le 17/03/2016

Permis de construire : être voisin immédiat ne suffit plus pour justifier d’un intérêt à agir

CE, 10 février 2016, n° 387507

L’ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l’urbanisme a introduit un article L. 600-1-2 au sein du Code de l’urbanisme. Ces nouvelles dispositions avaient pour vocation d’inciter le Juge administratif à une lecture plus stricte de l’intérêt pour agir.

Ces nouvelles dispositions introduisent dans le Code de l’urbanisme l’obligation pour le demandeur à l’annulation d’une autorisation d’urbanisme de démontrer que « l’aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien ».

Au mois de juin dernier, le Conseil d’Etat avait rendu une décision didactique sur l’application de ces nouvelles dispositions (CE, 10 juin 2015, n° 386121).

Par cette décision, le Conseil d’Etat a rappelé la « dialectique de la preuve somme toute assez classique » en matière d’intérêt à agir (Frédéric SALVAGE, L’intérêt pour agir en droit de l’urbanisme : un an de jurisprudence, BJCL, n° 11/15, novembre 2015, page 750). Il avait été rappelé par le Conseil d’Etat que le requérant doit démontrer avec précision et de manière étayée sa qualité pour agir, le défendeur a pour rôle d’apporter tout élément de nature à établir que les lésions alléguées sont dépourvues de réalité, le Juge enfin forme sa conviction au vu des éléments versés au dossier par les parties.

Récemment, la Haute juridiction a eu l’occasion de mettre en application les nouvelles dispositions pour les voisins immédiats à la construction. Pour ces derniers, la justification de l’intérêt pour agir était appréciée avec souplesse par la jurisprudence constante.

Par un arrêt en date du 10 février 2016, le Conseil d’Etat estime qu’il ne suffit plus d’être voisin en co-visibilité, de produire la copie de son titre de propriété et des plans indiquant que « la façade sud fortement vitrée qui créera des vues » pour justifier d’un intérêt pour agir contre une autorisation d’urbanisme. Ces seuls éléments sont jugés insuffisants pour démontrer « clairement en quoi les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien sont susceptibles d’être directement affectées par le projet litigieux ». Dans ces conditions, le Tribunal administratif de Marseille était fondé à rejeter la requête par simple voie d’ordonnance.