le 24/06/2021

Standing de l’ouvrage et impropriété à destination

Cass. Civ., 3ème, 12 mai 2021, n° 19-24.786

Cette décision vient illustrer l’appréciation de l’impropriété à destination en fonction du standing de l’ouvrage affecté par des désordres.

On rappellera que l’engagement de la responsabilité décennale des constructeurs, sur le fondement de l’article 1792 du Code civil, suppose notamment que les désordres observés présentent une certaine gravité.

A défaut, s’ils sont considérés comme simplement esthétiques (fissurations sans atteinte à l’étanchéité, simple non-conformité contractuelle etc.), ils n’offrent pas le caractère décennal indispensable.

Toutefois, l’impropriété à destination doit être appréciée par rapport à l’ensemble de l’ouvrage et en particulier en fonction de la destination convenue.

Ainsi, la jurisprudence peut admettre que, compte-tenu du standing de l’ouvrage en cause, les désordres constatés, bien qu’esthétiques, présentent bien un caractère décennal (Cass. Civ., 3ème, 11 mars 2008, n° 07-10651 ; Cass. Civ., 3ème, 10 octobre 2012, n° 10-28309).

 Dans notre affaire, la Cour de cassation, dans la continuité de sa jurisprudence antérieure, confirme la condamnation des constructeurs et de leurs assureurs en jugeant que :

«  la cour d’appel a retenu que les fêlures ou casses des carreaux sur les murs des salles de bains, le décollement en cueillies de plafonds et la fissuration verticale au droit des plaques murales compromettaient l’esthétique et l’habitabilité de l’immeuble, qu’ils le rendaient impropre à sa destination dès lors qu’ils affectaient des éléments essentiels des salles de bains et des WC, à savoir les carrelages, ainsi que les murs porteurs, rendant inhabitables des chambres d’une résidence hôtelière de haut standing, et qu’ils étaient donc de nature décennale au sens des dispositions de l’article 1792 du code civil ».

Encore faut-il pouvoir démontrer que l’ouvrage présente un caractère de grand standing :

« les désordres esthétiques sont constitutifs d’une impropriété à destination lorsqu’ils affectent un immeuble de grand standing, et que rien ne venait démontrer que l’ensemble d’immeubles de la copropriété relevait du grand standing » (Cass. Civ., 3ème, 14 janvier 2014, n° 11-25.074).

A défaut, le maître d’ouvrage pourra envisager de rechercher la responsabilité contractuelle du constructeur, en cas notamment de non-conformité aux stipulations contractuelles ou de manquement au devoir de conseil et à l’obligation de renseignement.