Les obligations d’information du droit à la communication du dossier, de motivation des décisions prononçant une sanction disciplinaire, ou encore, le recours même au conseil de discipline, sont autant de garanties qui s’ancrent dans la droite ligne du principe général des droits de la défense applicable à toute mesure administrative présentant un caractère de sanction[1]. Le principe du caractère contradictoire de la procédure[2], corollaire du respect des droits de la défense, implique que l’agent poursuivi disciplinairement puisse présenter des observations sur les faits qui lui sont reprochés avant que l’autorité disciplinaire ne prononce de sanction[3].
Dans un arrêt en date du 27 février 2024, la Cour administrative de Bordeaux a précisé la portée de ces principes s’agissant de l’intervention de l’avocat lors des entretiens dans lesquels il assiste son client, en jugeant que l’avocat doit être mis en mesure de présenter des observations orales lorsqu’il vient assister son client en entretien disciplinaire. Lui interdire toute prise de parole prive l’agent d’une garantie, entraînant l’illégalité de la procédure.
En l’espèce, dans la perspective d’un licenciement disciplinaire, l’agent[4] s’était présenté à son entretien préalable accompagné de son avocat, ainsi que le permettent les dispositions de l’article 44 du décret du 17 janvier 1986[5]. Lors de cet entretien, la directrice du groupement d’intérêt public qui employait l’agent a expressément refusé que l’avocat de l’agent présente ses observations à l’oral. Ce n’est que postérieurement à celui-ci que son conseil a pu adresser des observations écrites par courriel.
La Cour administrative d’appel a estimé que l’agent avait à ce titre été privé d’une garantie, considérant que la circonstance que son avocat ait pu formuler des observations écrites n’avait pu avoir eu pour effet de compenser l’interdiction qui lui avait été faite de prendre la parole durant l’entretien. L’importance des observations orales, par rapports aux écrites avaient déjà été soulignées par Madame Da Silva, dans ses conclusions sur l’arrêt du Conseil d’Etat du 24 mai 2006, (n° 284827).
La Cour juge ainsi que l’avocat doit pouvoir intervenir, demander des explications et compléter celles de l’agent. Ce qui ne signifie pas, pour autant, qu’aucune limite ne peut être donnée à l’intervention de l’avocat dans ce type d’entretien, reste à savoir jusqu’où ces limites peuvent être imposées sans priver l’agent d’une garantie : la jurisprudence ne manquera pas le préciser à l’avenir.
[1] CE, 5 mai 1944, Dame Veuve Trompier-Gravier, n° 69751 ; aussi consacré comme principe fondamental reconnu par les lois de la République, CE, 5 mai 1944, Dame Veuve Trompier-Gravier, n° 69751 ; aussi consacré comme principe fondamental reconnu par les lois de la République
[2] Décision CC, n° 84-184 DC, 29 décembre 1984, Loi de finances pour 1985
[3] Décision CC, n° 2019-781 QPC, 10 mai 2019, M. Grégory M.
[4] En l’espèce, un agent contractuel exerçant la fonction de garde animateur au sein du groupement d’intérêt public Reserve naturelle marine de La Réunion, relevant à ce titre de la fonction public d’Etat
[5] « L’agent non titulaire à l’encontre duquel une sanction disciplinaire est envisagée a droit à la communication de l’intégralité de son dossier individuel et de tous documents annexes et à se faire assister par les défenseurs de son choix. / L’administration doit informer l’intéressé de son droit à communication du dossier ».