le 21/05/2015

Une clause de tacite reconduction ne constitue pas un vice d’une particulière gravité permettant d’écarter l’application du contrat aux litiges nés de son exécution

CE, 4 mai 2015, Société Bueil publicité mobilier urbain, n° 371455

Cas d’application de la jurisprudence dite « Commune de Béziers I », la décision du 4 mai 2015 revêt un double intérêt en ce qu’elle contribue à la définition, d’une part, du champ des « vices d’une particulière gravité » permettant d’écarter l’application du contrat aux litiges nés de son exécution et, d’autre part, de l’équilibre entre respect du principe du contradictoire et application de jurisprudence nouvelle. 

En premier lieu, le Conseil d’Etat rappelle tout d’abord le principe posé par la jurisprudence « Commune de Béziers I » selon lequel, eu égard à l’exigence de loyauté des relations contractuelles, il convient de faire application du contrat aux litiges relatifs à son exécution, sauf exception (CE, 28 décembre 2009, Commune de Béziers, n° 304302). 

Ensuite, faisant application des règles issues de sa décision du 12 janvier 2011, le Conseil d’Etat précise que les parties ne peuvent invoquer un manquement aux règles de passation aux fins d’écarter le contrat pour le règlement du litige (CE, 12 janvier 2011, M. Manoukian, n° 338551). 

Enfin, il a considéré que la clause de tacite reconduction contenue dans le marché public objet du litige était certes irrégulière, puisque le nouveau contrat né de ce renouvellement tacite n’avait pas été soumis à une procédure de publicité et de mise en concurrence préalable, mais ne constituait pas pour autant un vice d’une gravité telle que le Juge devait écarter l’application du contrat. En conséquence, le litige opposant les parties devait être réglé sur le terrain contractuel.

Cette solution avait été clairement affirmée par le Conseil d’Etat dans une décision du 23 mai 2011, relative toutefois à une délégation de service public (CE, 23 mai 2011, Département de la Guyane, n° 314715). 

En deuxième lieu, le Conseil d’Etat relève que, en faisant application des règles issues de la jurisprudence « Commune de Béziers I », sans inviter les parties, qui avaient exclusivement débattu sur le terrain de la responsabilité quasi-délictuelle et quasi-contractuelle, à présenter leurs observations, la Cour, qui s’était bornée à exercer son office en situant le litige sur le terrain juridiquement approprié, n’a pas soulevé un moyen d’ordre public et n’a donc pas méconnu le caractère contradictoire de la procédure. 

En effet, le Juge administratif est uniquement tenu d’inviter les parties à présenter leurs observations lorsque, faisant application de règles issues d’une jurisprudence nouvelle postérieure à la clôture de l’instruction, il règle un litige sur un terrain juridique autre que celui débattu par les parties (CE, 19 avril 2013, Chambre de commerce et d’industrie d’Angoulême, n° 340093).