Lorsque la compétence voirie est transférée à l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, son président peut sous certaines conditions disposer d’un pouvoir de police spéciale en matière de stationnement de sorte qu’il convient d’identifier selon les hypothèses :
- Qui détermine les zones de stationnement ?
- Qui détermine la redevance ?
- Qui fixe les amendes de circulation ?
1. Pour répondre à la première question (qui détermine les zones de stationnement), on rappellera que l’autorité investie du pouvoir de police du stationnement peut déterminer les lieux, les jours et les heures où le stationnement est réglementé. À cet effet, il peut être décidé de réglementer des zones à stationnement limité dans le temps (et donc gratuite pendant le temp imparti), communément appelées « zones bleues », ou de mettre en place des zones de stationnement payant (Rép. min. QE n° 0112S, publiée dans le JO Sénat du 6 décembre 2017, p. 7185).
A ce stade, on indiquera que :
« La décision d’instituer un stationnement payant est un choix de la collectivité, qui peut toujours s’en tenir à la création d’une zone bleue » (Magazine Maires de France, cahier n° 334, « La réforme du stationnement payant », avril 2016).
Ces missions se rattachent, ainsi, au pouvoir de police de circulation et de stationnement du maire.
Pour rappel, les articles L. 2213-1 à L. 2213-6-1 du Code général des collectivités territoriales (ci-après, CGCT) déterminent les pouvoirs de police du maire en matière de circulation et de stationnement.
Il résulte notamment des termes de l’article L. 2213-2 du Code précité que :
« Le maire peut, par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l’environnement :
1° Interdire à certaines heures l’accès de certaines voies de l’agglomération ou de certaines portions de voie ou réserver cet accès, à certaines heures ou de manière permanente, à diverses catégories d’usagers ou de véhicules ;
2° Réglementer l’arrêt et le stationnement des véhicules ou de certaines catégories d’entre eux, ainsi que la desserte des immeubles riverains ;
3° Réserver sur la voie publique ou dans tout autre lieu de stationnement ouvert au public des emplacements de stationnement aménagés aux véhicules utilisés par les personnes titulaires de la carte “mobilité inclusion” portant la mention “stationnement pour personnes handicapées” mentionnée à l’article L. 241-3 du Code de l’action sociale et des familles, aux véhicules bénéficiant d’un label “auto-partage”, aux véhicules bénéficiant d’un signe distinctif de covoiturage, aux véhicules des usagers des transports publics de personnes ou aux véhicules à très faibles émissions au sens de l’article L. 318-1 du Code de la route ».
Toutefois, le maire peut accepter de transférer certaines de ses prérogatives en matière de police au président de l’EPCI à fiscalité propre dont il est membre et qui s’est vu transférer la compétence voirie.
Il résulte, en effet, des termes de l’article L. 5211-9-2 du CGCT, relatif aux pouvoirs de police pouvant être dévolues au président d’un EPCI à fiscalité propre, que :
« […] Sans préjudice de l’article L. 2212-2 et par dérogation aux articles L. 2213-1 à L. 2213-6-1, lorsqu’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est compétent en matière de voirie, les maires des communes membres transfèrent au président de cet établissement leurs prérogatives en matière de police de la circulation et du stationnement.
Sans préjudice de l’article L. 2212-2 et par dérogation à l’article L. 2213-33, lorsqu’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est compétent en matière de voirie, les maires des communes membres transfèrent au président de cet établissement les prérogatives qu’ils détiennent en matière de délivrance des autorisations de stationnement sur la voie publique aux exploitants de taxi. L’autorisation de stationnement peut être limitée à une ou plusieurs communes membres ».
Dit autrement, le président d’un EPCI compétent en matière de voirie peut se voir transférer les prérogatives de police de la circulation et du stationnement des maires des communes membres de l’EPCI dont il est président.
Il s’agit en principe d’un transfert de plein droit. Toutefois, l’article L. 5211-9-2 du CGCT prévoit que les maires peuvent s’opposer à ce transfert sous certaines conditions.
Pour être complet, on ajoutera que ces dispositions sont applicables aux établissements publics territoriaux (VI de l’article L. 5219-5 du CGCT).
Dans les faits, cela implique que dans l’hypothèse où les pouvoirs de police spéciale en matière de voirie n’ont pas été transférés au président de l’EPCI compétent, alors c’est au maire qu’il revient de réglementer le stationnement sur le territoire de sa commune et donc notamment d’instaurer des zones à stationnement limité dans le temps, ou « zones bleues », ou de mettre en place des zones de stationnement payant.
De sorte que le transfert de la compétence voirie à un EPCI ne permet pas ipso facto à ce dernier de réglementer le stationnement sur le territoire de ses communes membres en l’absence du transfert des pouvoirs de police spéciale en la matière par les maires.
2. S’agissant de l’identification de l ’autorité compétente pour déterminer la redevance de stationnement, on précisera d’abord que la redevance de stationnement ne s’applique que sur les zones de stationnement payant.
Cette redevance est composée de deux volets : la redevance de paiement immédiat ainsi que la redevance de post-stationnement, dénommée « forfait de post-stationnement » (FPS), qui remplace l’ancienne amende pénale dont le tarif unique était auparavant fixé par l’Etat.
Elle est réglementée par les dispositions de l’article L. 2333-87 du CGCT.
En vertu de ces dispositions, le tarif de la redevance de stationnement peut être institué par délibération du conseil municipal ou de l’organe délibérant de l’EPCI ou du syndicat mixte compétent pour l’organisation de la mobilité lorsqu’il y est autorisé par ses statuts ou par une délibération prise dans les conditions de majorité prévues au II de l’article L. 5211-5 du CGCT.
Dit autrement, le législateur distingue « le pouvoir de police administrative de la circulation et du stationnement dont l’exercice conduit à déterminer les voies et emplacements de stationnement payant, de la compétence pour élaborer et adopter le barème tarifaire » (JurisClasseur Collectivités territoriales, Fasc. 542 : Redevance de stationnement payant sur voirie : Instauration, contrôle, recouvrement, contentieux, précité).
En Ile-de-France, le législateur a créé un régime juridique spécifique aux termes duquel les EPCI à fiscalité propre et les EPT autorisés par leurs statuts ou par une délibération prise dans les conditions de majorité prévues au II de l’article L. 5211-5 peuvent instituer la redevance après avoir reçu l’accord de l’établissement public, Ile-de-France Mobilités (2ème alinéa du I de l’article L. 2333-87 du CGCT).
Dans les faits, un EPCI à fiscalité propre, compétent pour l’organisation de la mobilité, peut se voir transférer la prérogative relative à la fixation des tarifs de stationnement sur son territoire.
On ajoutera à toutes fins utiles que le produit de la redevance de stationnement est perçu par la collectivité qui a instauré la redevance de stationnement.
Cependant, contrairement au volet de la redevance de paiement immédiat, dont le produit abonde le budget général de la collectivité compétente qui l’instaure, le produit du FPS est affecté pour la réalisation des opérations destinées à « améliorer les transports en commun ou respectueux de l’environnement et la circulation », déduction faite des coûts de mise en œuvre des FPS » (article l’article L. 2333-87 du CGCT).
Dans ces conditions, si la personne publique qui perçoit la FPS est différente de celle qui réalise les « opérations destinées à améliorer les transports en commun ou respectueux de l’environnement et la circulation » alors un reversement de la première à la deuxième doit être opérée (article R. 2333-120-18 du CGCT).
3. Enfin, on s’intéressera à l’autorité compétente pour fixer les amendes de la circulation.
Dans les « zones bleues », le stationnement est, on l’a vu gratuit, il n’est donc pas conditionné au paiement d’une redevance de stationnement, mais il est limité dans le temps et les infractions commises dans ces zones sont ainsi sanctionnées par des amendes de la circulation.
Il ressort d’une note d’information du 8 août 2024 établie par la Direction générale des collectivités locales (DGCL) relative au recensement des amendes liées à la circulation routière par les services de police au cours de l’année 2023 et à destination des préfets[1] que :
« […]
Néanmoins dans les communes qui n’ont pas mis en place le forfait de post-stationnement, les amendes dressées en zone bleue relèvent désormais d’une infraction de 2ème classe et doivent être recensées ».
Il s’agit donc d’appliquer les dispositions de l’article R. 417-6 du Code de la route aux termes desquelles :
« Tout arrêt ou stationnement gratuit contraire à une disposition réglementaire autre que celles prévues au présent chapitre est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe ».
En définitive, les amendes perçues en cas d’infraction constatée en « zone bleue » se distinguent du produit des redevances que peuvent percevoir les collectivités ayant institué le stationnement payant sur leur territoire.
Et la répartition du produit issue des amendes de circulation n’obéit pas au même régime juridique que celui du produit des redevances. En effet, celle-ci est fixée par les dispositions prévues aux articles L. 2334-24 et suivants et R. 2334-10 et suivants du CGCT.
L’article L. 2334-24 du CGCT dispose, ainsi, que :
« Le produit des amendes de police relatives à la circulation routière destiné aux collectivités territoriales visé au b du 2° du B du I de l’article 49 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est réparti par le comité des finances locales en vue de financer des opérations destinées à améliorer les transports en commun et la circulation. ».
L’article R. 2334-10 du CGCT dispose, quant à lui, que :
« I. – Le produit des amendes de police relatives à la circulation routière est partagé, proportionnellement au nombre des contraventions à la police de la circulation dressées sur leur territoire respectif au cours de l’année précédant celle au titre de laquelle est faite la répartition, entre :
1° Les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre comptant au moins 10 000 habitants, auxquels les communes ont transféré la totalité de leurs compétences en matière de voies communales, de transports en commun et de parcs de stationnement et les communes de 10 000 habitants et plus ne faisant pas partie de ces groupements ;
2° Les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de moins de 10 000 habitants exerçant la totalité des compétences précitées et les communes de moins de 10 000 habitants ne faisant pas partie de ces groupements
[…] ».
De nombreuses précisions sont apportées par les services de l’Etat dans la note d’information de la DGCL du 8 août 2024 précitée.
A grand trait, les EPCI de plus ou de moins de 10 000 habitants peuvent être bénéficiaires du produit des amendes de circulation à condition d’être compétents en matière de voies communales (la compétence en matière de voies communales est considérée comme étant totalement transférée au groupement lorsque celui-ci assure la compétence sur l’ensemble de la voirie anciennement communale), de transports en commun (soit la compétence « organisation des transports urbains ou de la mobilité au sens du chapitre II du titre II de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs, sous réserve des dispositions de l’article 46 de cette loi ») et de parcs de stationnement. Dans le cas contraire, les communes de plus ou de moins de 10 000 habitants en seront bénéficiaires.
Toutefois, les communes et les EPCI peuvent conventionner pour se répartir entre eux le produit des amendes (article R. 2334-11 du CGCT).
Pour être complet, on précisera, que pour les communes et les groupements de la région d’Ile-de-France, un prélèvement est réalisé sur ce produit à destination d’Ile-de-France Mobilités et de la Région Ile-de-France (article L. 2334-25-1 du CGCT).
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[1] https://www.collectivites-locales.gouv.fr/files/Accueil/Notes%20de%20la%20DGCL/2024/24-010801-D%20Note%20du%2008%20ao%C3%BBt%202024.pdf