le 15/10/2020

Un contrat passé à titre onéreux par une commune avec un opérateur de téléphonie mobile et d’internet en vue de répondre à ses besoins en matière de télécommunications est un contrat administratif en vertu de la loi

CE, 25 septembre 2020, n° 432727

C’est en effet ce qu’a considéré le Conseil d’Etat dans sa récente décision en date du 25 septembre 2020.

Pour rappel, les faits sont les suivants : la commune de Belvezet (Gard) a souscrit auprès de la société Orange un abonnement pour la fourniture de services de téléphonie et d’internet.

Mais, à la suite d’un accident de la route le 19 juin 2019, le poteau supportant la ligne de téléphone desservant la commune a été arraché, provoquant ainsi l’interruption du service pour une partie des habitants de la commune.

Après six jours d’interruption du service et en avoir informé le prestataire, la Commune forme un référé « mesure utiles » devant le Tribunal administratif de Nîmes[1], lequel enjoint la société la société Orange de prendre toute mesure nécessaire pour rétablir les télécommunications sur la commune de Belvezet sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard.

C’est alors que ladite société forme un pourvoi devant le Conseil d’Etat en soulevant un moyen tiré de l’incompétence du juge administratif pour connaître de ce litige.

Ce moyen sera écarté par la Haute juridiction.

Alors que selon la société Orange, par application de la jurisprudence dite « Bac d’Eloka [2]», c’est à la juridiction judiciaire qu’il revient de trancher ce litige, dès lors qu’il oppose le gestionnaire d’un service public industriel et commercial (SPIC) et son usager, ce raisonnement n’est pas applicable selon le Rapporteur public[3], suivi par le Conseil d’Etat :

  • d’une part, le service en cause, à savoir la fourniture d’un service de télécommnications à une commune, n’est pas un service public en tant que tel et, par la même, pas un SPIC ;

  • d’autre part, la commune de Belvezet ne peut être assimilée à n’importe quel usager abonné d’Orange, particulier ou professionnel et le lien contractuel qui l’unit à la société Orange ne peut donc revêtir la même qualification.

 

En réalité, ainsi que le souligne le Rapporteur public dans ses conclusions, le contrat en cause répond en tous points à la définition du marché public de service telle qu’elle est posée par le Code de la commande publique « l’abonnement souscrit est un contrat conclu par un acheteur soumis au code de la commande publique (la commune) avec un opérateur économique (la société Orange) pour répondre à ses besoins (en matière de téléphonie et d’internet) en contrepartie d’un prix ».

Dans ce cadre, le conseil d’Etat considère que le contrat liant la Commune et la société Orange est un contrat administratif par détermination de la loi.

Par suite, l’action contentieuse dirigée contre ce contrat relève bien de la juridiction administrative et c’est donc à bon droit que le juge des référés du Tribunal administratif de Nîmes a estimé que tel était le cas.

[1] Article L. 521-3 du Code de justice administrative

[2] Arrêt TC, 22 janvier 1921, Société commerciale de l’Ouest Africain, dit arrêt « Bac d’Eloka »

[3] Les conclusions de Mme Sophie Roussel, Rapporteur public dans cette affaire, sont disponibles ici : https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CRP/conclusion/2020-09-25/432727?download_pdf