le 17/03/2016

Un fonctionnaire représentant du personnel ne peut être privé de son mandat lorsqu’il a été suspendu temporairement de ses fonctions

CE, 5 février 2016, Mme GRANERO c. Office Public de l’Habitat d’Aulnay-sous-Bois, n° 396431

Dans cette affaire très récente, une fonctionnaire d’un Office Public de l’Habitat avait fait l’objet d’une suspension temporaire de ses fonctions (sur le fondement de l’article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) puis d’une sanction d’exclusion temporaire de fonctions tandis qu’elle était en parallèle déléguée syndicale, secrétaire du comité d’entreprise et déléguée unique de cet office.  

Estimant que ces mesures suspendaient également ses mandats, la directrice de l’Office Public de l’Habitat lui avait interdit de se présenter sur son lieu de travail.

Saisi en référé (article L. 521-2 du Code de justice administrative), le Tribunal administratif de Montreuil avait rejeté, pour absence d’urgence, la demande tendant à ce qu’il soit enjoint à l’Office de la rétablir dans ses mandats et de l’autoriser à pénétrer dans les locaux.

Saisi d’un recours de l’agent, le Conseil d’Etat s’est prononcé en faveur de l’urgence (du fait notamment que l’absence du secrétaire du comité d’entreprise est de nature à faire obstacle au bon fonctionnement de cette instance) et a  considéré :

« qu’une sanction disciplinaire d’exclusion temporaire des fonctions professionnelles d’un agent public investi de mandats représentatifs ou syndicaux n’est pas au nombre des cas dans lesquels la loi prévoit la cessation ou la suspension des mandats représentatifs et syndicaux de l’agent concerné ; que, si l’office public de l’habitat soutient que l’intérêt du service justifierait la suspension de tous les mandats de Mme GRANERO et l’interdiction d’accès aux locaux professionnels qui lui a été opposée, aucun des faits invoqués pour motiver la sanction du 22 octobre 2015 infligée à Mme GRANERO, et notamment pas celui relatif au financement d’un voyage du comité d’entreprise, n’est de nature à justifier l’interdiction d’accès aux locaux pour exercer ses mandats ; qu’il résulte de ce qui précède que Mme GRANERO est fondée à soutenir qu’en décidant la suspension de ses mandats représentatifs et syndicaux et en lui interdisant, pour leur exercice, d’accéder aux locaux professionnels, l’office public de l’habitat d’Aulnay-sous-Bois a porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ».

C’est ainsi que le Conseil d’Etat a donc enjoint à l’Office de mettre fin à la suspension des mandats syndicaux, de mettre à disposition de l’agent un local pour lui permettre de les exercer et de lui restituer l’ensemble de ses effets personnels et documents syndicaux.

Il s’agit là d’une appréciation restrictive de l’intérêt du service qui justifierait la suspension de l’exercice d’un mandat représentatif ou syndical, et donc une atteinte à la liberté syndicale, à laquelle les collectivités et leurs établissements publics doivent dès lors être attentifs, en prenant en considérant le degré de gravité des faits reprochés à l’agent.