expertises.ademe.fr/economie-circulaire/dechets/passer-a-laction/tri-pretraitement/traitement-mecano-biologique

[2] Décret n° 2021-855 du 30 juin 2021 relatif à la justification de la généralisation du tri à la source des biodéchets et aux installations de tri mécano-biologiques

[3] Arrêté du 7 juillet 2021 pris en application de l’article R. 543-227-2 du code de l’environnement