le 12/05/2017

Les modifications de la loi du 29 juillet 1881 introduites par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté

Loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté
  • La notion d’« identité de genre »

La loi du 27 janvier 2017 modifie les articles 24 alinéa 8, 32 alinéa 3 et 33 alinéa 4 de la loi du 29 juillet 1881 qui répriment la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence, la diffamation et l’injure publiques à mobile particulier. Les termes définissant la circonstance aggravante d’« identité sexuelle » sont révisés. A la notion d’« identité sexuelle » se substitue désormais la notion d’« identité de genre ».

  • La possibilité de requalifier dans le domaine de la lutte contre le racisme, l’antisémitisme, l’homophobie et le sexisme

La loi du 27 janvier 2017 crée un article 54-1 à la loi du 29 juillet 1881.

Cet article est une dérogation à la règle selon laquelle, en matière d’infraction à la loi sur la presse, la qualification du fait incriminé est irrévocablement fixée par l’acte de poursuite.

Il permet de procéder à une requalification limitée entre les infractions de diffamation raciale, injure raciale et provocation à la haine raciale (art. 32 alinéa 2 ; art. 33 alinéa 3 ; art. 24 alinéa 7).

Le même mécanisme est mis en place en matière d’homophobie et de sexisme (art. 32 alinéa 3 ; art. 33 alinéa 4 ; art. 24 alinéa 8).

L’impossible requalification reste cependant en vigueur pour les autres infractions dont la diffamation et l’injure à l’égard des corps constitués, des personnes dépositaires de l’autorité publique et des personnes chargées d’un service public ou d’un mandat public (articles 30 et 31 alinéa 1er).

  • La recevabilité de l’offre de preuve de la vérité des faits diffamatoires pour les diffamations à caractère raciste, antisémite, homophobe ou sexiste

L’article 55 de la loi du 29 juillet 1881 relatif à l’offre de preuve de la vérité des faits diffamatoires est complété.

 En cas de requalification d’une infraction initialement qualifiée d’injure ou de provocation à la haine en diffamation à mobile discriminatoire, en application du nouvel article 54-1, il est désormais possible pour la personne poursuivie de prouver la vérité des faits diffamatoires conformément à l’article 35 de la loi du 29 juillet 1881, ce qui avait pourtant toujours été refusé par la jurisprudence : toute preuve de la vérité des faits était exclue en matière de diffamation à caractère raciste, antisémite, homophobe ou sexiste.

Le Conseil constitutionnel a néanmoins validé cette disposition au nom des droits de la défense dans sa décision n° 2016-745 DC du 26 janvier 2017.

  • Le droit d’agir des associations

La loi relative à l’égalité et à la citoyenneté modifie l’article 48-1 et crée un article 48-1-1 à la loi du 29 juillet 1881.

L’article 48-1 autorise désormais les associations à se constituer partie civile pour les infractions d’incitation à la haine raciale, de diffamation et d’injure raciale ou de provocation à commettre un délit ou un crime raciste, dès lors qu’elles justifient que la victime ne s’oppose pas aux poursuites.  Auparavant, il était nécessaire d’obtenir  l’accord de la victime pour agir lorsque celle-ci était considérée individuellement.

Le nouvel article 48-1-1 permet aux associations dont l’objet est la lutte contre l’esclavage de se constituer partie civile en ce qui concerne les infractions d’apologie, de négation, de minoration ou de banalisation des crimes de réduction en esclavage ou d’exploitation d’une personne réduite en esclavage prévues aux articles 24 et 24 bis.

L’article 48-2 est également modifié et ouvre l’action civile en matière d’apologie de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ainsi qu’en matière de négationnisme aux associations dont l’objet est l’assistance des victimes de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité, la défense de leur mémoire ou la lutte contre les discriminations.

  • Les modifications et ajouts de certaines peines

 L’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 se voit ajouter une nouvelle peine : 1 an  d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende pour « ceux qui auront nié, minoré ou banalisé de façon outrancière, par un des moyens énoncés à l’article 23, l’existence d’un crime de génocide autre que ceux mentionnés au premier alinéa du présent article, d’un autre crime contre l’humanité, d’un crime de réduction en esclavage ou d’exploitation d’une personne réduite en esclavage ou d’un crime de guerre défini aux articles 6,7 et 8 du statut de la Cour pénale internationale signé à Rome le 18 juillet 1998 et aux articles 211-1 à 212-3,224-1 A à 224-1 C et 461-1 à 461-31 du Code pénal, lorsque : 1° Ce crime a donné lieu à une condamnation prononcée par une juridiction française ou internationale ».

La loi du 27 janvier 2017 ajoute également la peine complémentaire de stage de citoyenneté pour les infractions prévues aux articles 24, 32 et 33 de la loi du 29 juillet 1881.

Elle aggrave au surplus la peine de l’infraction d’injure commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap (art. 33 alinéa 3). Antérieurement de 6 mois d’emprisonnement et 22.500 euros d’amende, la peine est désormais de 1 an d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende.