Le harcèlement au travail reste un sujet de préoccupation pour l’ensemble des secteurs professionnels et les employeurs ont une responsabilité fondamentale dans sa prévention et sa gestion. Un récent arrêt de la Cour d’appel de Paris en date du 26 novembre 2024, rappelle l’importance de cette vigilance en reconnaissant que même une ambiance de travail sexiste, sans visée directe, peut constituer un harcèlement discriminatoire
Dans cette affaire, une salariée licenciée pour insuffisance professionnelle a contesté son licenciement en se basant sur des faits de harcèlement discriminatoire qu’elle a subis dans son entreprise. Elle précise que ses collègues masculins tenaient des propos dégradants à son égard, la qualifiant avec son binôme féminin l’« équipe Tampax ».
Elle dénonce également l’existence d’un harcèlement d’ambiance, car sans être directement visée, elle avait été confrontée à « une ambiance de travail sexiste » du fait d’un groupe de collègue qui échangeaient, à la vue de tous, des photos de femmes à caractère sexuel dans l’open-space où elle travaillait.
Malgré plusieurs alertes faites à son employeur, à la médecine du travail, ces comportements n’ont pas été sérieusement pris en compte notamment se limitant à une enquête sommaire diligentée par l’employeur et sanctionnée par les Magistrats.
Le cœur de l’affaire réside dans une question cruciale : peut-on considérer un harcèlement sexiste comme discriminatoire s’il découle d’une ambiance générale sur le lieu de travail, sans que la personne soit directement ciblée ? En d’autres termes, est-ce que ce type de harcèlement peut être pris en compte même s’il n’atteint pas directement la salariée en question ?
La Cour d’appel s’est positionnée en faveur de la salariée, estimant que ce genre de harcèlement dit d’ambiance, bien qu’indirect, constitue bien un harcèlement discriminatoire. De fait, la Cour est claire lorsqu’elle précise que le « harcèlement discriminatoire résulte donc d’un agissement lié à un motif prohibé par la loi qui a pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité ou de dégrader l’environnement de travail ».
En outre, l’enquête interne menée par l’employeur a été considérée comme insuffisante. La Cour a critiqué le manque de rigueur de l’enquête interne, qui ne permettait pas d’écarter la possibilité de harcèlement discriminatoire.
Elle a souligné que l’employeur n’avait pas pris les mesures nécessaires après l’enquête, notamment en n’adressant aucun rappel à l’ordre aux salariés concernés. De plus, l’entreprise n’avait pas respecté ses obligations en matière de désignation de référent harcèlement et de saisine de la médecine du travail.
Il apparait ainsi que l’absence de désignation du référent « harcèlement » constitue un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
En résumé, la Cour d’appel renforce les obligations des employeurs à gérer les comportements sexistes de manière proactive : ils doivent désigner un référent harcèlement, mener des enquêtes sérieuses et prendre des mesures concrètes pour garantir un environnement de travail respectueux et sans discrimination.