Projets immobiliers publics privés
le 23/06/2022

Sur la responsabilité du syndicat des copropriétaires compte tenu de sa négligence fautive pour ne pas avoir fait cesser l’atteinte d’un copropriétaire au droit de propriété d’un tiers

Cass. Civ., 3ème, 21 avril 2022, n° 21-12.240 21-12.703

Principe : le syndicat des copropriétaires est constitué par la collectivité des copropriétaires. En application de l’article 14 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il assure la conservation de l’immeuble et l’administration des parties communes et est responsable des dommages causés, tant aux copropriétaires, qu’aux tiers ayant leur origine dans les parties communes de l’immeuble.

La présente décision de la Cour de cassation vient apporter des précisions sur la responsabilité du syndicat des copropriétaires, en cas de dommage causé à un tiers par un copropriétaire du fait de la réalisation de travaux.

Un copropriétaire d’un lot situé au rez-de-chaussée avait réalisé des travaux consistant en la création, dans le mur extérieur, de plusieurs ouvertures donnant sur la copropriété voisine et l’aménagement d’une terrasse sur ce fonds.

Il sera précisé que ces travaux ont été réalisés sans autorisation préalable du syndicat des copropriétaires et que la création des vues ne respectait pas les distances exigées par le Code civil.

La copropriété voisine victime de cet empiétement et de cette création de vue a assigné le syndicat des copropriétaires en suppression des ouvertures et cessation de cet empiétement. Le copropriétaire ayant réalisé lesdits travaux a été appelé dans la cause.

Le copropriétaire ayant réalisé les travaux, a entendu, quant à lui, se prévaloir de l’acquisition d’une servitude de vue par voie de prescription acquisitive.

Ainsi, cet arrêt présente un intérêt, dès lors que la Cour de cassation, au-delà de se prononcer sur la responsabilité du syndicat des copropriétaires, rappelle les modalités d’acquisition d’une servitude de vue.

 

Clarification : la Cour d’appel condamne in solidum le syndicat des copropriétaires est condamné avec le copropriétaire ayant réalisé les travaux, à fermer les ouvertures, à supprimer tout empiétement sur le fonds appartenant à la copropriété voisine et à une remise en état.

La Cour de cassation relève que la Cour d’appel a justement retenu que le syndicat des copropriétaires est responsable du fait de ne pas avoir mis en demeure le copropriétaire de remettre en état le mur, ce qui s’avère constitutif d’une négligence en relation de cause à effet avec le préjudice subi par le tiers voisin, à savoir un empiétement de sa propriété.

Aussi, la Cour de cassation considère qu’il incombe au syndicat des copropriétaires, ayant connaissance d’ouvertures créées dans un mur, en contradiction avec les règles du Code civil, de mettre en demeure le copropriétaire de remettre les lieux en état et faire cesser cette création de vue illégale.

La Cour de cassation, devait également se prononcer sur la notion d’acquisition prescriptive d’une servitude de vue, en réponse au pourvoi formé par le copropriétaire ayant réalisé l’ouverture dans le mur extérieur.

La Cour d’appel a retenu que les ouvertures avaient été réalisées sans déclaration préalable, ni autorisation de la copropriété, de sorte que la possession s’établissait sur des actes illicites et irréguliers faisant obstacle à l’acquisition de vues par voie de prescription acquisitive.

Sur ce point, la Cour de cassation censure la Cour d’appel en considérant que l’absence de déclaration préalable d’urbanisme et le défaut d’autorisation des travaux de percement par l’assemblée générale des copropriétaires n’empêchent pas l’acquisition d’une servitude de vue par prescription acquisitive.

A la lecture de cet arrêt, il convient de retenir que la négligence fautive du syndicat des copropriétaires, n’ayant pas mis en demeure un copropriétaire de faire cesser un dommage, est constitutive d’une faute et ainsi susceptible d’engager la responsabilité de la copropriété.

Aussi, il appartient au syndicat des copropriétaires, assurant l’administration des parties communes et la conservation de l’immeuble, d’avoir une attention toute particulière aux travaux qui pourraient être réalisés par un copropriétaire et pouvant occasionner un préjudice à un tiers, dès lors que la copropriété peut voir sa responsabilité engagée.

Concernant la constitution d’une servitude de vue, et à condition que les conditions d’une possession utile soient réunies, il est confirmé qu’elle peut s’acquérir par voie de prescription acquisitive ; et ce même en absence de toute autorisation de réalisation de travaux.