Dans un arrêt du 16 octobre 2025 (n° 24-10.606), la troisième chambre civile de la Cour de cassation, compétente en matière immobilière, réaffirme avec force l’exigence de concentration des prétentions en appel dans le contentieux de la copropriété.
Elle rappelle que l’objet de la contestation doit être arrêté dès les premières conclusions, à défaut de quoi la demande encourt l’irrecevabilité sur le fondement de l’article 910-4 du Code de procédure civile.
Ainsi, la demande d’annulation de résolutions spécifiques, bien que poursuivant la même finalité que l’annulation globale de l’assemblée générale, n’est recevable devant la Cour d’appel que si elle a été introduite dans les premières conclusions de la partie qui la forme.
Faits et procédure :
Une copropriétaire de divers lots au sein d’un immeuble soumis au statut de la copropriété, encadré par la Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, entend contester une assemblée générale des copropriétaires.
Elle a donc assigné le syndicat des copropriétaires devant le Tribunal judiciaire de Paris en annulation totale de l’assemblée générale.
Par jugement en date du 7 juin 2019, le tribunal a déclaré la copropriétaire irrecevable en sa demande.
La copropriétaire a interjeté appel du jugement.
Dans ses premières conclusions, l’appelante a demandé à la Cour d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions et de prononcer l’annulation totale de l’assemblée générale des copropriétaires.
Or, dans le cadre de conclusions ultérieures, l’appelante a modifié ses prétentions, en sollicitant l’annulation non plus de la totalité de l’assemblée mais seulement de certaines résolutions. La Cour d’appel a déclaré irrecevable les demandes de l’appelante.
La Cour de cassation a confirmé le raisonnement de la Cour d’appel et rejeté le pourvoi formé par la copropriétaire.
Motifs de la décision :
L’ancien article 910-4 du Code de procédure civile, depuis abrogé par le décret n° 2023-1391 du 29 décembre 2023, contenait l’obligation de concentration des prétentions.
Il disposait que :
« A peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures ».
Les parties devaient présenter dès les premières conclusions l’ensemble de leurs prétentions sur le fond, à peine d’irrecevabilité.
L’article 565 du Code de procédure civile précise que les prétentions soumises à la Cour d’appel ne sont pas nouvelles si elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si le fondement juridique est différent.
Mais les juges retiennent une conception assez stricte pour l’application de ces règles.
Dès lors, même si les deux demandes relèvent de la même matière litigieuse et poursuivent un résultat similaire, à savoir l’invalidation de décisions de copropriété, la Cour considère qu’il s’agit d’une prétention nouvelle, irrecevable au sens de l’ancien article 910-4 du Code de procédure civile, applicable à l’espèce.
Il relevé que l’article 910-4 du Code de procédure civile n’est applicable qu’aux appels formés antérieurement au 1er septembre 2024, date d’entrée en vigueur du décret du n° 2023-1391 du 29 décembre 2023.
L’exigence de concentration des prétentions se trouve désormais codifiée à l’article 915-2 du Code de procédure civile.
Portée de l’arrêt
En matière de contestation d’assemblée générale, l’arrêt impose une vigilance accrue :
- un copropriétaire doit définir sa stratégie procédurale dès les premières écritures ;
- et viser d’emblée les résolutions potentiellement irrégulières ou, à défaut, retenir la demande la plus large en sollicitant à titre principal l’annulation globale de l’assemblée générale et, à titre subsidiaire, l’annulation de certaines résolutions.