Environnement, eau et déchet
le 02/07/2025

Proposition de loi visant à renforcer et sécuriser le pouvoir préfectoral de dérogation afin d’adapter les normes aux territoires

Sénat, Renforcer et sécuriser le pouvoir préfectoral de dérogation

Aujourd’hui consacré par le décret n° 2020-412 du 8 avril 2020, le pouvoir de dérogation des préfets de région et de département est accordé dans des matières limitativement définies : subventions, concours financiers et dispositifs de soutien en faveur des acteurs économiques, des associations et des collectivités territoriales ; aménagement du territoire et politique de la ville ; environnement, agriculture et forêts ; construction, logement et urbanisme ; emploi et activité économique ; protection et mise en valeur du patrimoine culturel ; activités sportives, socio-éducatives et associatives.

Ce pouvoir porte sur les normes arrêtées par l’administration de l’Etat et doit répondre aux conditions suivantes :

  • être justifié par un motif d’intérêt général et l’existence de circonstances locales ;
  • avoir pour effet d’alléger les démarches administratives, de réduire les délais de procédure ou de favoriser l’accès aux aides publiques ;
  • être compatible avec les engagements européens et internationaux de la France ;
  • ne pas porter atteinte aux intérêts de la défense ou à la sécurité des personnes et des biens, ni une atteinte disproportionnée aux objectifs poursuivis par les dispositions auxquelles il est dérogé.

Or selon le Rapport d’information n° 346 (2024-2025) intitulé Le pouvoir préfectoral de dérogation : des solutions concrètes pour adapter les normes aux territoires, le dispositif actuel ne serait pas suffisamment mis en œuvre.

Face à ce constat, une proposition de loi, déposée au Sénat le 27 mars 2025, est en discussion devant les assemblées parlementaires.

Dans la version du texte adopté par le Sénat et transmis à l’Assemblée nationale le 11 juin dernier, le pouvoir de dérogation est renforcé et précisé.

Le texte ne précise, d’abord, plus de manière limitative les domaines dans lesquels le pouvoir de dérogation peut s’exercer. L’article 1er fixe en revanche les conditions dans lesquelles la mise en œuvre de ce pouvoir est possible :

  • le préfet peut déroger à des normes arrêtées par l’administration de l’État pour des motifs d’intérêt général et pour tenir compte des circonstances locales,
  • il peut porter sur des décisions relevant soit de sa compétence, soit de celle des services et des établissements publics de l’État ayant un champ d’action territorial ;
  • la dérogation doit avoir pour objet d’alléger les démarches administratives, d’adapter les délais de procédure ou de favoriser l’accès aux aides publiques.

Il peut également, dans les mêmes conditions, prévoir des « adaptations mineures » à ces mêmes règles en vue de faciliter la réalisation de projets locaux ou le développement des territoires.

Ces dérogations et adaptations doivent répondre aux conditions suivantes :

  • elles sont compatibles avec les engagements européens et internationaux de la France ;
  • elles ne portent pas atteinte aux intérêts de la défense ou à la sécurité des personnes et des biens, ni une atteinte disproportionnée aux objectifs poursuivis par les dispositions auxquelles il est dérogé.

Ensuite, la proposition de loi crée de nouveaux régimes spécifiques de dérogation, qui s’ajoutent au régime général, dans des domaines bien précis (financement de la maîtrise d’ouvrage des opérations d’investissement, sport, éducation…).

Parmi les hypothèses citées, on notera ici plus particulièrement la possibilité pour le préfet de département ou de région de déroger aux obligations résultant des articles L. 214-17 et L. 214-18 du Code de l’environnement, régissant l’implantation et la gestion des ouvrages en vue de garantir la continuité écologique des cours d’eau (notamment les moulins). La dérogation à ces obligations pourrait être accordée lorsque :

  • le respect des obligations en cause est de nature à remettre en cause l’usage actuel ou potentiel de l’ouvrage ou à fragiliser l’équilibre économique de son exploitation ;
  • la dérogation ne porte pas une atteinte disproportionnée aux objectifs poursuivis par les dispositions auxquelles il est dérogé ;
  • la dérogation se fonde sur l’existence de circonstances locales ;
  • la dérogation est compatible avec les engagements européens et internationaux de la France.

L’exposé des motifs de la proposition de loi justifie cette mesure comme suit :

« En effet, à titre d’exemple, certains moulins à eau se voient appliquer par la préfecture des prescriptions très lourdes, qui sont soit impossibles à réaliser, soit conduiraient à des frais disproportionnés, à la charge de l’exploitant du moulin. L’article 3 permet au préfet, en pareil cas, de déroger aux règles lorsque l’impact environnemental est dérisoire et que l’application stricte des règles menace l’équilibre économique de l’ouvrage ».