le 18/03/2020

Les Associations syndicales libres et la domanialité publique

CE, 10 mars 2020, n° 432555

Depuis l’entrée en vigueur l’ordonnance du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires et son décret d’application du 3 mai 2006, le domaine public des personnes publiques est incompatible avec le périmètre des associations syndicales libres. 

 Mais les deux régimes n’étaient pas incompatibles sous l’ancienne législation applicable à ces associations syndicales de propriétaires. 

 Le Conseil d’Etat a été amené ainsi dans son arrêt du 10 mars 2020, à expliciter les conséquences de cette modification de régime, sur l’appartenance au domaine public d’un immeuble inclus dans le périmètre d’une telle association. 

Plus particulièrement, en l’espèce, une ASL crée en 1858, a saisi le Tribunal de grande instance, devenu le Tribunal judiciaire, tendant à faire constater que la commune est membre de cette ASL en qualité de propriétaire de six parcelles cadastrales situées à l’intérieur du périmètre d’une cité. 

Le Tribunal judiciaire a sursis à statuer sur l’action, jusqu’à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur l’appartenance au domaine public communal desdites parcelles et dise, le cas échéant, si leur affectation, actuelle ou projetée, est compatible avec les obligations découlant de leur appartenance au périmètre de l’association syndicale. 

Cette ASL était soumise au régime de la loi du 21 juin 1865 relative aux associations syndicales. 

Toutefois, ce régime a été abrogé et remplacé par l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004. 

Ainsi, l’article 6 de cette ordonnance prévoit que les créances de toute nature d’une association syndicale de propriétaires à l’encontre de l’un de ses membres sont garanties par une hypothèque légale sur les immeubles de ce membre compris dans le périmètre de l’association. 

Dès lors, le Conseil d’Etat considère qu’il découle de cet article que « le régime des associations syndicales est, depuis leur entrée en vigueur, incompatible avec celui de la domanialité publique, notamment avec le principe d’inaliénabilité ». 

Enfin, Le Conseil d’Etat tire les conséquences d’une telle incompatibilité. 

En premier lieu, l’ordonnance n° 2004-632 n’a toutefois pas eu pour effet d’emporter le déclassement des biens qui, avant son entrée en vigueur, appartenaient déjà au domaine public et se trouvaient compris dans le périmètre d’une association syndicale. « Dans ce cas, sauf à ce qu’ils fassent l’objet d’un déclassement, ces biens continuent d’appartenir au domaine public et l’incompatibilité des dispositions de l’article 6 de l’ordonnance du 1er juillet 2004 avec le régime de la domanialité publique a pour seule conséquence l’impossibilité pour l’association syndicale de mettre en œuvre, pour le recouvrement des créances qu’elle détient sur la personne publique propriétaire, la garantie de l’hypothèque légale sur les biens inclus dans le périmètre et appartenant au domaine public ». 

 En second lieu, un immeuble inclus dans le périmètre d’une association syndicale et qui, à la date d’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2004-632, n’appartenait pas au domaine public d’une personne publique « ne peut devenir une dépendance de ce domaine, alors même qu’il serait affecté à l’usage direct du public ou qu’il serait affecté à un service public et aurait fait l’objet d’aménagements propres à lui conférer cette qualification ».