Energie
le 07/03/2024

Autoconsommation collective en gaz : avis de la Commission de Régulation de l’Energie sur les projets de textes réglementaires pris en application de la loi APER

Délibération de la CRE du 13 décembre 2023 portant avis sur le projet d’arrêté pris en application de l’article L. 448-1 du Code de l’énergie fixant le critère de proximité géographique de l’autoconsommation collective en gaz

Délibération de la CRE du 13 décembre 2023 portant avis sur le projet de décret pris en application des articles L. 448-1 à L. 448-5 du Code de l’énergie relatif à l’autoconsommation collective en gaz.

Le 13 décembre 2023, la Commission de Régulation de l’Energie (ci-après, CRE) a publié deux délibérations portant avis sur deux projets de décrets relatifs au régime de l’autoconsommation collective étendue en gaz. Pour rappel, le dispositif de l’autoconsommation collective étendue en gaz a été introduit par la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (ci-après, loi APER) aux articles L. 448-1 à L. 448-5 du Code de l’énergie.

Aux termes de l’article L. 448-1 de ce Code, les opérations d’autoconsommation collectives en gaz sont celles dont « la fourniture de gaz renouvelable est effectuée entre un ou plusieurs producteurs et un ou plusieurs consommateurs finals liés entre eux au sein d’une personne morale dont les points de consommation et d’injection sont situés sur le réseau public de distribution de gaz et respectent les critères, notamment de proximité géographique, fixés par arrêté du ministre chargé de l’énergie, après avis de la Commission de régulation de l’énergie » Ainsi, la loi APER a confié au pouvoir réglementaire le soin de fixer le critère de proximité géographique d’opérations d’autoconsommation collectives étendue. On soulignera également que l’article L. 448-5 du Code de l’énergie précise que les conditions d’application du chapitre dédié à l’autoconsommation collective étendue en gaz doivent être définies par décret. C’est sur ces points que la CRE a été saisie pour avis le 15 novembre 2023 d’un projet d’arrêté et d’un projet de décret.

S’agissant d’abord de l’arrêté fixant le critère de proximité géographique, le projet d’arrêté propose en son article 1er une distance maximale entre les deux participants les plus éloignés de deux kilomètres. Cette distance doit s’apprécier à partir du point de livraison pour les sites en consommation et à partir du point d’injection pour les sites de production. Il est également précisé que la production annuelle cumulée des installations de production doit être inférieure à 25 GWh/an. La Personne Morale Organisatrice (ci-après, PMO) peut néanmoins demander au ministre chargé de l’énergie une dérogation au critère de proximité géographique valable pour la durée de vie de l’opération. L’article 2 du projet d’arrêté prévoit en effet que dans ces conditions, la distance entre les participants à l’opération les plus éloignée puisse être portée :

  • A dix kilomètres lorsque l’ensemble des producteurs et consommateurs sont situés exclusivement sur une ou plusieurs communes rurales ou périurbaines ;
  • A vingt kilomètres lorsque l’ensemble des producteurs et consommateurs sont situés exclusivement sur une ou plusieurs communes rurales.

Etant précisé par l’arrêté que les communes dites rurales sont celles qualifiées par l’INSEE de « bourgs ruraux », « rural à habitat dispersé » et « rural à habitat très dispersé ».

Enfin, l’article 3 du projet d’arrêté prévoit une collecte d’informations (dont la nature est précisée en annexe du projet d’arrêté) de la part des porteurs de projets, des PMO des opérations d’autoconsommation collectives étendues en gaz, des responsables d’équilibre et des gestionnaires des réseaux de distribution de gaz naturel concernés et les transmettent à la ministre chargée de l’énergie afin d’assurer le suivi de cette expérimentation et de l’évaluer.

En définitif, le projet d’arrêté transpose au gaz le cadre juridique en vigueur concernant l’autoconsommation collective étendue en électricité. La CRE a donné un avis favorable à ce projet de texte en considérant d’abord que le plafond de production annuelle cumulée à 25 GWh/an était pertinent dès lors qu’il garantissait que les opérations d’autoconsommation collective étendues en gaz puissent conserver des proportions contenues. De plus, selon la CRE, le critère de proximité géographique de 2 km permet de conserver la dimension locale de l’opération. En outre, elle considère que la dérogation prévue au critère de proximité géographique est adaptée au développement privilégié de la production de biométhane dans les zones à forte activité agricole.

Le Régulateur précise néanmoins être favorable, à titre expérimental, à l’octroi automatique de ces dérogations pour les projets en zone rurale et périurbaine au regard de la charge administrative que peut représenter les demandes de dérogations pour les porteurs de projet.

Enfin, s’agissant des distances de 20 et 10 kilomètres fixées en cas d’obtention de la dérogation, la CRE considère que celles-ci doivent rester un maximum dès lors notamment que cette limitation lui semble adaptée à la réalité du réseau public de distribution de GRDF associé au développement du biométhane dont les longueurs moyennes n’excèdent pas 25 km. Selon la CRE, au-delà d’une distance de 20 km, la possibilité d’échange de gaz entre participants à l’opération n’est pas acquise.

S’agissant ensuite du projet de décret pris en application des articles L. 448-1 à L.448-5 du Code de l’énergie, certaines de ses dispositions portent modification de ce Code tant sur la question de la production du biogaz et de l’injection du gaz bas-carbone dans le réseau de gaz naturel que sur celle de l’autoconsommation collective étendue en gaz.

Concernant cette seconde thématique, on retiendra que l’article 6 du projet d’arrêté prévoit la création d’un chapitre VIII intitulé « l’autoconsommation collective étendue » au sein du titre IV du livre IV de la partie réglementaire du Code de l’énergie consacré à la commercialisation du gaz. Plus précisément, au sein de ce chapitre VIII, il est proposé d’introduire un article D. 448-2 fixant trois conditions à respecter par les producteurs de gaz renouvelables et les consommateurs participant à une opération d’autoconsommation collective en gaz :

  • raccordés au réseau public de distribution de gaz naturel exploité par un unique gestionnaire ;
  • déclarer l’opération d’autoconsommation collective étendue auprès du gestionnaire du réseau public de distribution de gaz naturel ;
  • choisir, pour chaque consommateur final, un fournisseur de gaz naturel au sens des articles L. 443-1 et suivants du Code de l’énergie.

Le projet de décret prévoit également l’introduction d’articles au sein de ce Code qui fixent notamment les limites de quantités pouvant être autoconsommées et les règles de calcul des quantités de production affectées à chaque consommateur final (création d’un article D. 448-4 du Code de l’énergie), les obligations de la PMO vis-à-vis du gestionnaire du réseau public de distribution, qui doit lui communiquer les coefficients de répartition de la production associée à chaque consommateur final ou, le cas échéant, leur méthode de calcul (création d’un article D. 448-5 du Code de l’énergie), l’obligation pour le fournisseur d’un consommateur participant à une telle opération de couvrir ses besoins en gaz naturel pour la part non autoconsommée (création d’un article D. 448-6 du Code de l’énergie), ou encore les informations minimales devant figurer dans le contrat qui lie le gestionnaire du réseau de distribution de gaz et la PMO (création d’un article D. 448-8 du Code de l’énergie). En outre, le projet de décret introduit des dispositions relatives aux opérations d’autoconsommation collectives en gaz à l’initiative d’organisme d’habitations à loyer modéré.

Après avoir souligné ici également que les modifications du Code de l’énergie prévues par le projet de texte sont similaires à celles en vigueur pour l’autoconsommation collective étendue de l’électricité et la pertinence d’une telle transposition, la CRE a rendu un avis favorable sur le projet de décret.