le 19/12/2018

L’exécution d’un arrêté autorisant une occupation privative du domaine public suspendue par le juge des référés pour non-respect des formalités de publicité et de mise en concurrence

TA La Réunion, ord., 16 mars 2018, M. B. et a., n° 1800124

L’ordonnance du 19 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques ne nourrit pas encore les prétoires, mais on y vient peu à peu. Et c’est vrai surtout au sujet de l’exigence de publicité et de sélection préalable à la délivrance des titres d’occupation privative du domaine public, que l’ordonnance a posée. La décision rendue le 16 mars dernier par le Tribunal administratif de La Réunion en est une illustration. Il a suspendu une autorisation d’occupation domaniale accordée de gré à gré à l’exploitant d’un restaurant de plage.

Le maire de Saint-Paul avait décidé de délivrer une autorisation d’occupation temporaire du domaine public aux exploitants de six établissements commerciaux implantés sur le site de la plage de l’Hermitage, exploitants qui occupaient jusque-là les lieux sans disposer d’aucun titre. L’un des arrêtés pris à cet effet a fait l’objet d’une requête en référé « suspension », sur le fondement de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative.

Le juge des référés a décidé de suspendre effectivement l’autorisation d’occupation domaniale délivrée, considérant que l’absence de mise en concurrence créait un doute sérieux sur la légalité du titre.

On sait en effet que l’article L. 2122-1-1 du Code général de la propriété des personnes publiques impose désormais au propriétaire public de procéder à une procédure de sélection librement organisée avant l’attribution d’un titre d’occupation du domaine public, à tout le moins lorsque son titulaire occupera le domaine en vue d’une exploitation économique. Sur ce terrain de principe, le juge des référés rappelle incidemment que l’obligation de sélection préalable trouve à s’appliquer aussi bien lorsque l’autorisation est délivrée par voie conventionnelle, que lorsqu’elle est délivrée par voie unilatérale, comme c’était ici le cas.

On sait par ailleurs qu’il existe de nombreuses exceptions au principe de sélection préalable, notamment l’exception tirée de l’urgence, dont se prévalait la commune (article L. 2122-1-2). Sur ce terrain, le magistrat a incidemment considéré que la réalité de cette urgence était en l’état fort discutable, notamment en considération du contexte qui entourait la délivrance de ces autorisations à des exploitants qui occupaient déjà la plage depuis plusieurs années.   

Partant, un doute sérieux affectait la légalité de l’autorisation délivrée. Et, au titre de la seconde condition de recevabilité du référé « suspension », le tribunal a jugé qu’elle était vérifiée dans la mesure où l’urgence de suspendre l’acte résultait de l’atteinte grave et immédiate que cette autorisation portait à un intérêt public, ici la protection du milieu naturel de la plage.

L’arrêté d’autorisation a donc été suspendu en attente du jugement de l’affaire au fond.