le 13/09/2016

QPC sur l’obligation de relogement des occupants étrangers en situation irrégulière

Cass. Civ., 3ème, QPC, 13 juillet 2016, n° 16-40.214

Dans le cadre d’une opération d’aménagement, un aménageur ne peut prendre possession et jouir d’un bien immobilier à usage d’habitation occupé tant qu’il ne s’est pas acquitté de son obligation de reloger les occupants de bonne foi de cet immeuble, en application des dispositions des articles L. 314-1 et L. 314-2 du Code de l’urbanisme et L. 521-1 du Code de la construction et de l’habitation.

En l’espèce, l’aménageur était confronté à une difficulté de taille dans la mesure où les occupants de l’immeuble dont il était devenu propriétaire, correspondaient à des personnes étrangères en situation irrégulière ne pouvant être attributaires d’un logement du parc social.

La jurisprudence de la Cour de cassation impose aux aménageurs de reloger tous les occupants de bonne foi comprenant notamment les personnes en situation irrégulière (voir par exemple Cass. civ., 3ème, 12 septembre 2012, n° 11-18.073). Toutefois, en pratique, cette obligation s’avère être impossible à mettre en œuvre.

Dès lors, l’aménageur a soumis la question prioritaire de constitutionnalité à la juridiction judicaire suivante : « les articles L. 314-1 et L. 314-2 du Code de l’urbanisme, ensemble l’article L. 521-1 du Code de la construction et de l’habitation, tels qu’interprétés par la Cour de cassation, en tant qu’ils imposent le relogement des occupants de bonne foi se trouvant en situation irrégulière sur le territoire français, sont-ils contraires au droit de propriété, consacré aux articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789, dès lors que le propriétaire d’un immeuble acquis dans le cadre d’une opération d’aménagement et donc dans un but d’intérêt général, ne pourra pas user, jouir et disposer normalement de ce bien tant qu’il ne se sera pas acquitté de l’obligation de relogement, obligation pourtant impossible à mettre en œuvre légalement et opérationnellement ».

La Cour de cassation a retenu le caractère sérieux de la question car ces dispositions légales sont susceptibles de porter une atteinte disproportionnée aux conditions d’exercice du droit de propriété au regard du but recherché.

Elle l’a donc renvoyée au Conseil constitutionnel lequel doit rendre sa décision dans un délai de trois mois.