le 18/01/2018

Loi de finances pour 2018 : le Conseil Constitutionnel censure « l’amendement Collomb ».

Conseil constitutionnel DC n° 2017-758 du 28 décembre 2017

Saisi du contrôle de constitutionnalité de la loi de finances pour 2018, le Conseil constitutionnel a notamment censuré son article 85, autrement appelé « amendement Collomb », lequel prévoyait un régime dérogatoire spécifique à la Métropole de Lyon s’agissant de la répartition du produit de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) entre celle-ci et la Région Rhône-Alpes.

Il était en effet prévu pour ces deux seules collectivités d’annuler le transfert de 25 points de CVAE de la Métropole au profit de la Région, en application de l’article 89 III de la loi de finances pour 2016 (loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015). Ces dispositions prévoient en effet le versement d’une attribution de compensation financière raison des transferts de compétences, des départements aux régions, en matière de transport (qui ont respectivement eu lieu le 1er janvier 2017 pour le transport interurbain de voyageurs et le 1er septembre 2017 pour le transport scolaire, en application de la loi NOTRe).

La philosophie de ces dispositions est ainsi de compenser les charges transférées aux régions en raison des nouvelles compétences dont elles se trouvent investies en matière de transport : à cet effet, il a été prévu que 25% du produit de la CVAE départementale perçue l’année précédant l’application des dispositions bénéficierait désormais aux régions. In fine et en fonction du montant des charges transférées, une compensation financière est à verser soit au profit du département soit de la région.

Or, en l’occurrence aucune compétence n’ayant été transférée par la Métropole de Lyon à la Région Rhône-Alpes en matière de transport, la loi de finances pour 2018 a entendu corriger « une anomalie fiscale » en prévoyant que ce mécanisme de transfert fiscal ne s’appliquerait pas en l’espèce.

Les Sages censurent ces dispositions comme contraires au principe d’égalité devant les charges publiques, en considérant que « le législateur ne s’est pas fondé sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec le but » poursuivi.

Ils soulignent en effet que, bien que la Région Rhône-Alpes ne se voie transférer aucune compétence en matière de transports par la métropole lyonnaise, le transfert de fiscalité prévue par l’article 89 de la loi de finances pour 2016 est également justifié par la circonstance que les régions voient leur rôle renforcé en matière de développement économique.

Le Conseil constitutionnel s’inscrit ainsi dans la ligne du Conseil d’Etat, qui avait refusé de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité sur ce point s’agissant de la situation comparable que connaissent les Départements d’Ile-de-France, la Région se voyant en effet attribuer 25 points de CVAE départementale alors qu’elle ne s’est vue transférer aucune compétence en matière de transports, ceux-ci étant exclusivement organisés par le STIF (Conseil d’Etat, 28 juillet 2017, n° 410616).

On ne peut que s’étonner de cette convergence de positionnement entre la juridiction administrative suprême et le juge constitutionnel, qui a pour effet d’avaliser une rupture d’égalité entre les régions, laquelle ne se trouve fondée sur aucun critère objectif aisément décelable : on peine en effet à saisir la raison pour laquelle les régions qui se sont vues transférer des compétences en matière de transport publics (lesquelles demandent des moyens très importants) et les autres régions perçoivent exactement la même compensation fiscale de CVAE, quand ces dernières pourront les consacrer en totalité au développement économique régional. La position du juge constitutionnel apparaît d’autant plus paradoxale s’agissant de la métropole lyonnaise, investie de larges compétences en matière de développement économique.