Par principe, les offres reçues hors délai sont éliminées[1].
Toutefois, l’acheteur public ne saurait rejeter une offre remise par voie électronique comme tardive lorsque le soumissionnaire, qui n’a pu déposer celle-ci dans le délai sur le réseau informatique, établit :
- d’une part, qu’il a accompli en temps utile les diligences normales attendues d’un candidat pour le téléchargement de son offre ;
- et, d’autre part, que le fonctionnement de son équipement informatique était normal.
Dans la présente affaire, l’Agence générale des équipements et produits de santé (AGEPS-APHP) avait lancé une consultation en vue de conclure un accord-cadre relatif à bons de commandes pour un marché de fourniture de dispositifs médicaux implantables de chirurgie cranio-maxillo-faciale et des prestations associées.
Ce marché était divisé en 19 lots.
La société Orthopédie Biomeca Locomotion tenta vainement de déposer son offre sur la plateforme acheteur (en l’occurrence, la plateforme PLACE) pour l’ensemble des 19 lots.
La société s’était connectée sur la plateforme PLACE le 2 avril 2025, une première fois, à 9h20 pour commencer le téléchargement de son offre, achevé à 13h13. Or, le dépôt n’a pas pu être validé. Elle a donc effectué une seconde tentative entre 13h13 et 16h, heure limite fixée par l’acheteur, qui s’est révélée également infructueuse.
Pourtant, ni l’équipement informatique de la société, ni la plateforme ne souffraient de dysfonctionnements. Alors dernier espoir, la société décide d’envoyer son offre par We Transfer à 17h36, sans comprendre, à ce stade pourquoi le dépôt de son offre n’avait pas pu aboutir sur la plateforme.
Mais, dans ces circonstances, l’AGEPS rejette son offre au motif qu’elle a été déposée hors délai et par un canal non autorisé.
La société a ensuite su pourquoi : son offre dépassait les 1Go. Or, elle n’avait pas eu connaissance de cette limite et rien, dans le règlement de la consultation ou sur la plateforme ne l’indiquait.
En effet, devant la juge des référés elle indiquait qu’« elle n’a[vait] reçu aucun message de refus de fichier lui signalant que le poids du fichier était supérieur à celui autorisé sur la plateforme (1 Go), comme cela aurait dû être le cas selon une information figurant seulement dans la foire aux questions (FAQ ; frequently asked questions) de la plateforme PLACE »[2].
Ainsi pour le Conseil d’Etat, en essayant à plusieurs reprises de déposer son offre puis en transmettant les pièces via un lien de transfert, sans déposer une copie de sauvegarde[3], la société a « effectué en temps utile les diligences normales attendues d’un candidat pour le téléchargement de son offre, la juge des référés a porté sur les faits de l’espèce une appréciation souveraine, exempte de dénaturation ».
Confirmant l’ordonnance de la juge des référés, le Conseil d’Etat juge que l’offre ne devait pas être rejetée comme irrégulière et que l’AGEPS était tenue de l’examiner.
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[1] Article R. 2151-5 du Code de la commande publique
[2] Tribunal administratif de Paris, 2025-07-15, n° 2515742
[3] Qui reste une simple faculté ouverte aux candidat et soumissionnaires