Mobilité et transports
le 07/11/2024

Redevances de gares : légalité de l’extension de la définition des usagers des services nationaux et internationaux de voyageurs aux usagers des services d’intérêt régional de voyageurs

CE, 10 octobre 2024, n° 49856

Par un arrêt en date du 10 octobre 2024, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur la légalité de l’arrêté du 15 juin 2023 modifiant la notion d’usagers des services nationaux et internationaux de voyageurs dans le cadre de la tarification des redevances de gares.

Pour rappel, conformément au décret n° 2012-70 du 20 janvier 2012 relatif aux installations de service du réseau ferroviaire, les entreprises ferroviaires sont titulaires d’un droit d’accès aux infrastructures ferroviaires et notamment aux gares de voyageurs.

En contrepartie, les exploitants ferroviaires versent une redevance aux gestionnaires d’infrastructures dont les modalités de calcul sont organisées par le décret n° 2003-194 du 7 mars 2003 relatif à l’utilisation du réseau ferroviaire.

Son article 13-1 classe les gares de voyageurs en trois catégories : les gares d’intérêt national, les gares d’intérêt régional et les gares d’intérêt local.

Le classement d’une gare dans l’une de ces catégories dépend de son seuil de fréquentation par des « usagers nationaux et internationaux de voyageurs », ces seuils étant précisés par un arrêté du ministre chargé des Transports en date du 9 juillet 2012.

Conformément à ces dispositions, les usagers des services nationaux et internationaux de voyageurs correspondent aux usagers des services ferroviaires autres que ceux mentionnés à l’article L. 2121-3 du Code des transports (c’est-à-dire les usagers des services ferroviaires organisés par l’Etat et les services librement organisés, à l’exception des services ferroviaires organisés par les régions et Ile-de-France Mobilités), qui effectuent un trajet dont l’origine et la destination sont situées dans deux régions distinctes.

Or, la crise sanitaire ayant fait chuter la fréquentation des gares entre 2020 et 2021, une telle définition, assise sur le niveau de fréquentation des gares, aurait eu pour effet d’entrainer le basculement de plusieurs « gares de voyageurs d’intérêt national » dans la catégorie de « gares de voyageurs d’intérêt régional » entrainant, pour cette dernière catégorie, une « hausse des tarifs »[1].

Pour cette raison, l’arrêté du 15 juin 2023 modifie l’arrêté du 9 juillet 2012 pour inclure les services ferroviaires organisés par les régions dans la définition des usagers des services nationaux et internationaux de voyageurs, « lorsque le point d’origine et la destination du trajet sont situés dans le ressort territorial de régions distinctes et distants de plus de cent kilomètres ».

Or, comme l’explique le rapporteur public dans ses conclusions, les autorités organisatrices financent indirectement ces redevances dans le cadre des contrats d’exploitation attribués aux exploitants ferroviaires[2].

Un recours en annulation a donc été exercé contre cet arrêté, ce qui a été l’occasion pour le Conseil d’Etat de se saisir de la question de sa légalité.

En substance, la nouvelle définition était notamment contestée au regard du fait que les articles L. 2121-1, L. 2121-3 et L. 1241-1 du Code des transports emploient les notions de « services de transport ferroviaire de voyageurs d’intérêt national » et de « services de transport ferroviaire d’intérêt régional » sans faire référence à « la distance séparant le point d’origine et la destination du trajet ».

Selon le Conseil d’Etat la définition d’usagers des services nationaux et internationaux de voyageurs n’est utilisée que dans le but de classer les gares de voyageurs pour la détermination des redevances dues au gestionnaire de gares de voyageurs en fonction de leur fréquentation. Partant la définition des usagers utilisée par l’arrêté du 15 juin 2023 n’a pas le même objet que la distinction opérée entre les services de transport ferroviaire de voyageurs d’intérêt national et régional résultant des dispositions du Code des transports.

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[1] Autorité de Régulation des Transports, Avis n° 2023-026 du 1er juin 2023 relatif au projet d’arrêté modifiant l’arrêté du 9 juillet 2012 portant application de l’article 13-1 du décret n° 2003-194 du 7 mars 2003 relatif à l’utilisation du réseau ferré national  

[2] Conclusions du rapporteur public Clément Malverti sous la décision du Conseil d’Etat en date du 10 octobre 2024 n° 490856