le 16/07/2020

Suite (et fin ?) de la difficile quête de l’indépendance de l’autorité environnementale : publication du décret du 3 juillet 2020 relatif à l’autorité environnementale et à l’autorité chargée de l’examen au cas par cas

Décret n° 2020-844 du 3 juillet 2020 relatif à l'autorité environnementale et à l'autorité chargée de l'examen au cas par cas

La directive n° 2001/42/CE du 27 juin 2001 et la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011, ont toutes deux pour objectif de garantir dans les Etats membres l’existence d’une autorité compétente et objective en matière d’environnement qui soit en mesure de rendre un avis sur l’évaluation environnementale des plans et programmes ou sur l’étude d’impact des projets susceptibles d’avoir une indépendance notable sur l’environnement.

La transposition d’une telle indépendance de l’autorité environnementale en droit français a rencontré de grandes difficultés, la publication du décret du 3 juillet dernier est supposé y mettre un terme. C’est tout ce que nous pouvons souhaiter pour les plans, programmes et projets dont la sécurité juridique a largement été ébranlée, et continuera de l’être, sous l’effet de cette remise en question des textes par le Conseil d’Etat.

A cet égard, rappelons que c’est principalement à l’occasion de deux décisions des 6 et 28 décembre 2017 (portant respectivement les n° 400559 et n° 407501) que le Conseil d’Etat a annulé certaines dispositions du décret 28 avril 2016, car il maintenait, au IV de l’article R. 122-6 du Code de l’environnement, la désignation du préfet de région en qualité d’autorité compétente de l’Etat en matière d’environnement.

La double casquette du préfet de région, à la fois autorité environnementale et autorité pouvant autoriser le projet ou en assurer la maîtrise d’ouvrage s’opposait à l’indépendance requise par le droit européen.

Ces annulations ont eu pour effet de vicier rétroactivement la légalité des procédures d’évaluation environnementale de plans, programmes et projet qui avait pourtant suivi à la lettre les textes alors applicables en saisissant le préfet en qualité d’autorité environnementale.

Il a alors fallu combler le vide juridique laissé par l’annulation de ces dispositions réglementaires, c’est l’objet du très attendu décret n° 2020-844 du 3 juillet 2020.

Ce décret s’appui sur la nouvelle rédaction de l’article L. 122-1 du Code de l’environnement, dans sa version issue de la loi ELAN (loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019), qui distingue désormais l’autorité environnementale de l’autorité chargée de l’examen au cas par cas. Appliquant ces dispositions législatives, le décret énumère en son article 2 les autorités chargées de l’examen au cas par cas, et en son article 4 les autorités désignées en qualité d’autorité environnementale.

Il n’est pas question ici de procéder à l’énumération des cas dans lesquelles telle ou telle autorité est désignée en qualité d’AE ou en charge de l’examen au cas par cas, il faut toutefois retenir que, en synthèse, l’AE peut être, selon les cas, le ministre de l’environnement, le CGEDD ou la MRAe pour les projets locaux.

Le décret, tirant les enseignements des censures passées du Conseil d’Etat, ne prévoit plus aucun cas dans lequel le préfet de région peut être désigné en qualité d’autorité environnementale. Le décret transfère à la MRAe la compétence pour rendre des avis sur les projets en lieu et place des préfets de région. 

Ce dernier reste toutefois désigné pour procéder, dans la plupart des cas, à l’examen au cas par cas des projets locaux entrant dans le champ de l’évaluation environnementale, mais l’autorité environnementale de ces mêmes projets est, sans grande surprise, la MRAe.

Puisque c’est tout le nœud du problème, ce décret prévoit également, par la création de deux nouveaux articles R. 122-24-1 et R. 122-24-2 dans le Code de l’environnement, un dispositif de prévention des conflits d’intérêts pour l’autorité chargée de l’examen au cas par cas et l’autorité environnementale.

Il y a fort à parier que ce nouveau décret ne manquera pas de donner lieu à de nouveaux débats contentieux, il convient alors pour les auteurs des plans et programmes, et pour les porteurs de projets de rester en alerte sur ces sujets houleux.

Les nouvelles dispositions s’appliquent aux demandes d’avis ou d’examen au cas par cas déposées à compter du 5 juillet 2020.