Fonction publique
le 09/02/2023

Conformité à la constitution de l’exonération d’impôt sur le revenu des indemnités spécifiques de rupture conventionnelle perçues par les agents publics

Décision n° 2022-1033 QPC du 27 janvier 2023

Par une décision n° 2022-1033 QPC du 27 janvier 2023, le Conseil constitutionnel vient de déclarer conformes à la Constitution les dispositions législatives du Code général des impôts qui prévoient une exonération partielle d’impôt sur le revenu des indemnités spécifiques de rupture conventionnelle perçues par les fonctionnaires et les agents publics recrutés par contrats à durée indéterminée.

Le Conseil constitutionnel avait été saisi en novembre dernier par le Conseil d’Etat (n° 467518 du 16 novembre 2022) d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions du dernier alinéa du 6° du 1 de l’article 80 duodecies du Code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020. Plus précisément, le 1 de l’article 80 duodecies du CGI prévoit que toute indemnité versée à l’occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable à l’impôt sur le revenu, à l’exception de certaines indemnités limitativement énumérées par l’article, et notamment (6°) les indemnités versées à un salarié à l’occasion de la rupture conventionnelle du contrat de travail.

Alors que le dernier alinéa du 6° précise que cette exception s’applique aux indemnités spécifiques de rupture conventionnelle versées aux agents publics, il ne prévoit en revanche aucune exonération pour les indemnités de licenciement perçues par les agents publics.

Le Conseil d’Etat a ainsi estimé que présentait un caractère sérieux la question de la méconnaissance de ces dispositions aux principes d’égalité devant la loi et d’égalité devant les charges publiques, en tant qu’elles limitent le bénéfice de l’exonération des indemnités perçues par les agents publics à raison de la rupture de leur relation de travail aux seules indemnités de rupture conventionnelle, à l’exclusion des indemnités de licenciement.

Le Conseil constitutionnel a dans un premier temps constaté que les dispositions litigieuses du Code général des impôts instituent effectivement une différence de traitement :

  • d’une part entre les agents publics selon qu’ils perçoivent une indemnité de rupture conventionnelle ou de licenciement ;
  • et d’autre part, en cas de licenciement, entre les agents publics et les salariés dès lors que seules les indemnités perçues par ces derniers bénéficient d’une exonération partielle.

Il a néanmoins ensuite rappelé que : « le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit ».

Or au cas d’espèce, le Conseil a considéré que les agents publics faisant l’objet d’une rupture conventionnelle ont « convenu avec leur employeur des conditions de la cessation définitive de leurs fonctions », et qu’ils ne sont donc pas placés dans la même situation que ceux ayant fait l’objet d’un licenciement. La différence de traitement, qui est donc fondée sur une différence de situation, a été regardée également comme étant en rapport avec l’objet de la loi, dès lors que le législateur a entendu, en instituant cette exonération, « favoriser les reconversions professionnelles de ces agents vers le secteur privé ».

Il en résulte, selon les Sages, que le principe d’égalité devant la loi n’a pas été méconnu.

Enfin, le Conseil constitutionnel a jugé que c’est également sans méconnaissance du principe d’égalité que le législateur a réservé le bénéfice de l’exonération d’impôt sur le revenu aux indemnités de licenciement perçues par les seuls salariés, après avoir relevé que les salariés (de droit privé) et les agents publics sont soumis à des régimes juridiques différents s’agissant des règles de licenciement.

Le Conseil Constitutionnel a ainsi conclu que les dispositions contestées de l’article 80 duodecies du Code général des impôts ne méconnaissent ni le principe d’égalité devant la loi, ni le principe d’égalité devant les charges publiques, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, et qu’elles doivent donc être déclarées conformes à la Constitution sans réserve.