le 10/01/2018

Les « réseaux intérieurs des bâtiments » et autres nouveautés de la loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement

Loi du 30 décembre 2017 n° 2017-1839

Adoptée par l’Assemblée nationale dans sa version définitive le 19 décembre 2017, la loi n° 2017-1839 du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement a été publiée dans le dernier numéro de l’année 2017 du Journal officiel de la République française.

Le texte de loi définitivement adopté rend plus concrètes les perspectives du projet de loi initial en matière d’électricité et de gaz, que nous avions déjà évoquées dans ces colonnes (cf. notre Lettre d’actualités juridiques Energie et Environnement n° 32 d’octobre 2017 sur le sujet). En effet, outre la fin de l’octroi des permis de recherche de gisements d’hydrocarbures et du renouvellement des concessions d’exploitation d’hydrocarbures au-delà de 2040, plusieurs autres points intéressant les acteurs du marché de l’électricité et du gaz figurent également dans la loi.

Tout d’abord, l’article 16 du chapitre III de la loi commentée vient compléter le titre IV du livre III du Code de l’énergie par un chapitre V intitulé « Les réseaux intérieurs des bâtiments » et composé de huit articles (du L. 345-1 au L. 345-8 du même Code).

Aux termes des articles L. 345-1 et L. 345-2 du code de l’énergie, ces réseaux sont définis comme « […]les installations intérieures d’électricité à haute ou basse tension […] » des « […] immeubles à usage principal de bureaux qui appartiennent à un propriétaire unique […] ». Par exclusion, ne pourront être qualifiés de réseaux intérieurs des bâtiments « […] les installations électriques alimentant : 1° Un ou plusieurs logements ; 2° Plusieurs bâtiments non contigus ou parties distinctes non contiguës d’un même bâtiment ; 3° Un bâtiment appartenant à plusieurs propriétaires » (cf. second alinéa de l’article L. 345-2 du code de l’énergie).

Ces réseaux intérieurs des bâtiments constituent donc une nouvelle catégorie de réseaux électriques, à distinguer des réseaux publics de distribution d’électricité au sens de l’article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, ainsi que des réseaux fermés de distribution d’électricité au sens de l’article L. 344-1 du code de l’énergie.

Il s’agit en réalité d’autoriser les raccordements indirects de consommateurs à la suite de la décision contraire de la Cour d’appel de Paris du 12 janvier 2017, Société Valsophia SARL (n°2015/15157), et non de créer un « statut spécifique pour les « gestionnaires » de ces réseaux intérieurs » (cf. nos Lettre d’actualités juridiques Energie et Environnement n°26 de mars 2017 et n° 32 d’octobre 2017 sur ces sujets).

A signaler, outre que ces réseaux ne pourront faire obstacle à la liberté de choix des consommateurs de leur fournisseur d’électricité ou aux mécanismes d’effacements de consommation ou de soutien aux installations de production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable, que les compteurs électriques seront installés par le gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité et le comptage facturé par ce dernier dans les conditions d’une prestation annexe.

De même, le propriétaire de l’immeuble aura la possibilité (ou l’obligation en cas de division ou de vente partielle de l’immeuble) d’« abandonner » son réseau au profit du gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité après une remise en état à ses frais.

On précisera également que l’intervention d’un décret simple portant sur les modalités d’application des articles L. 345-1 et suivants du code l’énergie est attendue pour permettre leur entrée en vigueur définitive.

La loi commentée comporte, en outre, des autres dispositions relatives aux secteurs de l’électricité et du gaz.

En effet, toujours au chapitre III de la loi commentée, la compétence en matière de régulation tarifaire de la CRE est élargie aux prestations de gestion de la clientèle fournies par les fournisseurs aux gestionnaires de distribution d’énergie.

Quant à l’article 15 du même chapitre III de la loi commentée, il précise les conditions d’indemnisation des producteurs d’électricité par le gestionnaire du réseau pour les retards de raccordement des installations d’éoliennes en mer ou limitations partielles ou totales de la production de ces éoliennes imputables aux dysfonctionnements ou avaries des ouvrages de la partie marine du réseau.

Par ailleurs, le chapitre II de la loi commentée institue un nouveau cadre régulatoire pour l’accès des infrastructures souterraines de stockage de gaz naturel, dans le cadre de la consultation publique de la Commission de Régulation de l’Energie (ci-après la « CRE ») relative à la mise en œuvre de l’accès régulé des tiers aux stockages souterrains de gaz naturel en France, dont les ultimes réponses sont attendues pour le 23 janvier prochain.

Le Gouvernement est également habilité à prendre, par voie d’ordonnance, toutes mesures relevant du domaine de la loi « nécessaire(s) au renforcement de la sécurité d’approvisionnement en gaz » (et relatives au fonctionnement du système gazier et missions de chacun de ses acteurs, aux capacités interruptibles et au délestage de la consommation de gaz naturel).

A l’image de la longueur du débat parlementaire sur un texte relativement court (16 pages environ), et adopté par la voie d’une procédure accélérée, l’exécution de cette nouvelle loi ne manquera pas de susciter le débat, notamment quant à l’articulation des réseaux « intérieurs des bâtiments » avec ceux préexistants.