Energie
le 12/05/2022

Les erreurs opérationnelles sur les marchés de gros de l’énergie peuvent être qualifiées d’opérations privilégiées au sens du Règlement REMIT

Délibération de la Commission de régulation de l’énergie du 14 avril 2022 portant communication sur la publication des informations relatives aux erreurs opérationnelles sur les marchés de gros de l’énergie

Décision n° 02-40-18 du CoRDiS en date du 25 avril 2022 portant sanction à l’encontre de la société EDF et de la société EDF Trading Limited

 

Après avoir constaté des différences de pratique de publication d’informations relatives à des erreurs opérationnelles sur les marchés de gros de l’énergie, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) précise, par une délibération n° 2022-113 du 14 avril 2022, que de telles informations peuvent être qualifiées d’informations privilégiées au sens des textes de l’Union européenne.

Pour mémoire, le règlement européen n° 1227/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie (ci-après « le REMIT ») définit la notion d’information privilégiée comme une « information de nature précise qui n’a pas été rendue publique, qui concerne, directement ou indirectement, un ou plusieurs produits énergétiques de gros et qui, si elle était rendue publique, serait susceptible d’influencer de façon sensible les prix de ces produits énergétiques de gros ».

Afin d’assurer le bon fonctionnement des marchés de gros de l’énergie, ces informations privilégiées doivent faire l’objet d’une publication en temps utile par les acteurs dudit marché et doivent faire l’objet d’un suivi et d’une mise à jour par ces mêmes acteurs, conformément à l’article 4 du règlement REMIT. Dans ce cadre, le REMIT prohibe les opérations d’initiés[1] qui consistent notamment en l’utilisation d’une information privilégiée en acquérant ou en cédant, ou en tentant d’acquérir ou de céder, pour leur propre compte ou celui de tiers, des produits énergétiques de gros auxquels se rapporte cette information et de communiquer cette information à une autre personne en dehors du cadre normal de l’exercice de leurs fonctions.

Par cette délibération, la CRE rappelle les critères permettant de qualifier une information privilégiée et précise qu’une telle qualification (notamment s’agissant d’une transaction erronée) relève de la responsabilité des acteurs du marché de l’énergie, lesquels doivent tenir compte du contexte général et de quatre conditions cumulatives. Ainsi, une information privilégiée est une information précise[2] (i), ne doit pas être rendue publique (ii), doit concerner, directement ou indirectement, un ou plusieurs produits énergétiques de gros (iii) et enfin, si elle était rendue publique, cette information doit être susceptible d’influencer sensiblement les prix des produits énergétiques de gros (iv).

Force est de reconnaître que ces dispositions du REMIT font l’objet d’un contrôle effectif en droit interne, en témoignent notamment les récentes sanctions du Comité de règlement des différends et des sanctions (CoRDiS) prononcées à l’égard des société EDF et EDF Trading Limited[3].

En effet, au titre de sa mission de surveillance des marchés de gros[4], la CRE a étudié les opérations de négoce de la société EDF et de ses filiales de trading dans un contexte de hausse significative des prix de gros de l’électricité sur le marché à terme à partir du mois de septembre 2016, en lien avec les indisponibilités nucléaires planifiées et fortuites pour l’hiver des années 2016-2017. Les informations transmises par la société EDF ont conduit la CRE à procéder à l’ouverture d’une enquête.

A l’issue de ladite enquête, le Président de la CRE a saisi le CoRDiS afin qu’il sanctionne la société EDF pour avoir méconnu des dispositions du REMIT et notamment celles de son article 3 précité, qui prohibent les opérations d’initiés. A ce titre, le CoRDiS a prononcé une sanction pécuniaire d’un montant de 500.000 euros à l’encontre de la société EDF. La société EDF Trading Limited a, quant à elle, été sanctionnée à hauteur de 50.000 euros pour avoir enfreint les dispositions de l’article 5 du REMIT relatives à l’interdiction des manipulations de marché.

 

[1] Interdiction prévue à l’article 3 du règlement REMIT.

[2] Une information peut être considérée comme précise sans toutefois être certaine.

[3] Décision du CoRDiS, 25 avril 2022, n° 02-40-18.

[4] Ainsi que le prévoit l’article L. 131-2 du Code de l’énergie.