le 22/11/2018

Un nouveau cas d’indemnisation des congés annuels non pris par l’agent contractuel

CJUE, 6 novembre 2018, aff. C-619-16

Décidemment, il va falloir s’habituer à compter avec la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) en droit de la fonction publique.

Après avoir rappelé que les agents en congés de maladie pouvaient pour autant acquérir des droits à congés annuels, lesquels devaient donc être récupérés lors de leur reprise de fonctions (arrêts CJCE du 20 janvier 2009 C-350/06 et C-520/06CE ; le Conseil d’Etat dans son avis du 26 avril 2017), la Cour de Justice va cette fois-ci sur le terrain plus général de l’indemnisation des congés non pris, quelle qu’en soit la cause.

Pour mémoire, en droit interne, la règle est jusqu’à présent que seuls les jours de congés qui n’ont pu être pris par l’agent du fait de l’administration peuvent être indemnisés (cf. pour la fonction publique territoriale, l’article 5 du décret n° 88-145 du 15 février 1988).

Mais toujours est-il que le pouvoir règlementaire va devoir procéder à une modification dans les temps à venir : la Cour de justice de l’Union européenne a en effet considéré que l’employeur a pour obligation de prévenir son agent des modalités selon lesquelles son droit à congé serait perdu.

Plus précisément, l’employeur doit « veiller concrètement et en toute transparence à ce que le travailleur soit effectivement en mesure de prendre ses congés annuels payés, en l’incitant, au besoin formellement, à le faire, tout en l’informant, de manière précise et en temps utile pour garantir que lesdits congés soient encore propres à garantir à l’intéressé le repos et la détente auxquels ils sont censés contribuer, de ce que, s’il ne prend pas ceux-ci, ils seront perdus à la fin de la période de référence ou d’une période de report autorisée, ou, encore, à la fin de la relation de travail lorsque cette dernière intervient au cours d’une telle période ».

Dans cette affaire, un agent public allemand avait demandé en vain à ce que ses congés lui soient payés à l’issue de son contrat, alors qu’il y avait initialement renoncé : la Cour lui donne raison en rappelant que le travailleur étant par définition la partie faible dans un contrat de travail, l’employeur devait s’assurer de ce qu’il était bien informé de son droit à congé et qu’à défaut, ces derniers ne pouvaient être « perdus ».

Il s’agira, pour l’employeur public français, d’un renversement complet de la logique des textes applicables à la matière. La question de la date à laquelle le pouvoir réglementaire en prendra acte – sans que cela ne conditionne son application pour autant – reste cependant entière quand on sait que la décision de la CJUE sur l’acquisition des congés annuels pendant les congés de maladie, qui a bientôt dix ans, n’a toujours pas donné lieu à une mise en conformité du droit interne…