le 19/11/2020

Droit de la copropriété : retour sur la réforme

Attendue par les professionnels de l’immobilier, l’ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019, complétée par le décret n° 2020-834 du 2 juillet 2020, a réformé le droit de la copropriété des immeubles bâtis.

Plus d’un an après son entrée en vigueur, il convient de dresser un bilan des principales innovations de cette ordonnance.

 

I – Les dispositions relatives à l’assemblée générale

 

A – La convocation d’une assemblée générale par un copropriétaire

Tout copropriétaire peut désormais solliciter du syndic la convocation et la tenue d’une assemblée générale pour faire inscrire à l’ordre du jour une ou plusieurs questions ne concernant que ses droits. Notons que la tenue de cette assemblée générale se fera aux frais du copropriétaire la sollicitant.

Sur la forme, la demande faite par un ou plusieurs copropriétaires est notifiée au syndic et précise la ou les questions dont l’inscription à l’ordre du jour est demandée. Elle est accompagnée d’un projet de résolution pour chaque question.

Le syndic convoque l’assemblée générale qui se tient dans le délai de quarante-cinq jours suivant le paiement de ses frais et honoraires.

Cette mesure sera applicable aux assemblées générales qui se tiendront à partir du 31 décembre 2020.

 

B – Le vote par correspondance

Depuis la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique dite « loi ELAN », les copropriétaires peuvent participer à l’assemblée générale par présence physique, par visioconférence ou par tout autre moyen de communication électronique permettant leur identification. Ils peuvent, par ailleurs, voter par correspondance avant la tenue de l’assemblée générale, au moyen d’un formulaire.

Par ailleurs, le formulaire de vote par correspondance doit être joint à la convocation. Pour être pris en compte lors de l’assemblée générale, le formulaire de vote par correspondance est réceptionné par le syndic au plus tard trois jours francs avant la date de la réunion.

La feuille de présence doit notamment indiquer les nom et domicile de chaque copropriétaire ou associé ayant voté par correspondance avec mention de la date de réception du formulaire par le syndic.

COVID-19 : depuis l’entrée en vigueur du second confinement, les assemblées générales de copropriété doivent se tenir à distance, par visioconférence ou audioconférence ou au moyen du vote par correspondance, et ce jusqu’au 31 janvier 2021.

 

C – Le procès-verbal des décisions

Il est établi un procès-verbal des décisions de chaque assemblée qui est signé, à la fin de la séance, par le président, par le secrétaire et par le ou les scrutateurs. Il pourra désormais être signé dans les huit jours suivant la tenue de l’assemblée.

Il est à noter que l’irrégularité formelle affectant le procès-verbal d’assemblée générale, lorsqu’elle est relative aux conditions de vote ou à la computation des voix, n’entrainera pas nécessairement la nullité de l’assemblée générale dès lors qu’il est possible de reconstituer le sens du vote et que le résultat de celui-ci n’en est pas affecté.

 

D – La réalisation des travaux d’accessibilité

Chaque copropriétaire pourra faire réaliser, à ses frais, des travaux pour l’accessibilité des logements aux personnes handicapées ou à mobilité réduite qui affectent les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble. Ainsi, le copropriétaire notifiera au syndic une demande d’inscription d’un point d’information à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale, accompagnée d’un descriptif détaillé des travaux envisagés.

L’assemblée générale pourra, à la majorité des voix des copropriétaires, s’opposer à la réalisation de ces travaux par décision motivée par l’atteinte portée par les travaux à la structure de l’immeuble ou à ses éléments d’équipements essentiels, ou leur non-conformité à la destination de l’immeuble.

En l’absence d’opposition motivée, le copropriétaire peut faire réaliser les travaux conformément au descriptif détaillé présenté à l’assemblée générale, à l’expiration du délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée.

Ces dispositions s’appliquent aux assemblées générales de copropriétaires tenues à compter du 31 décembre 2020.

 

 

II – Les dispositions relatives à la vente d’un lot de copropriété

 

A  – La formation d’une opposition lors de la vente d’un lot de copropriété

Lors de la vente d’un lot, un avis de la mutation doit être donné par le notaire au syndic de l’immeuble par lettre recommandée avec avis de réception dans un délai de quinze jours à compter de la date du transfert de propriété.

Avant l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de la réception de cet avis, le syndic peut former, par acte extrajudiciaire, opposition au versement des fonds dans la limite ci-après pour obtenir le paiement des sommes restant dues par l’ancien propriétaire.

Depuis le 4 juillet 2020, l’opposition éventuellement formée par le syndic doit énoncer d’une manière précise le montant et les causes des créances de toute nature du syndicat de l’année courante, des deux dernières années échues et des deux années antérieures aux deux dernières années échues.

 

B – L’information du syndic lors de la vente d’un lot

Plusieurs événements peuvent affecter un lot de copropriété tels que le transfert de propriété d’un lot, la constitution sur ces derniers d’un droit d’usufruit, de nue-propriété, d’usage … À cette occasion, les parties ou le notaire qui établit l’acte doit en informer le syndic sans délai.

Cette notification comporte notamment la désignation du lot, l’indication des nom, prénoms, et du domicile. Notons que la notification pourra également comporter l’adresse électronique de l’acquéreur ou du titulaire de droit, sous réserve de leur accord exprès.

 

 

III – Les modalités de notifications et de mises en demeure

 

A – L’envoi par voie électronique

Les notifications et mises en demeure, sous réserve de l’accord exprès des copropriétaires, sont valablement faites par voie électronique. Le décret du 2 juillet 2020 précise que toutes les notifications et mises en demeure peuvent également être faites soit par lettre recommandée électronique, soit par l’intermédiaire d’un prestataire de services de confiance qualifié et garantissant l’intégrité des données.

Lorsque les notifications et mises en demeure sont faites au moyen du procédé électronique mis en œuvre par l’intermédiaire d’un prestataire de services, chaque copropriétaire concerné en est informé au moins quinze jours avant le premier envoi effectué par ce moyen.

Plusieurs obligations pèsent alors sur le prestataire de service. En effet, celui-ci devra délivrer à l’expéditeur un récépissé du dépôt électronique de l’envoi ainsi qu’un justificatif de la transmission de l’envoi par ses soins au destinataire. Ces documents comportent notamment le nom, prénom et adresse électronique de l’expéditeur et du destinataire ; un numéro d’identification unique de l’envoi ; la liste des pièces remises, la signature électronique du prestataire ou encore la date et l’heure de la transmission au destinataire.

Le prestataire doit conserver ces preuves de dépôt et de transmission pour une durée minimale d’un an.

Il convient de noter que le délai que les notifications et mises en demeure par voie électronique font courir a pour point de départ le lendemain de la transmission, par le prestataire de service de confiance, de l’avis électronique informant le destinataire d’un envoi électronique.

 

B – L’envoi d’un avis électronique au destinataire

Un avis électronique est adressé au destinataire par le prestataire de service de confiance qualifié afin de l’informer qu’un envoi électronique lui a été transmis. Cet avis comporte le nom de l’expéditeur, l’objet de l’envoi, un lien hypertexte invitant le destinataire à télécharger le contenu de l’envoi et la reproduction de la mention suivante :

« En application du second alinéa de l’article 64-2 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967, le délai que les notifications et mises en demeure par voie électronique font courir a pour point de départ le lendemain de la transmission de l’avis électronique au destinataire. Pour le présent envoi, la date de transmission est le : (date à préciser) ».

Si le prestataire de service constate, passé un délai de 48 heures après la transmission de l’avis au destinataire, que ce dernier n’a pas procédé au téléchargement du contenu, il devra lui adresser un message de rappel.

 

 

IV – Les dispositions applicables aux copropriétés de taille réduite

 

A – Dispositions particulières aux petites copropriétés d’au plus cinq lots

Les décisions prises par voie de de consultation sont valables dès lors que tous les copropriétaires composant le syndicat ont chacun exprimé leur vote par présence physique, par visio ou audioconférence ou par courrier.

Chaque décision prise par voie de consultation est consignée sur un procès-verbal établi et signé par le syndic, comportant le sens du vote de chaque copropriétaire et la signature des copropriétaires présents. Ce procès-verbal est annexé au registre des procès-verbaux des assemblées générales

Lorsque le copropriétaire a participé à la consultation par visioconférence ou audioconférence, il confirme le sens de son vote par tout moyen dans les quarante-huit heures qui suivent la réunion. A défaut, la décision n’est pas valablement prise.

 

B – Dispositions particulières aux syndicats dont le nombre de voix est réparti entre deux copropriétaires

En cas de conflits d’intérêts du syndic non professionnel, le copropriétaire qui n’est pas syndic peut exercer une action contre l’autre copropriétaire en paiement des provisions sur charges. En cas d’absence ou de carence du syndic, cette action est ouverte à chacun des copropriétaires.

Concernant les réunions exceptionnelles, l’ordonnance a prévu deux mesures exceptionnelles applicables aux petites copropriétés :

  • D’une part, deux copropriétaires composant le syndicat peuvent se réunir sans convocation préalable et prendre toutes décisions ainsi que les décisions relevant de l’unanimité.

  • D’autre part, chaque copropriétaire peut convoquer l’autre copropriétaire à une assemblée générale en lui notifiant les points à l’ordre du jour. Chaque copropriétaire peut ajouter des points à l’ordre du jour sous réserve d’en informer préalablement l’autre.

Le décret précise que les décisions prises au cours d’une réunion rassemblant les copropriétaires ou prises par un seul copropriétaire sont consignées par écrit et versées au registre des procès-verbaux des assemblées générales. Ces décisions sont susceptibles de recours devant le tribunal judiciaire.

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Très attendue, la réforme du droit de la copropriété s’est trouvée quelque peu contrariée par la   COVID-19 même si cette crise sanitaire aura permis d’accélérer la mise en pratique de certaines innovations telles que la tenue des assemblées générales par visioconférence.

 

Par Claire-Marie Dubois-Spaenlé et Elie Lellouche