le 19/11/2015

Les Lois Rebsamen et Macron ont profondément modifié des pans entiers du droit du travail en assouplissant certaines règles et en simplifiant le dialogue social

Avec l’adoption durant l’été des lois Rebsamen et Macron, le droit du travail a été profondément modifié.

Voici les principaux points à retenir.

Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, dite « loi Rebsamen »

Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite « loi Macron »

I- L’ASSOUPLISSEMENT DE CERTAINES REGLES

– Faculté de double renouvellement des CDD et des contrats d’intérim

La loi Rebsamen instaure la possibilité pour l’employeur de renouveler deux fois le contrat de travail à durée déterminée (CDD) à terme précis, hors contrat aidé.

Ainsi, 3 CDD ou contrats d’intérim pourront intervenir (en lieu et place d’un renouvellement unique sous l’empire de l’ancienne loi).

– Les  obligations en matière d’embauche des travailleurs handicapés ressortant de la loi Macron

La loi ouvre de nouvelles possibilités aux entreprises pour remplir leur obligation d’emploi de travailleurs handicapés, en leur donnant notamment l’opportunité de passer des contrats de fourniture de sous-traitance ou de prestation de service avec des travailleurs indépendants.

II- SUR LE DIALOGUE SOCIAL

– Faculté d’extension de la DUP au CHSCT pour les entreprises de moins de 300 salariés

Le seuil pour mettre en place une Délégation unique du personnel (DUP) est étendu aux entreprises de 300 salariés (article L2326-1 modifié du Code du travail).

La loi Rebsamen précise qu’un Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) doit être instauré dans chaque établissement d’au moins 50 salariés, ou si tous les établissements font moins de 50 salariés, dans au moins l’un d’entre eux.

Autre innovation, dans les entreprises de moins de 300 salariés d’ores et déjà dotée d’une DUP ancienne formule – Délégués du personnel (DP) – Comité d’entreprise (CE), il est possible soit de maintenir le cadre actuel, soit de regrouper en une instance les DP/CE avec le CHSCT, à la condition d’une consultation préalable de ces trois instances.

Les réunions sont ramenées à un minimum de six fois par an sur convocation de l’employeur.

– Changements relatifs au CHSCT

· Mandat

Le mandat des membres du CHSCT est aligné sur la durée du mandat des membres élus du CE.

· Règlement intérieur

Cet organisme devra être doté d’un règlement intérieur.

· Délai de consultation du CHSCT

Les délais de consultation pour avis seront désormais définis par un accord collectif, ou à défaut un décret à paraître (sans pouvoir être inférieur à 15 jours).

A l’expiration du délai fixé, le CHSCT sera réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif.

– Changement relatifs au comité d’entreprise

Le comité d’entreprise (CE) n’aura plus à être consulté sur les projets d’accord collectif.

Le secrétaire du CE sera tenu de restituer le procès verbal des réunions du comité dans un délai et selon des modalités définis, soit par un accord conclu dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 2323-3 ou soit, à défaut d’accord, par un décret à paraître (article L. 2325-20 modifié du Code du travail).

– Augmentation des garanties pour les représentants du personnel

Les représentants du personnel verront la progression de leur salaire garantie.

Des entretiens de début et de fin de mandat  sont institués.

– Recours à la visio-conférence

Il sera possible de recourir à la visio-conférence entre représentants du personnel et membre du CE, sous réserve d’un accord entre l’employeur et les membres des institutions représentatives du personnel.

– Représentation des femmes et des hommes aux élections professionnelles

A compter du 1er janvier 2017, sont introduites des obligations visant à assurer une parité entre les femmes et les hommes lors des élections professionnelles (articles L. 2314-24-1 et L. 2324-22-1 et suivants nouveaux du Code du travail).

– Regroupement des obligations d’information-consultation du CE

A partir du 1er janvier 2016, les 17 obligations actuelles récurrentes d’information-consultation du CE sont regroupées en 3 sections (article L. 2323-10 modifié et suivants du Code du travail) :

1- Les orientations stratégiques et leurs conséquences (GPEC, formation professionnelle) ;

2- La situation économique et financière de l’entreprise (crédit impôt recherche, CICE) ;

3- La politique sociale, les conditions de travail, l’emploi (l’évolution de l’emploi, le programme pluriannuel de formation, l’apprentissage et l’accueil des stagiaires, la durée du travail, ou encore l’égalité professionnelle).

Pour chaque consultation, différentes informations, listées par la loi et devant faire l’objet d’un décret d’application, seront à fournir au CE.

La loi précise par ailleurs qu’afin d’étudier l’incidence sur les conditions de travail des problèmes généraux résultant notamment de l’organisation du travail, le CE peut bénéficier du concours du CHSCT dans les matières relevant de sa compétence.

Le CE peut se faire assister de l’expert-comptable de son choix sur les trois sections, l’article L. 2325-35 du Code du travail a été modifié en ce sens.

– Regroupement des négociations obligatoires du CE

A partir du 1er janvier 2016, les 12 obligations de négocier existantes seront regroupées en 3 négociations (article L. 2323-6 modifié du Code du travail) :

· chaque année : la rémunération, le temps de travail, et le partage de la valeur ajoutée ;

· chaque année : l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail ;

· tous les trois ans : une négociation triennale sur la gestion des emplois et des parcours professionnels, qui peut également porter sur le contrat de génération.

La fréquence des négociations pourra être modifiée, sous certaines conditions, par accord d’entreprise dans la limite de 3 ans pour les deux négociations annuelles et de 5 ans pour la négociation triennale.

– BDES

Une nouvelle rubrique est ajoutée à compter du 1er janvier 2016 à la Base de données économiques et sociales (BDES).

L’article L. 2323-8 1° bis modifié du Code du travail dans sa version en vigueur au 1er janvier 2016 prévoit que cette rubrique porte sur :

« Egalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise : diagnostic et analyse de la situation respective des femmes et des hommes pour chacune des catégories professionnelles de l’entreprise en matière d’embauche, de formation, de promotion professionnelle, de qualification, de classification, de conditions de travail, de sécurité et de santé au travail, de rémunération effective et d’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle, analyse des écarts de salaires et de déroulement de carrière en fonction de l’âge, de la qualification et de l’ancienneté, évolution des taux de promotion respectifs des femmes et des hommes par métiers dans l’entreprise « .

Cette rubrique reprend donc le rapport de situation comparée.

De plus, à partir du 1er janvier 2016, la BDES est désormais accessible aux membres du CHSCT.

Pour l’instant, seules les informations fournies de façon récurrente au CE devaient y figurer.

III- SUR LES MESURES INDIVIDUELLES

– La création d’un congé « crédit formation » non rémunéré en faveur des étudiants salariés

Pour permettre aux étudiants, par ailleurs salariés, de préparer leurs examens il est instauré aux termes de la loi Macron en leur faveur un congé supplémentaire de 5 jours ouvrables par tranche de 60 jours ouvrables travaillés prévus par leur contrat de travail.

– Nouveau compte personnel d’activité

La loi Rebsamen en son article 38 prévoit la mise en place d’un compte personnel d’activité destiné à regrouper et centraliser tous les comptes et les droits des salariés (CET, compte pénibilité…) dès son entrée sur le marché du travail et tout au long de sa vie professionnelle.

– Inaptitude médicale du salarié en présence AT/MP

La loi Rebsamen comporte la faculté pour l’employeur de licencier un salarié pour inaptitude à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle lorsque l’avis établi par le Médecin du travail mentionne expressément que « tout maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé » (article L. 1226-12 modifié du Code du travail).

– Sur l’épargne salariale aux termes de la loi Macron

A compter du 1er janvier 2016, l’intéressement sera placé par défaut, comme la participation, sur un plan d’épargne d’entreprise ou un plan d’épargne interentreprises lorsqu’il existe.

Ces sommes ne seront donc plus versées directement au salarié.

Corinne Metzger, avocat à la cour