le 24/06/2021

Responsabilité contractuelle de l’Etat pour non-respect d’une convention de partenariat conclue avec un département visant à financer l’acquisition de matériel informatique pour les élèves des collèges

CAA Paris, 16 avril 2021, n° 20PA02901

Par une ordonnance en date du 16 avril 2021, rendue dans le cadre d’un référé provision, la Cour administrative d’appel de Paris a jugé qu’une convention de partenariat conclue entre l’Etat et un département pour le financement de matériel informatique destiné à des collèges, par laquelle le premier s’engageait notamment à verser au second une subvention, avait bien une nature contractuelle et non unilatérale.

Dans cette affaire, l’Etat s’était engagé, par le biais de plusieurs conventions pluriannuelles, à verser chaque année une subvention au département qui, lui, promettait de fournir aux élèves et à leurs enseignants un ordinateur portable. La convention définissait, outre sa durée, le principe et les modalités de calcul de la subvention, déterminée en fonction du nombre d’élèves et de professeurs à doter. Le montant annuel de la subvention et les modalités de versement devaient, quant à eux, être fixés chaque année par voie d’avenant. En somme, les avenants avaient simplement vocation à constater le nombre d’élèves et de professeurs à doter chaque année, et à en déduire le montant de la subvention annuelle, et non à modifier le contrat initial.

Toutefois, au cours de la dernière année d’exécution de la convention, l’Etat a cessé de verser les dotations et n’a pas répondu aux différentes demandes d’information du département à ce sujet. Le département, qui avait, quant à lui, rempli ses engagements en fournissant le matériel informatique, a donc saisi le juge des référés d’une demande de provision afin d’obtenir le versement de la somme correspondante.

Le juge des référés du Tribunal administratif de Melun a répondu favorablement à la demande du département sur le fondement de l’article R. 541-1 du Code de justice administrative (CJA). Selon lui, la dette de l’Etat envers le département n’apparaissait pas sérieusement contestable. En effet, les avenants avaient simplement pour but de fixer les modalités de calcul de la subvention mais ne remettaient pas en cause son existence. Le juge des référés a donc estimé que la responsabilité contractuelle de l’Etat pouvait être engagée en raison du non-respect de ses obligations découlant de la convention. L’Etat a ainsi été condamné à verser au département une somme de 2 733 720 euros.

En appel, l’Etat a soutenu que seule sa responsabilité délictuelle pouvait, le cas échéant, être mise en œuvre, alors que le recours du département était fondé sur la responsabilité contractuelle.

Il s’est, pour cela, notamment appuyé sur l’avis par lequel le Conseil d’Etat a affirmé que les recours relatifs à une subvention ne peuvent être portés que devant le juge de l’excès de pouvoir, la décision d’octroyer une subvention ayant, quelle que soit sa forme – unilatérale ou conventionnelle –, le caractère d’une décision unilatérale (CE, 29 mai 2019, n° 428040).

Toutefois, le juge des référés de la Cour administrative d’appel de Paris a rejeté ces arguments après avoir estimé que les dotations de l’Etat ne pouvaient en l’espèce être regardées comme de simples subventions mais comme faisant partie d’un véritable contrat de partenariat.

Celles-ci visaient en effet à mettre en œuvre une politique publique qui s’inscrivait dans le cadre d’un vaste projet éducatif et procédaient de l’initiative de l’Etat, qui avait lancé, en 2015, plusieurs appels à projets dans le cadre de son plan numérique pour l’école visant à une généralisation de l’usage du numérique dans les établissements auxquels avait répondu le département et qui avaient donné lieu aux conventions en cause. De plus, ces dernières mettaient en place des obligations réciproques entre les parties, qui ne se limitaient pas qu’au versement des subventions en échange de l’achat du matériel informatique.

Dans ces conditions, le juge des référés de la Cour administrative d’appel de Paris a confirmé le bien-fondé de la provision obtenue par le département en première instance