le 04/07/2019

Validation par le Conseil d’Etat du mécanisme de dérogation aux normes environnementales par les préfets

CE, 17 juin 2019, Les Amis de la Terre, n° 421871

Par son arrêt rendu le 17 juin 2019 (CE, n° 421871,  Les Amis de la Terre), le Conseil d’Etat rejette le recours en annulation dirigé contre le décret du 29 décembre 2017 relatif à l’expérimentation territoriale d’un droit de dérogation reconnu au préfet.

 Le décret du 29 décembre 2017 est pris en application de l’article 37-1 de la Constitution, qui autorise des dispositifs normatifs expérimentaux. En l’occurrence, ce décret permet à certains préfets, pendant une durée de deux ans, de déroger ponctuellement à des normes règlementaires, dans des matières et conditions qu’il fixe, pour adopter des normes individuelles. Entre autre, il ouvre les dérogations à la matière environnementale.

Le juge, pour répondre aux différents arguments soulevés par les requérants, indique que le décret attaqué ne méconnait pas l’article 37-1 de la Constitution, ni la loi. Il se fonde, à cette fin sur le fait que le champ d’application des dérogations envisagées (qui peuvent porter sur les règles qui régissent l’octroi des aides publiques ainsi que les règles de forme et de procédure applicables dans les matières énumérées) ainsi que leur durée (deux ans) sont limités.

De plus, le Conseil d’Etat considère qu’il n’y a pas de violation du principe de non régression définit au II de l’article L. 110-1 du Code de l’environnement comme suit :

 » 9° Le principe de non-régression, selon lequel la protection de l’environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’environnement, ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment. […] « .

En effet, le Conseil d’Etat relève qu’il résulte des termes mêmes du décret attaqué, et notamment de son article 1er, qu’il ne permet pas aux préfets de déroger à des normes réglementaires ayant pour objet de garantir le respect de principes consacrés par la loi, tel le principe de non régression.

Cette solution du Conseil d’Etat est d’ailleurs confortée par le Rapport du Sénat Réduire le poids des normes en aval : interprétation facilitatrice et pouvoir de dérogation aux normes (n° 560), rendu public le 26 juin 2019. Ce rapport déplore la faiblesse du recours aux dérogations par les préfets et encourage à la diminution des limites encadrant ce droit. Notamment, il promeut l’extension du droit de dérogation aux actes des collectivités locales, et l’extension des domaines concernés par les dérogations. Il prône également la possibilité de déroger à des normes législatives sous réserve d’un accord au cas par cas du Sénat.