Energie
le 08/06/2023

Concessions hydroélectriques sous le régime des « délais glissants » : précision par arrêté du calcul de la redevance due par le concessionnaire

Arrêté en date du 10 mai 2023 relatif aux prix cibles mentionnés à l'article L. 523-3 du Code de l'énergie

L’article L. 523-3 du Code de l’énergie, a été introduit par la loi de finances pour 2019 (Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019) afin de pallier le préjudice financier subi par les collectivités territoriales et leur groupement en cas d’application du mécanisme dit des « délais glissants » pour les concessions hydroélectriques.

En effet, tel que nous l’indiquions dans une précédente lettre d’actualité, certaines concessions hydroélectriques arrivées à leur termes devaient être renouvelées par l’organisation d’une procédure de publicité et de mise en concurrence. Faute pour ces concessions d’avoir été renouvelées après publicité et mise en concurrence, les concessions ayant été prolongées selon le mécanisme des « délais glissants », leurs concessionnaires, exploitants des barrages, échappaient au paiement de la redevance proportionnelle aux recettes de la concession prévue par l’article L. 523-2 du Code de l’énergie pour les nouvelles concessions hydrauliques[1] due aux collectivités et groupements de collectivités sur le territoire desquels les cours d’eau exploités sont situés.

Cette question a fait l’objet de quelques décisions juridictionnelles. A titre d’exemple, dans une décision publiée en décembre 2021 et commentée dans une précédente lettre d’actualité, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a pu se prononcer sur l’engagement par une commune de la responsabilité de l’Etat en réparation du préjudice subi pour non-renouvellement d’une concession hydroélectrique.

Par suite dans doute de ces débats, depuis le 1er janvier 2019, l’article L. 523-3 du Code de l’énergie a fixé une redevance obligatoire pesant sur les concessionnaires d’installations hydroélectriques, dont ceux dont le contrat de concession est soumis au régime des « délais glissants ». Cette redevance, proportionnelle aux recettes ou aux bénéfices de la concession, est pour partie affectée aux collectivités et groupements de collectivités sur le territoire desquels sont situés les cours d’eaux concernés.

Dans le contexte de la crise énergétique, cet article a été modifié par la loi de finances pour 2023 (loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023) pour préciser que « si la moyenne annuelle des prix constatés sur le marché mentionnés au premier alinéa de l’article L. 523-2 est supérieure à un prix cible de l’électricité, les parts mentionnées aux troisième à cinquième alinéas du présent article sont calculées sur la base de ce prix cible. Un prix cible différencié peut être utilisé pour les stations de transfert d’énergie par pompage. Les prix cibles sont fixés par arrêté du ministre chargé de l’énergie ».

Un arrêté publié le 10 mai 2023 vient ainsi préciser les prix cibles mentionnés par l’article L. 523-3 du Code de l’énergie.

Son article 1er précise ainsi : « pour l’application du sixième alinéa de l’article L. 523-3 du Code de l’énergie, la moyenne annuelle des prix constatés sur le marché mentionnés au premier alinéa de l’article L. 523-2 du Code de l’énergie, est calculée, par concession, en pondérant les prix constatés sur le marché par la production électrique de la concession. Le prix cible mentionné au sixième alinéa de l’article L. 523-3 du Code de l’énergie est égal à 100 €/MWh pour les installations hydroélectriques gravitaires et est égal à la somme entre 30 €/MWh et les achats liés aux pompages valorisés aux prix constatés sur le marché divisés par la production électrique de la concession pour les stations de transfert d’énergie par pompage ».

Et, l’article 2 de l’arrêté vient préciser les conséquences en cas de dépassement du prix cible par la moyenne annuelle des prix constatés sur le marché. Il dispose : « pour les installations hydroélectriques gravitaires, lorsque la moyenne annuelle des prix constatés sur le marché calculée conformément au premier alinéa de l’article 1er excède le prix cible mentionné au second alinéa de l’article 1er, les parts mentionnées aux troisième à cinquième alinéas de l’article L. 523-3 sont calculées sur la base d’une valorisation de la production d’électricité égale au produit entre le prix cible et la production électrique de la concession. Pour les stations de transfert d’énergie par pompage, lorsque la moyenne annuelle des prix constatés sur le marché calculée conformément au premier alinéa de l’article 1er excède le prix cible mentionné au second alinéa de l’article 1er, les parts mentionnées aux troisième à cinquième alinéas de l’article L. 523-3 sont calculées sur la base d’une valorisation de la production d’électricité égale, avant déduction des achats liés aux pompages, au produit entre le prix cible mentionné au second alinéa de l’article 1er et la production électrique de la concession ».

Il a ainsi été souhaité éviter que les collectivités profitent d’un effet d’aubaine dans le calcul de leurs redevances, en pleine crise sanitaire. Elles ont pourtant été pour nombre d’entre elles longtemps privées de ces redevances. Des contentieux indemnitaires sont encore pendants à ce sujet.

 

[1] L. 523-1 du Code de l’énergie : « Pour toute nouvelle concession hydroélectrique, y compris lors d’un renouvellement, il est institué, à la charge du concessionnaire, au profit de l’Etat, une redevance proportionnelle aux recettes de la concession. Les recettes résultant de la vente d’électricité sont établies par la valorisation de la production aux prix constatés sur le marché, diminuée, le cas échéant, des achats d’électricité liés aux pompages. Les autres recettes sont déterminées selon des modalités définies par arrêté du ministre chargé de l’énergie […]. »