Droit du travail et de la sécurité sociale
le 23/05/2024
Karim DE MEDEIROSKarim DE MEDEIROS

Association à but non lucratif : le Conseil d’Etat confirme que la sauvegarde de la compétitivité peut être un motif économique de licenciement en cas de perte de marché

CE, 3 avril 2024 n° 471271

En application de l’article L. 1233-3 du Code du travail, une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité peut caractériser un motif économique de licenciement. Tel est le cas, par exemple, d’une réorganisation mise en œuvre pour prévenir des difficultés économiques liées à des évolutions technologiques et leurs conséquences sur l’emploi, sans pour autant qu’elle soit subordonnée à l’existence de difficultés économiques à la date du licenciement. (Cass. soc., 11 janvier 2006, n° 05-40.977).

En tous les cas, lorsque le licenciement économique est fondé sur la sauvegarde de la compétitivité, l’appréciation du motif du licenciement implique d’établir la réalité de la menace pour la compétitivité (en ce sens : CE 8-3-2006 n° 270857 ; CE 12-1-2011 n° 327191 ; CE 27-1-2016 n° 388211).

Au cas particulier, une association avait perdu un important marché de prestations de service. L’employeur a alors sollicité l’autorisation de l’inspection du travail pour licencier un salarié protégé, en fondant sa demande sur la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’association. L’autorisation de licenciement lui a été accordée par l’inspection du travail, mais le salarié a formé un recours hiérarchique, puis contentieux contre cette décision.

La Cour administrative d’appel a annulé cette décision, en expliquant qu’il n’existait pas de menace réelle sur la compétitivité de l’association. Contestant cet arrêt, l’employeur a, alors, formé un pourvoi devant le Conseil d’Etat. Le Conseil d’Etat a censuré l’arrêt de la Cour d’appel administrative.

Pour la Haute juridiction administrative, les juges du fond avaient inexactement qualifié les faits, alors que les éléments matériellement établis devant eux pouvaient laisser penser que la perte de marché était susceptible de constituer une menace réelle pesant sur la compétitivité de l’association. Il s’évince donc de l’arrêt du Conseil d’Etat qu’une association, même à but non lucratif, peut licencier un salarié pour motif économique motivé par la nécessité de sauvegarder la compétitivité. Il sera toutefois nécessaire de caractériser la réalité de la menace pour la compétitivité de l’employeur.