Le Comité de règlement des différends et sanctions (CORDIS) de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a prononcé d’importantes sanctions pécuniaires à l’encontre des sociétés Danske et Equinor, fournisseurs de gaz, au titre de la méconnaissance de l’article 5 du règlement européen concernant l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie (REMIT).
L’article 5 du règlement REMIT prévoit qu’il est interdit de procéder ou d’essayer de procéder à des manipulations de marché sur les marchés de gros de l’énergie.
Les termes de manipulation de marché sont définis par le point 2) de l’article 2 du règlement REMIT. Aux termes de cet article, plusieurs pratiques peuvent être qualifiées de manipulation de marché parmi lesquelles « le fait d’effectuer toute transaction ou d’émettre tout ordre pour des produits énergétiques de gros qui (…) fixe ou tente de fixer, par l’action d’une ou de plusieurs personnes agissant de manière concertée, le prix d’un ou plusieurs produits énergétiques de gros à un niveau artificiel à moins que la personne ayant effectué la transaction ou émis l’ordre établisse que les raisons qui l’ont poussée à le faire sont légitimes et que cette transaction ou cet ordre est conforme aux pratiques de marché admises sur le marché de gros de l’énergie concerné ».
Au cas présent, en 2019 et 2020, le point d’interconnexion entre la France et l’Espagne a été considéré comme « congestionné » à la suite des demandes de réservation des sociétés Danske (82.286 kWh/h, soit la capacité maximale) et Equinor (1 kWh/h, soit la capacité minimale), aux premiers tours des enchères annuelles de capacités de transport de gaz.
La saturation des enchères qui en a résulté a conduit à la suppression des multiplicateurs tarifaires prévu par les délibérations de la CRE, diminuant le prix d’acquisition des capacités infra-annuelles, au bénéfice de la société Danske.
Dans sa décision en date du 20 janvier 2025 ici commenté, le CORDIS retient que les sociétés Danske et Equinor ont procédé à des manipulations de marché en 2019 et en 2020, à l’occasion des enchères susmentionnées.
Le CORDIS considère ainsi :
- que les réservations aux premiers tours des enchères litigieuses effectuées par la société Danske revêtaient un caractère non authentique envoyant un signal faux ou trompeur et, partant, sont constitutives de manquement à l’article 5 du règlement REMIT ;
- qu’il résulte d’un faisceau d’indices graves, précis et concordants que les réservations des sociétés Danske et Equinor aux enchères litigieuses doivent être regardées comme une action concertée visant à fixer le prix des capacités infra-annuelles à un niveau artificiel, au sens de l’article 2(2) a) ii) dudit règlement.
Le CORDIS a par conséquent sanctionné la société Danske à hauteur de 8 millions d’euros et la société Equinor à hauteur de 4 millions d’euros.
Il s’agit de la première décision du CORDIS relative à une pratique concertée au sens de l’article 2(2) a) ii) du règlement REMIT.