Energie
le 07/12/2023

Adoption de la directive n° 2023/2413 du 18 octobre 2023 dite « RED III » : synthèse des modifications apportées au droit européen de l’énergie

Directive (UE) 2023/2413 du Parlement européen et du Conseil du 18 octobre 2023 modifiant la directive (UE) 2018/2001, le règlement (UE) 2018/1999 et la directive 98/70/CE en ce qui concerne la promotion de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, et abrogeant la directive (UE) 2015/652 du Conseil

La directive (UE) 2023/2413 du Parlement européen et du Conseil en date du 18 octobre 2023, dite directive « Red III » a été adoptée par le Parlement européen.

S’inscrivant dans le cadre du plan RePower EU et de la trajectoire Ajustement à l’objectif 55 du pacte vert pour l’Europe énoncé dans la communication de la Commission du 11 décembre 2019, la directive commentée vient modifier en profondeur le droit européen de l’énergie.

La directive 2023/2413 ici commentée modifie trois textes :

  • Directive 2018/2001 du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables ;
  • Règlement 2018/1999 du 11 décembre 2018 sur la gouvernance de l’union de l’énergie et de l’action pour le climat ;
  • Directive 98/70/CE du 13 octobre 1998 concernant la qualité de l’essence et des carburants diesel.

L’essentiel des modifications concerne la directive 2018/2001 et n’est pas sans rappeler la récente loi n°2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergie renouvelable, dite loi « APER ».

En premier lieu, la directive 2023/2413 insère de nouvelles définitions dans la directive 2018/2001. Sont ainsi notamment consacrées les définitions suivantes :

  • « zone d’accélération des énergies renouvelables» : un lieu ou une zone spécifique, terrestre, maritime ou d’eaux intérieures, qu’un État membre a désigné comme étant particulièrement adapté pour accueillir des installations d’énergie renouvelable à partir de sources renouvelables, autres que des installations de combustion de biomasse ;
  • « technologie innovante en matière d’énergie renouvelable» : une technologie de production d’énergie renouvelable qui améliore au moins un aspect d’une technologie de pointe comparable en matière d’énergie renouvelable, ou qui rend exploitable une technologie en matière d’énergie renouvelable qui n’est pas entièrement commercialisée ou qui comporte un degré de risque clair ;
  • « accord d’achat d’énergie renouvelable» : un contrat par lequel une personne physique ou morale convient d’acheter directement à un producteur de l’énergie renouvelable, qui englobe, sans s’y limiter, les accords d’achat d’électricité renouvelable, les accords d’achat d’électricité renouvelable et les accords d’achat de chauffage et de refroidissement renouvelables ;
  • « combustibles renouvelables » : les biocarburants, les bioliquides, les combustibles ou carburants issus de la biomasse et les carburants renouvelables d’origine non biologique.

De nombreuses autres définitions sont intégrées, par référence à d’autres textes européens : point de recharge (règlement 2023/1804), marché de l’électricité (directive 2019/944) …

En deuxième lieu, la directive 2023/2413 vient rehausser les objectifs contraignants d’augmentation de la part d’énergie renouvelable dans le mix énergétique européen. Ainsi, l’article 3 de la directive 2018/2001 est modifié de sorte que la part d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie dans l’Union atteigne nécessairement 42,5 % et potentiellement 45 % d’ici 2030 (l’objectif était jusqu’à lors fixé à 32 %).

En outre, la directive 2023/2413 modifie le règlement 2018/1999 du 11 décembre 2018 sur la gouvernance de l’union de l’énergie et de l’action pour le climat en précisant les objectifs de la feuille de route de cet objectif d’augmentation de la part des énergies renouvelables. Aux termes de l’article 2 de la directive commentée :

« sur la base d’une trajectoire indicative de l’Union qui part de 20 % en 2020, atteint des points de référence d’au moins 18 % en 2022, 43 % en 2025 et 65 % en 2027 de l’augmentation totale de la part d’énergie provenant de sources renouvelables entre l’objectif spécifique de l’Union en matière d’énergies renouvelables pour 2020 et l’objectif spécifique de l’Union en matière d’énergies renouvelables pour 2030, et atteint l’objectif spécifique contraignant de l’Union pour les énergies renouvelables pour 2030 fixé à l’article 3, paragraphe 1, de la directive (UE) 2018/2001 ».

En troisième lieu, la directive 2018/2001 est complétée de deux nouveaux articles relatifs aux zones d’accélération des énergies renouvelables.

D’une part, l’article 15 ter impose aux Etats membres de réaliser une « cartographie coordonnée en vue du déploiement de l’énergie renouvelable sur leur territoire, afin de recenser le potentiel national et les zones terrestre, souterraine, maritime ou en eaux intérieures disponibles qui sont nécessaires pour l’établissement d’installations d’énergie renouvelable et leurs infrastructures connexes » pour atteindre l’objectif de 42,5 % d’énergie produite à partir de source renouvelable dans la consommation finale brute d’énergie de l’Union.

D’autre part, l’article 15 quater impose aux Etats membres de désigner à partir de cette cartographie des zones d’accélération des énergies renouvelables pour un ou plusieurs types de sources d’énergie. Ces zones devront être identifiées au plus tard le 21 février 2026.

En outre, les Etat membres sont encouragés à adopter des plans identifiant les zones d’infrastructures spécifiques destinées au développement de projets de réseau ou de stockage nécessaires à l’intégration de l’énergie renouvelable dans le système électrique (nouvel article 15 sexies de la directive 2018/2001).

En quatrième lieu, la directive 2023/2413 s’efforce de simplifier les procédures d’obtention de permis nécessaires à l’implantation des installations de production d’énergie renouvelable, notamment dans les zones d’accélération.

Ainsi, aux termes de l’article 16 modifié de la directive 2018/2001, les Etats membres devront :

  • Respecter des délais réduits de traitement des demandes ;
  • Mettre en place des points de contact facilitant les démarches des demandeurs des permis ;
  • Rendre facilement accessibles les informations liées à la délivrance des permis ;
  • Veiller à ce que les recours contre les permis s’exercent le plus rapidement possible.

La directive 2023/2413 insère un nouvel article 16 bis dans la directive 2018/2001 concernant spécifiquement les permis délivrés au sein des zones d’accélération des énergies renouvelables. Ces permis devront notamment être délivrés dans un délai maximum de douze mois et pourront être exemptés, sous conditions, d’évaluation spécifique des incidences sur l’environnement et d’évaluation de leurs incidences sur les sites Natura 2000 (point 3 de l’article 16 bis précité).

En cinquième lieu, la directive consacre la présomption d’intérêt public majeur des projets de production d’énergie renouvelable récemment consacrée en droit interne (voir notre brève dans la présente Lettre d’actualité sur ce sujet). En effet, la nouvel article 16 septies dispose : « les États membres veillent à ce que, dans le cadre de la procédure d’octroi de permis, la planification, la construction et l’exploitation d’installations d’énergie renouvelable, le raccordement de ces installations au réseau, le réseau connexe proprement dit et les actifs de stockage soient présumés relever de l’intérêt public majeur et de l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques lors de la mise en balance des intérêts juridiques dans les cas individuels ».

En sixième lieu, la directive 2023/2413 intègre dans la directive 2018/2001 de nouvelles dispositions relatives à la décarbonation du secteur du transport, modifie en conséquence la directive 98/70/CE du 13 octobre 1998 concernant la qualité de l’essence et des carburants diesel et abroge la directive 2015/652 du Conseil du 20 avril 2015.

Il convient de souligner pour conclure que les nouvelles dispositions des directives modifiées devront être transposées par les Etats membres afin d’être opposables. La date limite de transposition est fixée au 21 mai 2025. Reste que de nombreuses dispositions trouvent déjà un écho en droit interne du fait de l’adoption de la loi APER.