Energie
le 07/09/2023

Actualité estivale autour des TRVE

CE, 26 juillet 2023, Société EkWateur, n° 462612

Les Tarifs Réglementés de Vente d’Electricité (ci-après, TRVE) ont donné lieu à différents actes et décisions au cours de l’été.

D’abord, quatre arrêtés du 28 juillet 2023 ont fixé les TRVE applicables à compter du 1er août 2023 respectivement aux consommateurs résidentiels et non résidentiels en France Métropolitaine, aux tarifs jaunes et verts applicables aux consommateurs en France Métropolitaine, et dans les zones non interconnectées du réseau métropolitain continental.

Dans les quatre arrêtés, il est précisé que les Ministres ne suivent pas les propositions formulées par la Commission de Régulation de l’Energie (ci-après, CRE) lesquelles auraient pour conséquence que les nouveaux tarifs excèdent de plus de 15 % ceux applicables au 31 décembre 2022. La hausse résultant des quatre arrêtés du 27 juillet 2023 se situe autour de 10 %.

Comme la CRE le souligne sur son site internet, au 1er août 2023, en application des dispositifs de gel des tarifs décidés par le Gouvernement dans le contexte de hausse massive des prix de l’énergie les TRVE théoriques que la CRE continue de calculer conformément à ses obligations légales et réglementaires se situent désormais 74,5 % TTC au-dessus des tarifs gelés actuellement en vigueur au terme des arrêtés susmentionnés.

Ensuite, en conséquence des quatre arrêtés précités, un arrêté du 28 juillet 2023 fixe le tarif de cession applicable aux Entreprises Locales de Distribution (ci-après, ELD) à compter du 1er août 2023. Les tarifs de cession permettent en effet aux ELD de s’approvisionner en électricité pour la fourniture de leurs clients aux TRVE et, pour celles desservant moins de 100 000 clients, pour la fourniture de leurs pertes réseau. Ces tarifs sont donc intimement liés au niveau des TRVE.

Enfin, par une décision en date du 26 juillet 2023 (CE, 26 juillet 2023, Sté EkWateur, n° 462612), le Conseil d’Etat a censuré les TRVE applicables aux consommateurs non résidentiels en France métropolitaine continentale en vertu de l’arrêté du 28 janvier 2022 des Ministres de l’Economie et de l’Energie dont la société EkWateur demandait l’annulation, mais neutralisé l’effet rétroactif qui s’attache normalement aux annulations contentieuses.

Le Conseil d’Etat fait droit à cette demande, d’une part, en retenant l’incompétence du pouvoir réglementaire, le législateur n’ayant habilité les Ministres chargés de l’économie et de l’énergie à fixer des tarifs de vente de l’électricité inférieurs à ceux proposés par la CRE que pour ce qui concerne les tarifs réglementés dits « bleus » applicables aux consommateurs résidentiels, et non pas pour les consommateurs non résidentiels et d’autre part ; en considérant qu’en  fixant lesdits tarifs à un niveau significativement inférieur à celui résultant de la proposition tarifaire de la CRE, « ne permettant pas d’assurer une concurrence tarifaire effective sur le marché de la fourniture d’électricité, l’arrêté en litige ne respecte pas, […] les conditions prévues à l’article 5 de la directive du 5 juin 2019 et mentionnées au point 9 auxquelles est subordonnée toute intervention publique dans la fixation des prix pour la fourniture d’électricité ».

Pour autant, en dépit de cette censure, l’annulation prononcée n’est pas assortie de l’effet rétroactif compte tenu des répercutions financières qu’une telle annulation aurait emporté sur les clients non résidentiels pour la période comprise entre l’entrée en vigueur de l’arrêté et la décision du Conseil d’Etat et compte tenu de l’incertitude s’attachant aux conséquences d’une telle annulation concernant les restitutions financières devant intervenir entre EDF et les fournisseurs alternatifs.

Faisant en effet application de son pouvoir de modulation des effets de ses annulations contentieuses, le Conseil d’Etat estime « qu’eu égard, d’une part, à l’importante charge financière qu’engendrerait l’annulation rétroactive prononcée par la présente décision, sur les consommateurs non résidentiels de France métropolitaine soumis aux tarifs réglementés ou qui étaient titulaires d’un contrat de fourniture dont le prix était déterminé par référence à ces mêmes tarifs, et d’autre part, aux incertitudes sur les conséquences en chaîne que provoquerait cette annulation, notamment au regard des éventuelles restitutions financières dues par  » Electricité de France  » et les fournisseurs alternatifs pour l’année 2023  qu’il y a lieu de prévoir, à titre exceptionnel, que les effets produits par l’arrêté attaqué sont, sous réserve des actions contentieuses déjà engagées à la date de la présente décision, regardés comme définitifs ».

Les effets de cette annulation sont donc neutralisés.