Par deux lois – une loi ordinaire et une loi organique – du 21 mai 2025[1], le législateur a procédé à l’harmonisation entre communes du mode de scrutin aux élections municipales.
Pour rappel, jusque-là, le Code électoral distinguait les communes de moins de 1.000 habitants et celles de 1.000 habitants et plus :
Communes de moins de 1.000 habitants | Communes de 1 000 habitants et plus |
Articles L. 252 à L. 259 du Code électoral | Articles L. 260 à L. 270 du Code électoral |
Scrutin majoritaire à deux tours
Possibilité de candidature isolée ou groupée Possibilité de panachage |
Scrutin de liste à deux tours avec prime majoritaire
Chaque liste doit comprendre au moins autant de candidats que de sièges à pourvoir, et au plus deux candidats supplémentaires Pas d’adjonction, ni de suppression de nom et pas de modification de l’ordre de présentation Chaque liste est constituée alternativement d’un candidat de chaque sexe |
A compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux, soit lors des élections municipales de mars 2026[2], les communes de moins de 1.000 habitants éliront leur conseil municipal selon les mêmes modalités que les communes de 1.000 habitants et plus, soit au scrutin de liste à deux tours avec prime majoritaire, chaque liste devant être paritaire et le panachage étant interdit.
Ce faisant, l’objectif poursuivi est triple puisqu’il s’agit tout d’abord de remédier à l’absence de parité constatée au sein des conseils municipaux concernés ainsi qu’à la crise de l’engagement local, mais aussi d’éviter certains effets de seuil.
S’agissant de la crise de l’engagement local, il a été constaté que le panachage, qui permet d’adjoindre, de supprimer un nom, ou de modifier l’ordre de présentation des candidats, avait des effets pervers puisqu’il amenait à personnaliser l’élection plutôt que d’encourager un projet d’équipe et, de ce fait, à décourager de potentiels candidats, voire à délégitimer les élus qui auraient obtenu peu de voix.
S’agissant des effets de seuil, ils concernaient les communes dont la population oscille autour de 1.000 habitants et pouvaient, de ce fait, changer les modalités de vote d’un scrutin à l’autre.
Le législateur a néanmoins adapté le corpus de règles applicables aux communes de moins de 1.000 habitants afin de tenir compte de certaines spécificités et garantir le pluralisme.
Ainsi, sont prévus :
- La possibilité de présenter une liste incomplète (article L. 252 du Code électoral)
La liste sera réputée complète si elle compte jusqu’à deux candidats de moins que l’effectif prévu à l’article L. 2121-2 du CGCT.
Communes | Nombre de conseillers municipaux | Nombre minimal de candidats par liste |
Moins de 100 habitants | 7 | 5 |
De 100 à 499 habitants | 11 | 9 |
De 500 à 999 | 15 | 13 |
Si le nombre de sièges attribué à une liste est supérieur à son nombre de candidats, les sièges correspondants restent vacants (article L. 262 du Code électoral). Ils ne sont donc pas attribués à une autre liste adverse.
La possibilité pour les listes candidates, offerte au sein des communes de 1.000 habitants et plus par la loi n° 2018-51 du 31 janvier 2018 relative aux modalités de dépôt de candidature aux élections, de comprendre deux candidats supplémentaires a néanmoins également été étendue aux communes de moins de 1.000 habitats.
- Une dérogation au principe de complétude du conseil municipal (article L. 2121-2-1 du CGCT)
Cette dérogation est une conséquence de la possibilité de présenter une liste incomplète. En effet, si des sièges demeurent vacants du fait de l’insuffisance du nombre de candidats, il convient néanmoins de considérer le conseil municipal comme complet.
Ainsi, si elle existait déjà pour les communes de moins de 500 habitants, elle a été étendue aux autres communes de moins de 1.000 habitants. De sorte que le conseil municipal est réputé complet dès lors qu’il compte, à l’issue du renouvellement général du conseil municipal ou d’une élection complémentaire, au moins 5, 9 ou 13 membres, conformément au tableau ci-dessus.
- Le maintien d’élections complémentaires (article L. 258 du Code électoral)
Lorsque le conseil municipal d’une commune de moins de 1.000 habitants a perdu le tiers ou plus de ses membres, ou s’il compte moins de cinq membres, ou lorsqu’il est nécessaire de compléter le conseil municipal avant l’élection d’un nouveau maire en application des articles L. 2122-8 et L. 2122-14 du CGCT, il est procédé à des élections complémentaires et non au renouvellement du conseil municipal, comme c’est le cas pour les communes de 1.000 habitants et plus (article L. 270 du Code électoral).
L’élection complémentaire se fait selon les mêmes modalités que lors du renouvellement général (article L. 258-1 du Code électoral).
- Le maintien des modalités d’élection des conseillers communautaires (articles L. 273-11 et suivants du Code électoral et L. 5211-6 et suivants du CGCT)
Les conseillers communautaires demeureront désignés selon l’ordre du tableau et ne feront donc pas l’objet d’une élection concomitante à l’élection municipal. Le législateur a en effet estimé que le système de fléchage applicable aux communes de 1.000 habitants et plus serait trop contraignant ici.
Enfin, les modalités de désignation des adjoints ont également été harmonisées. L’article L. 2122-7-1 du CGCT est abrogé. Tous les adjoints seront donc élus au scrutin de liste, sans panachage ni vote préférentiel et chaque liste devant comprendre alternativement un candidat de chaque sexe, sur le fondement de l’article L. 2122-7-2 du CGCT.
En revanche, en cas de vacance dans les communes de moins de 1.000 habitants, le ou les adjoints seront désignés parmi les conseillers, sans tenir compte du sexe de ces derniers.
On relèvera que, s’il avait été envisagé d’assurer également la parité au sein de l’exécutif communautaire, cette éventualité a été supprimée au cours des travaux parlementaires.
Par une loi organique, le législateur a maintenu le champ de l’incompatibilité entre un mandat de député ou sénateur et plus d’un mandat local aux seules communes de 1.000 habitants et plus (article LO. 141 du Code électoral).
Le Conseil constitutionnel a, par deux décisions en date du 15 mai 2025, validé la conformité de ces deux lois – organique et ordinaire – à la Constitution (décisions n° 2025-882 DC et 2025-883 DC).
Il a, à cette occasion, notamment jugé que le législateur avait poursuivi un objectif d’intérêt général tendant à favoriser la cohésion d’équipe autour d’un projet politique et à remédier aux effets de seuils susmentionnés, et que l’équilibre entre pluralisme et droit d’éligibilité, d’une part, et égal accès des hommes et des femmes aux fonctions électives, d’autre part, avait été maintenu.
Il a également refusé d’identifier un principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR) tendant à imposer des règles électorales particulières pour les « petites » communes.
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[1] Loi n° 2025-444 du 21 mai 2025 visant à harmoniser le mode de scrutin aux élections municipales afin de garantir la vitalité démocratique, la cohésion municipale et la parité et loi organique n° 2025-443 du 21 mai 2025 visant à harmoniser le mode de scrutin aux élections municipales afin de garantir la vitalité démocratique, la cohésion municipale et la parité
[2] Cette réforme déroge ainsi à la règle fixée par l’article L. 567 A du Code électoral selon laquelle « il ne peut être procédé à une modification du régime électoral ou du périmètre des circonscriptions dans l’année qui précède le premier tour d’un scrutin ». Le législateur a néanmoins estimé que, en l’espèce, le temps serait suffisant pour permettre aux candidats de constituer leur liste, et pour informer les électeurs.