Par une délibération du 6 mars 2025, la Commission de régulation de l’Energie (ci-après, CRE) a rendu un avis sur deux projets d’arrêtés tarifaires relatifs à l’énergie photovoltaïque : d’une part, un projet d’arrêté modifiant l’arrêté tarifaire S21, projet d’arrêté qui a été publié dans sa version définitive au Journal officiel au 27 mars 2025 et, d’autre part, un projet d’arrêté fixant les conditions de soutien aux installations photovoltaïques au sol d’une puissance crête installée inférieure ou égale à un mégawatt.
Pour rappel, les producteurs d’électricité peuvent bénéficier d’un soutien public par la conclusion, avec la société EDF OA, d’un contrat d’obligation d’achat ou de complément de rémunération. Ces dispositifs permettent de soutenir les filières de production d’énergie renouvelable en développement. Ils n’ont pas vocation à s’inscrire dans la durée une fois les technologies utilisées devenues matures.
Le producteur peut bénéficier d’un contrat par deux moyens :
- La réponse à un appel d’offres organisé par la CRE ;
- Une demande à EDF OA lorsqu’il satisfait les conditions d’éligibilité prévues par arrêté. On parle alors dans ce cas de figure de la procédure du « guichet ouvert ».
Concernant la procédure du guichet ouvert, chaque filière technologique fait l’objet d’un arrêté tarifaire spécifique.
Le premier arrêté ici commenté a porté modification de l’arrêté du 6 octobre 2021 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations implantées sur bâtiment, hangar ou ombrière utilisant l’énergie solaire photovoltaïque, d’une puissance crête installée inférieure ou égale à 500 kilowatts telles que visées au 3° de l’article D. 314-15 du Code de l’énergie et situées en métropole continentale, dit arrêté tarifaire S21.
Le second arrêté, qui n’est encore qu’au stade de projet, prévoit l’ouverture d’un nouveau guichet ouvert pour les installations de production d’électricité photovoltaïque au sol d’une puissance inférieure à 1 MW.
Ces deux textes seront présentés successivement.
1. Sur l’arrêté modifiant l’arrêté tarifaire S21
Le projet de modification de l’arrêté tarifaire S21 avait fait l’objet d’un avis critique du Conseil supérieur de l’énergie (cf. avis du Conseil supérieur de l’énergie du 6 mars 2025). La délibération de la CRE ayant précédé la publication de l’arrêté est plus nuancée.
Par sa délibération du 6 mars 2025, la CRE a d’abord rappelé que la modification de l’arrêté tarifaire S21 était justifiée par le dépassement des objectifs de développement fixés par cet arrêté.
En effet, l’arrêté tarifaire S21 prévoyait un objectif de puissance totale (calculé par addition de l’ensemble des contrats de soutien conclu en application de l’arrêté tarifaire) de 4,8 GWc pour la période fin 2021 à fin 2024. Or, l’addition des puissances des installations ayant demandé à bénéficier de cet arrêté tarifaire sur cette même période a dépassé les 16 GWc.
Dès lors, le gouvernement a fait le choix de réduire le montant des tarifs d’achat fixés par l’arrêté tarifaire S21 pour les différents segments de puissance en publiant l’arrêté du 26 mars 2025, modifiant l’arrêté tarifaire S21. Aux termes de la délibération de la CRE précitée, les modifications apportées sont les suivantes :
- s’agissant du segment 100-500 kWc : une réduction du tarif d’achat de 105,2 €/MWh à 94,5 €/MWh pour les demandes de contrats déposées à partir du 28 mars 2025, associée à une révision de la dégressivité tarifaire (en particulier : un renforcement de la réactivité du mécanisme à l’avance/retard pris sur les objectifs de développement ainsi qu’une suppression du coefficient d’urgence). Une caution fixe de 10.000 € par projet est par ailleurs introduite afin de limiter le taux de chute de ces projets. Enfin, un critère d’éligibilité en lien avec la résilience des panneaux photovoltaïques est introduit à partir de 2026 ;
- s’agissant du segment 9-100 kWc : le mécanisme de dégressivité décrit précédemment est appliqué aussi bien au tarif de vente en totalité qu’au tarif de vente en surplus ;
- s’agissant du segment 0-9 kWc : le mode de valorisation « vente en totalité » et le tarif d’achat associé sont supprimés. Le tarif pour la vente en surplus (schéma d’autoconsommation) est abaissé à 40 €/MWh contre 126,9 €/MWh actuellement. Le niveau de la prime à l’investissement est rendu identique entre les différentes tranches du segment (0-3 et 3-9 kWc) et égal au niveau actuel de la prime pour le segment 0-3 kWc divisé par deux. Le niveau de prime pour ce segment ne fera plus l’objet de la dégressivité tarifaire.
La CRE résume les modifications apportées aux conditions tarifaires dans le tableau reproduit ci-dessous :
2. Sur le projet d’arrêté tarifaire S25
Le nouvel arrêté tarifaire S25 Sol concernera les installations utilisant l’énergie solaire photovoltaïque implantée au sol, et plus particulièrement sur terrains dégradés, ou bénéficiant de dispositifs de suivi de la course du soleil sur deux axes, d’une puissance crête installée inférieure à 1 MW.
Le gouvernement a saisi la CRE de deux projets de textes pour mettre en place des dispositifs de soutien pour ces filières.
En premier lieu, les technologies pouvant faire l’objet d’un soutien public sont visées par articles D. 314-15 (obligation d’achat) et D. 314-23 (complément de rémunération) du Code de l’énergie.
Dans leurs rédactions actuellement applicables, les deux articles précités ne citent plus la technologie solaire au sol comme éligible aux dispositifs de soutien. C’est pourquoi le gouvernement a soumis à la CRE, en plus du projet d’arrêté tarifaire S25, un projet de décret visant à modifier les articles précités afin de permettre le soutien par guichet ouvert des installations photovoltaïque au sol.
En second lieu, le projet d’arrêté fixant les conditions de soutien des installations photovoltaïque au sol situées en métropole continentale d’une puissance inférieure ou égale à un mégawatt, dit arrêté tarifaire S25 Sol, avait déjà été soumis à l’avis de la CRE qui s’était prononcée à deux reprises sur le sujet (voir notre brève, sur les délibérations du 16 octobre 2023 et 24 octobre 2024).
Le nouveau projet d’arrêté tarifaire S25 Sol prévoit, comme dans la précédente saisine de la CRE, un objectif de développement ainsi qu’une structure tarifaire unique pour l’ensemble des installations éligibles au guichet ouvert.
Deux formes de soutien seront possibles dès l’entrée en vigueur de l’arrêté :
- un contrat d’obligation d’achat pour les installations de puissance installée inférieure ou égale à 200 kWc ;
- un contrat de complément de rémunération pour les installations de puissance installée strictement supérieure à 200 kWc
Le projet d’arrêté tarifaire S25 Sol objet de la délibération du 6 mars 2025 intègre, par cohérence, les évolutions introduites dans l’arrêté modificatif de l’arrêté tarifaire S21, notamment s’agissant du mécanisme de dégressivité tarifaire, ainsi que certaines des recommandations formulées par la CRE dans sa délibération du 24 octobre 2024.
La CRE émet un avis globalement favorable sur le projet d’arrêté et recommande :
- D’intégrer un coefficient d’évolution tarifaire trimestriel supplémentaire, visant à tenir compte des effets d’apprentissage de la filière (0,25 % par trimestre) ;
- De modifier le dispositif de la prime à l’excellence environnementale (abaissement du plafond d’attributions, pilotage de la prime à un rythme trimestriel et non mensuel, insertion d’une clause de revoyure dans l’arrêté).
Il reste donc à attendre la publication de ce nouvel arrêté.