Droit pénal et de la presse
le 08/12/2022

Atteinte à la conservation des habitats naturels : la simple violation d’un arrêté préfectoral suffit à caractériser l’intention délictuelle

Cass. Crim., 18 octobre 2022, n° 21-86.965

En l’espèce, la construction d’un gazoduc avait nécessité le défrichement de zones boisées et la création d’une piste pour permettre notamment le passage des engins de travaux publics.

Ces opérations qui entrainaient notamment une destruction des habitats naturels et une dégradation des sites de reproduction ou d’aires de repos d’espèces animales protégées avaient été autorisées par arrêtés préfectoraux qui prévoyaient toutefois la mise en œuvre de mesures de remise en état – notamment de reboisement du site – dans un délai déterminé.

Lors des transports sur les lieux par les Inspecteurs de l’Office français de la Biodiversité (OFB), il apparaissait que la société en charge des travaux n’avait pas respecté les prescriptions préfectorales, notamment quant aux mesures compensatoires prévues.

La société en charge des travaux ainsi que son directeur de projet se voyaient alors délivrer une citation devant le Tribunal correctionnel du chef du délit d’atteintes à la conservation des habitats naturels prévu et réprimé par l’article L.415-3 du Code de l’environnement – en l’occurrence par la destruction de plus de 40 hectares de forêt.

Dans un arrêt en date du 10 novembre 2021, la Cour d’appel de Dijon – saisie par les prévenus à la suite de leur condamnation par le Tribunal correctionnel – rappelait que l’article L. 411-2 du Code de l’environnement prévoit la possibilité de dérogations à la protection stricte des habitats naturels afin notamment de permettre la construction de projets nécessaires à l’activité humaine qui présente un intérêt public majeur ; elle confirmait toutefois le jugement et déduisait la caractérisation de l’infraction du seul fait d’une violation des arrêtés préfectoraux délivrés.

Les prévenus formaient un pourvoi en cassation à l’encontre de l’arrêt soutenant notamment que l’intention délictueuse n’avait pas été caractérisée par la Cour alors que le délit poursuivi était une infraction de commission.

Saisie d’un pourvoi, la Chambre criminelle validait le raisonnement des juges du fond en affirmant que d’une part « le délit d’atteinte à la conservation des habitats naturels, en violation des prescriptions prévues par les règlements ou décisions individuelles […], peut être consommé par la simple abstention de satisfaire aux dites prescriptions » et, d’autre part, « une faute d’imprudence ou négligence suffit à caractériser l’élément moral du délit ».

Cet arrêt vient apporter une nouvelle illustration du contentieux pénal environnemental, intéressante notamment quant aux contours de l’élément moral des infractions dites non intentionnelles.