Projets immobiliers publics privés
le 09/02/2023

L’exercice d’une activité expressément interdite par le règlement de copropriété constitue un trouble manifestement illicite qu’il convient de faire cesser

Cass. Civ., 3ème, 18 janvier 2023, n° 21-23.119

Le règlement de copropriété détermine la destination des parties privatives et communes de l’immeuble, ainsi que les conditions de leur jouissance, en application de l’article 8 de la loi du 10 juillet 1965.

A ce titre, l’alinéa 2 de ce texte dispose que : « le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l’immeuble, telle qu’elle est définie aux actes, par ses caractères ou sa situation. ».

En principe, aucune restriction ne peut être apportée par le règlement de copropriété, à la jouissance des parties communes. Cependant, ce principe doit être tempéré par l’exception selon laquelle l’usage des parties privatives peut être restreint en considération de la destination de l’immeuble. A titre d’exemple, dans les immeubles dont la destination est dite « d’habitation bourgeoise », il n’est pas rare que le règlement de copropriété interdise expressément certaines activités, qui seraient de nature à générer des nuisances. Tel est le cas du présent arrêt.

Un syndicat des copropriétaires a assigné des copropriétaires, en condamnation à retirer divers objets déposés sur leur terrain et à cesser une activité de fabrication d’achards (spécialité culinaire créole à base de légumes). La Cour d’appel de Nouméa, statuant en référé, rejette les demandes du syndicat des copropriétaires, en considérant que l’activité exercée ne constitue pas un trouble manifestement illicite au sens de l’ancien article 809 du Code de procédure civile (actuel article 835 du Code de procédure civile), de sorte qu’il appartient au tribunal saisi au fond de se prononcer sur l’arrêt de l’activité, interdite aux termes du règlement de copropriété. La Cour d’appel écarte ainsi les pouvoirs du juge des référés pour statuer sur la cessation d’une activité expressément interdite par le règlement de copropriété.

Pour considérer que l’activité n’est pas constitutive d’un trouble manifestement illicite, la Cour d’appel relève que d’autres copropriétaires exercent dans l’immeuble des activités non autorisées aux termes du règlement de copropriété, de sorte que les copropriétaires « s’accommodent d’une lecture souple de celui-ci ».

Un pourvoi en cassation est formé par le syndicat des copropriétaires. La Cour de cassation accueille le pourvoi et casse l’arrêt d’appel au visa notamment de l’article 8 de la loi du 10 juillet 1965 et de l’article 809 du Code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie.

La Cour de cassation retient, à l’inverse de la Cour d’appel, que l’exercice d’une activité expressément interdite par le règlement de copropriété constitue un trouble manifestement illicite.

La Cour de cassation valide ainsi qu’un règlement de copropriété peut apporter une restriction d’activité au sein de l’immeuble, dans la droite ligne d’une jurisprudence constante. Le magistrat des référés, juge de l’évidence, a le pouvoir de statuer sur la cessation d’une activité interdite aux termes du règlement de copropriété, dès lors que cet exercice est constitutif à lui seul d’un trouble manifestement illicite.