le 14/10/2015

Modalités d’indemnisation des investissements non amortis du concessionnaire

Le Conseil d’Etat devrait se prononcer dans les prochains jours sur le pourvoi formé contre un arrêt de la Cour administrative de Nantes ayant notamment jugé que le défaut d’inscription des investissements d’un concessionnaire à son bilan n’exclut pas qu’il soit indemnisé pour la valeur non amortie de ceux-ci, à la suite de résiliation d’un contrat de concession (CAA Nantes, 31 octobre 2014, Société CEP-A Port Guillaume, n° 13NT00699).

Dans cette affaire, après avoir jugé que la résiliation par le département du Calvados du contrat de concession portant sur l’établissement et l’exploitation d’un port de plaisance aux torts exclusifs du concessionnaire était bien fondée, la Cour s’est prononcée sur l’élaboration du décompte de résiliation. Celui-ci est calculé par compensation entre les droits à indemnisation de l’autorité concédante, constitués par le coût de remise en état des installations, et ceux de la société concessionnaire.

Sur ce dernier point, la Cour a rappelé le principe du droit du concessionnaire à être indemnisé pour la valeur non amortie des investissements qu’il a réalisés en cas de rupture anticipée du contrat pour faute. En effet, si le concessionnaire fautif ne peut être indemnisé des pertes d’exploitation, et doit supporter les frais de la résiliation, l’autorité délégante ne peut pas pour autant bénéficier d’un enrichissement sans cause. Ce faisant, la Cour s’est placée dans la continuité d’une solution jurisprudentielle bien ancrée, rappelée récemment par le Conseil d’Etat (CE, Assemblée, 21 décembre 2012, Commune de Douai, n° 342788, visant l’ensemble des hypothèses de fin anticipée du contrat).

Mais la Cour a ajouté que « dans le cas où le concessionnaire n’a pas inscrit au bilan ces investissements ou ne les a inscrits que pour une valeur inférieure à leur montant réel, cette circonstance ne saurait faire échec aux droits du concessionnaire », malgré l’indication dans le cahier des charges de la concession de la déduction des « amortissements industriels et [d]es provisions pour dépréciation figurant au bilan » de la valeur des investissements. En pratique, la Cour a précisé qu’il appartient alors au concessionnaire de justifier par tous moyens la réalité et le montant exact des investissements réalisés. Ainsi, dans le cas où, comme en l’espèce, la comptabilité est erronée, il faudra fonder le calcul des amortissements à déduire sur les amortissements qui auraient dû normalement être pratiqués selon la durée d’usage des installations ou, à défaut d’indication à ce sujet, selon la durée de la concession.

Reste à savoir si le Conseil d’Etat suivra son rapporteur public qui, à l’audience qui s’est tenue au Conseil d’Etat le 25 septembre 2015, a conclu que l’indemnisation des investissements non amortis n’est effectivement pas conditionnée par leur inscription au bilan.