le 05/03/2020

Précisions du juge administratif sur le terme T de la redevance R2 prévue par les contrats de concession relatifs à la distribution publique d’électricité

CAA Nantes, 13 février 2020, Nantes Métropole c/ Enedis, n° 18NT02767, 19NT01276, 19NT01277

Dans un arrêt en date du 13 février 2020, la Cour administrative d’appel de Nantes (ci-après, la CAA de Nantes) a annulé trois jugements rendus par le Tribunal administratif de Nantes et apporté d’utiles précisions sur l’interprétation du terme T de la redevance d’investissement dite « R 2 » prévue par les contrats de concession relatifs à la distribution publique d’électricité.

Ces contrats comportent en effet une redevance R2 versée par le concessionnaire à l’autorité concédante en contrepartie des travaux réalisés sur le réseau de distribution publique d’électricité, et dans l’intérêt dudit réseau, sous maîtrise d’ouvrage de l’autorité concédante. Cette redevance R2 est calculée par l’application d’une formule mathématique constituée de plusieurs termes et figure à l’annexe 1 du cahier des charges des contrats de concession établis sur la base du modèle négocié en 1992 par EDF et la Fédération Nationale des Collectivités Concédantes et des Régies (modèle applicable dans l’affaire ici jugée ainsi qu’aujourd’hui encore sur plusieurs territoires , quoique ce modèle ait été révisé en décembre 2017 en supprimant, notamment, le terme « T » objet de la présente affaire).

Ladite formule comporte un terme « T » contractuellement défini comme le « produit net des taxes municipales sur l’électricité sur le territoire de la concession, ayant fait l’objet de titres de recettes de l’autorité concédante l’année pénultième ; T ne peut toutefois être inférieur au produit net des taxes municipales sur l’électricité sur le territoire des communes rurales de la concession ». Le terme T vient en déduction de la formule de calcul de la redevance R 2 puisqu’il est soustrait aux autres termes de calcul de la cette redevance. Ainsi que la CAA de Nantes le relève dans sa décision, « plus « T » est faible, plus la part « R2 » de la redevance est élevée » (considérant n°4).

On rappellera également que la taxe visée par le terme T en cause est, actuellement, la taxe communale sur la consommation finale d’électricité (ci-après, TCCFE) mentionnée à l’article L. 2333-2 du Code général des collectivités territoriales (ci-après, CGCT). Dans les communes de plus de 2000 habitants, sauf délibération contraire, la taxe est perçue et conservée par la commune, et ce, même si elle a transféré sa compétence d’AODE à un Syndicat ou à un établissement public de coopération communale à fiscalité propre et ne l’exerce donc plus. La commune et l’AODE pouvant néanmoins, par délibérations concordantes, autoriser l’AODE à percevoir ladite TCCFE et à la conserver en tout ou partie.

Dans les affaires qui avaient été soumises au Tribunal administratif de Nantes, étaient en cause trois contrats de concession conclus par trois communes ayant, ensuite, transféré leur compétence d’AODE ainsi que les contrats de distribution publique d’électricité à Nantes Métropole. Cependant, ces trois communes, de plus de 2000 habitants, avaient, malgré le transfert de leur compétence d’AODE à Nantes Métropole, décidé de continuer à percevoir elle-même et de conserver la TCCFE correspondant à leur territoire.

Ne percevant aucun montant de TCCFE au titre de ces trois communes, Nantes Métropole avait décidé, au titre de la redevance R2 des années 2015 et 2016, de ne déduire de la redevance R2 aucune somme au titre du terme T. La société Enedis a contesté ce raisonnement et introduit des recours en annulation contre ces deux titres exécutoire auprès du Tribunal administratif de Nantes.

Dans deux jugements du 23 mai 2018, le Tribunal administratif avait censuré ce raisonnement en considérant que « le montant de la redevance R2 doit être calculé en déduisant du montant des investissements réalisés par l’autorité concédante le produit des taxes communales sur la consommation finale d’électricité recouvrées respectivement sur le territoire des communes de Nantes, Rezé et Indre, alors même que ces communes ont émis les titres de recette en vue du recouvrement de ces taxes et qu’elles en conservent le produit »(voir notre commentaire dans la Lettre d’Actualité Energie et Environnement du mois de septembre 2018).

La CAA de Nantes annule les jugements rendus par le Tribunal et considère, au contraire, que c’est à bon droit que Nantes Métropole a intégré un terme T nul. La Cour relève en effet que le fait pour les trois communes d’avoir transféré la compétence d’AODE à Nantes Métropole tout en décidant de conserver la perception de la TCCFE avait eu pour conséquence une dissociation entre le bénéficiaire de la taxe et l’autorité concédante. Or, pour la Cour, il y a lieu de s’en tenir à la lettre et à l’esprit du contrat qui définit le terme T comme visant le montant de TCCFE effectivement perçu par l’autorité concédante, soit Nantes Métropole en l’occurrence.

Cette précision est utilement apportée dans le contexte de renouvellement des concessions de distribution publique d’électricité en cours, dans lequel il est pertinent pour l’AODE qui envisage de renouveler sa concession de comparer justement les redevances issues de son contrat de concession en cours et celles issues du nouveau modèle.