le 20/04/2020

Les Associations foncières urbaines libres (AFUL) et la domanialité publique

CE, 8ème et 3ème chambres réunies, 23 janvier 2020, n° 430192

L’entrée en vigueur l’ordonnance du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires et son décret d’application du 3 mai 2006, n’ont pas apporté de réponse sur la comptabilité du domaine public des personnes publiques et le périmètre des associations syndicales libres (ASL) ou encore des associations foncières urbaines libres (AFUL). 

Le Conseil d’Etat dans son arrêt du 23 janvier 2020 se prononce clairement sur cette incompatibilité et précise que des biens acquis par une personne publique dans le périmètre d’une AFUL, ne peuvent appartenir à son domaine public. 

Plus particulièrement, en l’espèce, la commune propriétaire d’un ensemble immobilier (lots de volume) acquis en 2007, cédé en 2013 à une société, a saisi le Tribunal de grande instance, devenu le Tribunal judiciaire, en vue de faire constater la nullité de cette cession au motif que l’immeuble appartenait à son domaine public notamment par l’accueil de bureaux administratifs. 

Cet ensemble immobilier, lors de son acquisition par la commune, était inclus dans le périmètre d’une AFUL créée en 2002.  

Le Tribunal judiciaire a sursis à statuer sur l’action, jusqu’à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur l’appartenance au domaine public communal de cet ensemble immobilier et dise, le cas échéant, si leur affectation, actuelle ou projetée, est compatible avec les obligations découlant de leur appartenance au périmètre de l’association syndicale. 

Le Tribunal administratif a déclaré que les lots de volumes litigieux appartenaient au domaine public de la commune, sous réserve que l’immeuble dans lequel ils se situent n’ait pas alors été soumis au régime de la copropriété. 

Le Conseil d’Etat, saisi d’un pourvoi formé par la société s’est prononcé sur le point particulier de l’incompatibilité du domaine public avec le périmètre de l’AFUL. 

Préalablement, le Conseil d’Etat précise qu’aux termes de l’article L. 322-1 du Code de l’urbanisme, les associations foncières urbaines sont des associations syndicales régies par les dispositions de l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires. 

Ainsi, l’article 6 de cette ordonnance prévoit que les créances de toute nature d’une association syndicale de propriétaires à l’encontre de l’un de ses membres sont garanties par une hypothèque légale sur les immeubles de ce membre compris dans le périmètre de l’association. 

Outre cette disposition applicable également aux AFUL, l’article L. 322-9 du Code de l’urbanisme prévoit que les créances de toutes natures exigibles d’une association foncière urbaine à l’encontre d’un associé, qu’il s’agisse de provisions ou de paiements définitifs, sont garanties par une hypothèque légale sur les immeubles de l’associé compris dans le périmètre de l’association. 

 Dès lors, au vu de ces articles, le Conseil d’Etat considère que « le régime des associations foncières urbaines libres est, incompatible avec celui de la domanialité publique, notamment avec le principe d’inaliénabilité ». 

Ainsi, les locaux acquis par une personne publique dans un immeuble inclus dans le périmètre d’une AFUL, fût-ce pour les besoins d’un service public, ne peuvent constituer des dépendances de son domaine public.  

*** 

Cet arrêt aura donc des conséquences sur les divisions en volume composées de lots affectés au domaine public, dès lors que la plupart des ensembles immobiliers complexes sont gérés par des AFUL ou des ASL. 

Ainsi, si une dépendance du domaine public s’insère dans une division en volumes, se posera la question du choix du mode de gestion qui ne pourra se faire ni par une AFUL, ni par une ASL. 

Une solution tiendrait dans le fait que le lot de volume affecté au domaine public soit exclu du périmètre de l’AFUL ou de l’ASL, mais que soit mis en place un contrat de droit privé afin de déterminer les conditions ainsi que les charges permettant de bénéficier des équipements et espaces communs.